Le néocolonialisme est comme le carnaval, il amène des déguisements que nous mettons pour aller dans l'espace public. Seulement le vernis ne tient plus lorsque nos mondes rentrent en collision."
‘’Discours sur le néo-colonialisme’’ paru aux Editions Café Noir, à découvrir et à lire dans ‘’Papiers d’Identité’’.
Christelle Martial Guadeloupe La 1ère
(Extrait de Montray Kréyol)D'entrée de jeu, ce titre fait écho à un autre à savoir le célébrissime "Discours sur le colonialisme" d'Aimé Césaire publié en 1950, il y a donc plus de trois-quarts de siècle. Ce texte, on s'en souvient, avait fait le procès de la colonisation du monde par l'Europe tout en dénonçant l'abaissement systématique de ce que le père de la Négritude appelait "l'Homme noir". Ce texte possédait un souffle, une puissance rhétorique, qui avait, à l'époque, stupéfié les contempteurs de tout ce qui avait trait à l'Afrique, aux Antilles et à ce que l'on nommait à l'époque "la race noire". Texte-coup de poing qui avait ébranlé "les assises du monde" pour paraphraser Césaire.
J'ai ressenti le même choc en lisant le "Discours sur le néocolonialisme" de Steve Gadet. D'abord parce qu'il nous avait habitué soit à des travaux scientifiques dépassionnés comme celui qu'il a réalisé sur les églises noires aux Etats-Unis -du solide travail universitaire- soit à de la fiction comme avec son magnifique recueil de nouvelles, Fleur de lys, paru chez Présence Africaine soit enfin à des ouvrages sur les relations Homme-Femme, sur l'Amour avec un grand "A" et autres mignardises -qu'il me pardonne !- qui, semble-t-il, rencontrent un large public. Féminin, je présume...
Voici qu'avec son nouveau livre, Gadet démontre qu'il possède une quatrième corde à son arc ! Car ce n'est plus l'universitaire stricto sensu qui parle, ce n'est plus le nouvelliste, ce n'est plus le conseiller en affaires conjugales, mais bien ce que l'on pourrait appeler le "souleveur d'âmes". Ce néologisme pas très heureux, j'e conviens, renvoie au terme créole "palantjé" qu'il n'est pas très facile de traduire. Ecoutons-le dès la première page de son livre : "Face à ces travers, face à cette puanteur, face à cette réalité sociopolitique, l'intellectuel antillais doit prendre position."
Il s'agit là rien moins que d'une sommation et, dans nos pays de négro-larbins, uniquement préoccupés de leur petite carrière et de strapontins dérisoires, lancer une telle sommation est une preuve de courage. De très grand courage même !
Césaire avait déjà dénoncé le colonialisme et nous avait enjoint de relever la tête, de faire front devant l'ignominie ; Gadet, lui, dénonce l'aujourd'hui, ce qu'il nomme le néocolonialisme auquel il demande sans détour des comptes
L'homme est connu pour ses prises de position sans ambages et il participe volontiers à l'enrichissement des intelligencesAutres ouvrages à découvrir ou redécouvrir :
* A L'AIDE ! Les cultures urbaines sont dans ma classe !
* Les cultures urbaines dans la Caraïbe (Sous la direction de Steve Gadet)
* Dieu et la race aux Etats Unis : Le pouvoir politique de l'Eglise noire
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* Dis-le aux étoiles
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* Sous le soleil de la dignité.
* Le plus petit de mes frères
* Faire une différence Steve Gadet a 35 ans. Il est né à Villiers-le-Bel. Il a grandi en Guadeloupe mais vit en Martinique après avoir travaillé pendant une année en Jamaïque. C'est un passionné de littérature. Marié et père de deux enfants, il enseigne l’histoire des Etats-Unis.
Ce jeune activiste guadeloupéen impliqué dans des problématiques qui lui tiennent à cœur depuis plusieurs années à savoir l’impact des musiques urbaines sur la société antillaise, l’épanouissement de la jeunesse, le dialogue entre les milieux religieux et laïques et l’accès à la littérature par le plus grand nombre.
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