Le bois canon, ou cecropia, est un arbre des plus répandus en Guyane. Il apparaît dans tous les endroits défrichés : chablis, abattis, bords de routes, et même en ville. L'arbre est facilement reconnaissable à ses grandes feuilles à plusieurs lobes, vertes et rugueuses à l'endroit, blanches et lisses à l'envers. Son tronc est clair et lisse à l'extérieur, et creux à l'intérieur, ce qui lui vaut son nom de bois canon en Guyane, et de bois trompette aux Antilles, où il est également bien connu. D'abord originaire de l'Amérique du sud, Amérique centrale et des Antilles, cette espèce pionnière a conquis l'Afrique, l'Asie tropicale et même les îles du Pacifique.
Le bois canon appartient à la famille des moracées, qui comprend aussi bien des bois d'ébénisterie comme l'amourette tacheté et le satiné rubané, que des arbres fruitiers comme le fruit à pain et le jacquier. Son bois n'étant pas utile en menuiserie, et ses fruits n'étant pas comestibles, le bois canon a pendant longtemps suscité peu d'intérêt : en Guyane, il est surtout connu pour être la nourriture favorite du paresseux. Les Amérindiens utilisaient toutefois son bois creux pour fabriquer des flûtes et des trompettes.
La coqueluche de l'industrie cosmétique
Pourtant, cet arbre retient désormais toute l'attention des scientifiques pour ses propriétés médicinales. Traditionnellement, le bois canon était employé par les Amérindiens pour ses vertus cicatrisantes. Les Créoles en employaient les feuilles tombées par terre pour faire des tisanes contre l'hypertension, tandis que les Mexicains l'utilisaient contre le diabète. Ces propriétés anti-hypertensives et anti-diabétiques ayant été confirmées en laboratoire, les scientifiques ont également découvert au bois canon des vertus amincissantes. Il n'en fallait pas davantage pour que l'industrie cosmétique dépose un brevet sur le cecropia, devenu depuis l'ingrédient vedette de certaines crèmes amincissantes vendues en pharmacie. Le magazine Anform a d'ailleurs publié un article sur le bois canon en décembre 2014.
D'un point de vue écologique, le bois canon a une grande importance. Arbre à croissance rapide, il est souvent le premier à reconquérir les parcelles mises à nu, et contribue ainsi à la reforestation. En plus du paresseux, il héberge plusieurs espèces de fourmis, qui utilisent son bois creux comme abri et se nourrissent de ses fruits. En échange, ces fourmis débarrassent l'arbre des insectes qui viendraient dévorer ses feuilles. En 2010, une équipe du CNRS a démontré que certaines fourmis étaient capables d'attraper de très gros insectes en s'accrochant à la partie rugueuse des feuilles de bois canon.
Reportage de Claire Giroud et Emile Théolade sur la découverte des fourmis Velcro (R)