Femmes de pouvoir, femmes d’espoir

De gauche à droite: Christelle Hilaire Sabayo, Aurore Francius et Patricia Glaudin
A l’occasion de la journée de la Femme, la Délégation Guyane du Centre National de la Fonction Publique Territoriale mettait hier à l’honneur les femmes dirigeantes dans les collectivités locales. Mais qui sont les femmes de pouvoir en Guyane ? Nous avons rencontré trois d'entre elles.
Elles sont guyanaises et occupent des postes à hautes responsabilités au sein des collectivités locales. Entre management d’équipes, décisions importantes, horaires flexibles et obligations familiales, Christelle Hilaire Sabayo (Directrice Générale des Services de la mairie de Sinnamary) Aurore Francius (Directrice Générale des Services de la mairie de Cayenne) et Patricia Glaudin (Directrice du département Patrimoine et Logistique du Conseil Régional) nous disent tout sur leur vie bien remplie.

Quel rapport avez-vous avec votre hiérarchie politique ? (Maire ou président de collectivité)

Christelle Hilaire Sabayo : Nous entretenons de très bons rapports. Il m’a expliqué sa vision politique, je l’ai comprise et c’est à moi de la faire appliquer et de la mettre en musique.
Patricia Glaudin : On le conseille en fonction de notre expertise. Ensuite il prend sa décision finale. Moi j’ai des relations assez fréquentes avec le président. Il répond souvent par mail ou SMS. De temps en temps si c’est un sujet pointu ou important on peut prévoir un rendez-vous.
Aurore Francius : Je dirai qu’ils sont excellents. Nous avons de très bons rapports. C’est indispensable. Je dois appliquer la politique du maire, il faut qu’il y ait un minimum de confiance et de bons rapports. C’est indispensable.

Quels sont vos rapports avec vos collègues masculins ?

Christelle Hilaire Sabayo : Les rapports que j’entretiens avec mes collègues masculins sont différents de ceux que j’ai avec les femmes. On est soit dans une approche de séduction ou frontale. Mais nos rapports sont quand même plus francs, une fois passer le moment de la découverte, nous avons des relations très cordiales. Avec les femmes c’est différent, elles n’ont pas l’habitude d’être managées par d’autres femmes. On est parfois confronté à la rivalité.
Patricia Glaudin : Très bons. J’ai d’excellentes relations avec eux. C’est plus facile de manager des hommes. Ils sont plus souples, moins rancuniers, moins susceptibles. Par contre je dirais que les femmes sont plus rigoureuses dans leur travail.
Aurore Francius : J’ai de bons rapports avec mes collègues masculins. Je suis la supérieure hiérarchique de 1300 personnes, mais je n’ai pas eu l’occasion d’être confrontée à des stéréotypes du fait que je sois une femme. D’autant plus que le maire de Cayenne est une femme. Je pense que les générations ont changé, on est plus centré sur les compétences que les préjugés. Je suis très optimiste et je crois que les nouvelles générations ne se limitent pas qu’au sexe de la personne.

Comment faites vous pour concilier vie familiale et vie professionnelle ?

Christelle Hilaire Sabayo : C’est difficile. En général on a des horaires décalés. Il faut être bien épaulée. Avoir un compagnon et une famille qui prennent le relais.  Il faut aussi savoir de temps en temps faire une coupure franche pour se consacrer uniquement à sa famille.
Patricia Glaudin : C’est difficile et pas évident. Je passe beaucoup de temps au travail. Là où je dirais que c’est plus facile pour moi c’est que je ne suis pas mariée et je n’ai pas d’enfants. Alors peut être que ceci explique cela (rires).
Aurore Francius : Bonne question, très bonne question ! Il y a très peu de femmes en tant que DGS. Il faut réussir à organiser sa vie de famille. Je suis moi-même mère d’une petite fille. Etre DGS c’est 24h sur 24. Il faut une cellule familiale forte qui permet de s’organiser. Un cocon stable qui puisse vous soutenir.

Est-ce que cela faisait partie de vos projets d’occuper un poste avec de telles responsabilités ?

