Narcotrafic en France : le Sénat rend son rapport

Narcotrafic en France : le Sénat rend son rapport ©Hugo LARIDON et Emmanuel GIRE
La commission sénatoriale sur le narcotrafic en France, a rendu ses conclusions... Un document rendu public ce jour, au cours d'une conférence de presse au Sénat.

Le narcotrafic dans l'Hexagone et en Outre-mer a des conséquences désastreuses sur la vie des habitants et sur le niveau global de sécurité dans ces territoires. La présence des narcotrafiquants sur ces territoires implique également une délinquance connexe marquée par une violence exacerbée et des trafics d’armes.

Une situation que dénonce Victorin Lurel, sénateur de Guadeloupe à travers un communiqué.

"Des Outre-mer submergés de produits stupéfiants, un sous-dimensionnement des moyens humains, une inadéquation totale entre les moyens déployés et les enjeux de la lutte contre le narcotrafic, un manque criant de moyens humains et techniques pour les services d’enquête, des records d’homicides volontaires par arme à feu avec un recours de plus en plus marqué aux armes de guerre".

Victorin Lurel, sénateur de Guadeloupe, dans un communiqué de presse datant du 14/05/2024

En réponse, la commission d'enquête sénatoriale sur le narcotrafic en France a proposé ce mardi la création d'un parquet national antistupéfiants (Pnast) et de faire de l'Office antistupéfiants (Ofast) une "DEA à la française", sur le modèle de l'agence antidrogue américaine, en lui donnant pleine autorité sur les services de terrain.
"Ce nouveau parquet permettra de spécialiser et d'incarner la lutte contre le narcotrafic (...) et nous avons l'ambition de faire de l'Ofast une DEA à la française. Cela implique une véritable autorité sur les enquêtes et les moyens" alloués à la lutte, ont annoncé en conférence de presse les sénateurs Jérôme Durain (PS) et Etienne Blanc (LR), président et rapporteur de la commission d'enquête.

35 propositions pour lutter contre le trafic de drogue

Au total, la commission a présenté 35 propositions pour tenter de lutter contre le trafic de drogue. 
Jérôme Durain a jugé que le narcotrafic constituait "une menace directe pour l'intérêt de la nation" et ce "nouveau parquet permettra de spécialiser et d'incarner la lutte contre le narcotrafic dans la sphère judiciaire".
"Corollaire de cette organisation, côté répressif, il faut renforcer l'Ofast créé en 2019, cheffe de file de la lutte antistup mais qui aujourd'hui ne l'est qu'en titre", a poursuivi le président de la commission. "Nous avons l'ambition, a-t-il dit, de faire de l'ofast une DEA à la française. Cela implique une véritable autorité sur les enquêtes et des moyens à la lutte."

Jérôme Durain a qualifié le plan antidrogue 2 que doit présenter le gouvernement prochainement de "famélique" et "pas à la hauteur des enjeux". Il a expliqué que la commission avait eu accès à ce plan, qui, selon lui, est "en deçà" du précédent plan.
Dans son rapport, la commission s'est montrée critique sur le bilan des opérations "places nettes" et "places nettes XXL" au regarde des moyens considérables déployés. "Elles sont utiles mais les résultats sont modestes."

La commission a insisté sur l'importance de taper les trafiquants au porte-monnaie. Etienne Blanc a rappelé que le chiffre d'affaires du trafic de drogue en France représentait "entre trois et six milliards d'euros" par an. Mais, a-t-il ajouté, seulement 100 millions d'euros sont saisis". "C'est nettement insuffisant."
Sur ce volet, la commission suggère de rendre "systématiques les enquêtes patrimoniales dans toutes les enquêtes".
Elle propose en outre que "les commerces de façade" qui servent à blanchir l'argent de la drogue fassent "l'objet de fermetures administratives".
Autre proposition: la création d'une "injonction pour richesse inexpliquée" quand "un réseau tombe". Il faut demander "aux trafiquants comment ils ont constitué leurs avoirs (...) et s'ils n'y parviennent pas, ils s'exposent à la saisie ou la confiscation", a développé Étienne Blanc.
Enfin, les deux sénateurs ont insisté sur la lutte contre la corruption, qui prend la forme par exemple de la consultation de fichiers de police, d'achat de services auprès des dockers, etc. "Il est temps de réagir avant de connaître le même sort que les pays voisins, a estimé Jérôme Durain, pour qui "le risque est immense." "Il n'y a pas de corruption de basse intensité."