"Il y a des sorties dont on ne sort pas indemne".
Ainsi débute le message, synonyme de coup de gueule, posté sur les réseaux sociaux par la SNSM de Pointe-à-Pitre, vendredi 24 février 2023.
La veille, Christophe, Fabrice, Bernard, Jérémie et Caroline, tous bénévoles de la Société nationale de sauvetage en mer, ont dû récupérer en mer le corps d’un noyé, au large de Grand-Baie, au Gosier. Au moment de partir, ils savaient déjà que la victime était décédée. Bien que se disant "ce n'est pas notre boulot", ils ont répondu présents, suite à l’appel du Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS).
Cette intervention, ils ont dû la faire sans la présence des services publics obligatoires, alors qu’un officier de police judiciaire est tenu de les accompagner. Mais l’OPJ était occupé ailleurs.
"Nous sommes là pour sauver la vie en mer, pas pour ramasser des défunts", rappelle la SNSM, racontant le calvaire de son équipe, sur place : "Nous sommes 5 sur la vedette, 5 à faire les bravaches, parce que nous redoutons tous l'état du noyé (...) Notre nageur Christophe, avec notre aide, l'a hissé à bord de la vedette".
Ce triste épisode a été la goutte de trop. Les bénévoles, confrontés à l’ "absence criante des services de l'Etat", s’interrogent sur les limites de leur engagement. "Nous remplaçons des services de l'état défaillants, qui nous l'ont confirmé dès qu'ils sont arrivés pour prendre la relève. Des gens formidables et épuisés. Comme nous", déclarent-ils.
On a attendu. Les services de l’Etat sont arrivés très rapidement [NDLR : après la récupération du corps]. Il y avait trois policiers, la police scientifique et le médecin légiste. Mais les policiers étaient exactement dans le même état que nous ! C’est-à-dire absolument navrés. On sentait bien qu’ils n’étaient pas partis ramasser des moules ! Ils ne sont pas assez nombreux, ils ont trop de travail, eux aussi ! Sauf que nous, on est bénévoles !
Caroline Guézille, chargée de communication de la SNSM.
De surcroît, en plus de ne pas assumer pleinement leur rôle, les services de l’Etat semblent ne pas considérer, à leur juste valeur, les efforts consentis et les tâches assumées par la SNSM.
Nous, les sauveteurs en mer, intervenons de plus en plus. Et nous sommes souvent surpris de voir à quel point l’Etat ne nous prend pas en compte. Par exemple, une anecdote criante : après la Route du Rhum, il y a eu un débriefing à la préfecture, avec tous les interlocuteurs qui avaient participé à cette élaboration de Route du Rhum. Les seuls qui n’étaient pas invités, alors que nous avons fait un travail colossal, c’est nous.
Caroline Guézille, chargée de communication de la SNSM.
Or, on se souvient que la SNSM était présente, dans le dispositif de sécurisation du plan d’eau d’arrivée des skippers. Ils étaient aussi là quand deux personnes ont perdu la vie, en marge de cette course trans-Atlantique.