Christelle Hilaire Sabayo : Non j’avais choisi le droit, je voulais devenir juge. Après ma maitrise je suis revenue en Guyane, et j’ai tout de suite trouvé du travail en tant que responsable RH à la mairie de Macouria. Après cela je ne suis plus repartie.
Patricia Glaudin : Oui dès le collège, je savais que je voulais un poste à responsabilités sans savoir dans quel domaine. Je savais que je voulais être cadre, avec les années ça s’est affirmé. J’aimais lire, apprendre, aller à l’école. Je ne voulais pas être une exécutante et désirais aller le plus loin possible.
Aurore Francius : Réponse sans équivoque oui ! Je savais que je voulais être DGS et dans une collectivité territoriale. J’ai un master 2 en Management public et gestion des collectivités territoriales. Quand j’étais en stage et que je voyais les femmes en tailleur, mener des équipes ça me donnait envie. J’ai ciblé tout mon parcours dessus : être cadre dans une collectivité. Après mon master, j’ai passé le concours de la fonction publique, je suis lauréate du concours d’attachée territoriale.

Quand vous regardez votre parcours professionnel quel bilan pouvez-vous faire ?

Christelle Hilaire Sabayo : Je suis trop jeune pour faire un bilan (rires). Pour moi je ne suis qu’au début. Cela fait qu’une dizaine d’années que je travaille.
Patricia Glaudin : Je trouve que j’ai parcouru une bonne partie de ce que je voulais faire. J’aimerais aller plus loin. Ce n’est pas facile de travailler dans une collectivité territoriale. Quand on est une femme et une cadre, il arrive qu’on vous attende au tournant. On a parfois des coups durs, mais je suis globalement satisfaite.
Aurore Francius : il me faut encore beaucoup d’années devant moi. Je suis jeune, j’aurais 30 ans, mais le bilan que je peux faire est plutôt positif. J’ai appris beaucoup plus que je ne pensais apprendre. Ce poste m’a grandi humainement, j’ai vraiment découvert ce qu’était l’humain.

De quoi êtes-vous le plus fière aujourd’hui ?

Christelle Hilaire Sabayo : Ma famille, j’ai réussi malgré mes responsabilités à conserver ma cellule familiale. J’ai trouvé un bon équilibre grâce à mon mari, pour accompagner nos enfants. J’ai enfin trouvé le rythme dans ce que je fais. J’ai trouvé ma voie, je sais ce que je veux.
Patricia Glaudin : Ce dont je suis fière c’est de réussir à apprendre à d’autres collaboratrices de nouvelles choses, à aimer leur boulot et à les faire progresser. Surtout si ce sont des femmes, je les pousse, j’ai envie qu’elles réussissent.
Aurore Francius : D’un point de vue général, je dirais d’avoir fondé une famille. J’ai un bébé de 18 mois, et donner la vie est le plus beau cadeau qu’on puisse avoir. Professionnellement j’ai réussi à être à la tête d’une collectivité de 1300 agents et 80 services. En tant que femme, et jeune femme surtout ça donne beaucoup d’espoir pour les autres femmes. On peut être jeune et réussir chez soi, j’ai fait pratiquement toutes mes études en Guyane.

Quels conseils pouvez-vous donner à des jeunes femmes cadres qui voudraient suivre vos traces ?

Christelle Hilaire Sabayo : De s’attendre à faire des sacrifices. Ne pas baisser les bras. Le chemin sera long et difficile, car c’est un choix d’avoir une carrière. C’est une façon de de se réaliser et de s’épanouir entre la famille et un travail qu’on aime.
Patricia Glaudin : D’être elles-mêmes. De penser à leur vie privée et familiale. De toujours garder espoir, de ne jamais laisser tomber, aller de l’avant. Être pugnaces et déterminées !
Aurore Francius : De ne jamais se décourager, toujours écouter son instinct. Vouloir aller plus loin et être ambitieuse. Quand on a des embûches, on en ressort plus fort. Il ne faut jamais se démotiver et avoir du courage.

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