Près de 2.000 Amérindiens de différentes régions de Colombie dans les rues de Cali en marge de la COP 16. À pied, ou à bord de leurs véhicules bigarrés. Au nom de tous les peuples autochtones, ils réclament la prise en compte de leurs savoir-faire ancestraux et le respect de la planète pour sa renaissance et la survie des générations futures, comme l’exprime Maria Campo, représentante du peuple autochtone de Cali :
Nous voulons sensibiliser les gens du monde entier parce qu'il est temps d'arrêter ce que nous faisons à notre mère la Terre, d'arrêter de la surexploiter, d'arrêter les monocultures et de permettre aux communautés de continuer à planter pour leurs propres usages et coutumes.
Une détermination amérindienne saluée par Andrew Miller, directeur du plaidoyer à Amazon Watch, une organisation qui tente de protéger la forêt amazonienne :
« Les populations autochtones sont en première ligne pour protéger la biodiversité et lutter contre le changement climatique qui met leur vie en danger »
La biodiversité menacée en Amazonie par les extractions, le réchauffement…
En ligne de mire des Amérindiens, notamment, l'exploitation minière, particulièrement en Amazonie. Gerardo Jumi, conseiller de l'Organisation Nationale Autochtone de Colombie tire la sonnette d’alarme sur ce thème :
"L'économie fondée sur l'extraction, l'extraction des ressources en bois, l'extraction des minerais, de l'or, du charbon, tous ces types d'activités extractives font courir de graves risques aux peuples autochtones. Mais aussi à l'ensemble de l'Humanité et à la planète elle-même."
Un discours qui résonne chez Amazon Watch qui détaille la liste des fléaux :
L'extension, l'expansion de la frontière agricole, la déforestation en cours, d'autres types d'expansion des réseaux routiers, les mégaprojets et les phénomènes naturels qui sont eux-mêmes exacerbés par le changement climatique. Il s'agit des sécheresses et des incendies massifs que nous observons en ce moment. Si l'on met tout cela bout à bout, on obtient une véritable menace pour la biodiversité, une perte de biodiversité.
Suivi de la COP 15 : inverser la destruction des terres, des océans et des espèces vivantes
Il y a 2 ans, lors de la COP 15, à Montréal, au Canada, un accord historique (dit de Kunming-Montréal) avait été adopté. Il visait à « stopper et inverser » la destruction des terres, des océans et des espèces vivantes, indispensables à l’Humanité. Une feuille de route avait été établie, engageant les pays à présenter des stratégies nationales de biodiversité pour cette COP 16.
Parmi les 23 objectifs mondiaux fixés : protéger 30% des terres et des mers, restaurer 30% des écosystèmes dégradés d'ici 2030, et mobiliser des milliards de dollars chaque année pour la nature.
Mais le processus a pris du retard. Seuls 34 pays sur 196 ont présenté des stratégies complètes. 107 autres ont soumis des engagements partiels.
Les peuples autochtones contribuent au plan d’action. Seront-ils écoutés ?
Du coup les autorités colombiennes qui président la COP 16 ont inclus des groupes autochtones et d'ascendance africaine. Elles les considèrent comme essentiels pour inverser la perte de biodiversité. Ils ont même contribué au « plan d'action pour la biodiversité » présenté par Bogota.
Yesid Conda, membre du Conseil Régional Indigène du Cauca (CRIC) énonce méthode et propositions :
Nous avons marché aujourd'hui ici, dans la ville de Cali, après avoir élaboré un programme et être parvenus à un consensus. Nous avons huit points qui nous permettent d'adopter une position politique, culturelle et spirituelle claire. Au premier plan de ce que nous faisons dans le cadre de l'élaboration de la conférence COP16 sur la biodiversité, et avant tout ce que nous avons positionné, se trouve la demande de respect de nos territoires.
Les représentants autochtones seront-ils réellement écoutés ? Pour Andrew Miller c’est l’une des grandes questions de cette COP 16 :
« Beaucoup de mots ont été prononcés sur les voix des communautés locales, des peuples indigènes qui jouent un rôle clé. C'est donc l'une des choses que nous chercherons à savoir. Dans quelle mesure cette participation directe au processus de prise de décision est-elle réelle et ne se limite-t-elle pas à de la poudre aux yeux ? »
Accélérer la protection de la biodiversité pour une « Paix avec la Nature »
En tout cas, à en croire les défenseurs de l’environnement il y aurait urgence. Selon le Programme des Nations Unies pour l’environnement, le monde connaît la plus grande perte de vies depuis la fin des dinosaures. Un million d’espèces végétales et animales seraient menacées d’extinction. D’après un rapport du World Wild Fund for Nature et de la Zoological Society of London, les populations d'animaux sauvages auraient déjà diminué de 73% en 50 ans. La baisse serait même de 95% pour les espèces sauvages recensées, en Amérique Latine et dans les Caraïbes. Amazon Watch parle « du point de basculement de l'Amazonie et de la possibilité que l'ensemble de l'écosystème (NDLR : amazonien) s'effondre. »
C’est clair, pour les défenseurs de l’environnement, l’enjeu vital de la conférence de Cali, est donc d’accélérer le programme de protection de la biodiversité lancé il y a 2 ans à Montréal. Dans ce sens, les représentants des peuples autochtones mettent tout leur poids dans la balance auprès des associations et des pays qui les soutiennent pour que l’Humanité fasse « la Paix avec la Nature », slogan de cette COP 16.