Covid-19 : le statut vaccinal des élèves à disposition des chefs d'établissement

Les députés ont voté hier soir un amendement déposé par le gouvernement au projet de loi "vigilance sanitaire". Il prévoit de permettre aux responsables des établissements scolaires du premier et du second degré d'avoir connaissance du statut vaccinal des élèves.

Mesure de bon sens pour certains, acte de stigmatisation pour d'autres... Le nouvel amendement de la loi sur la « vigilance sanitaire », voté hier soir, en première lecture, dans l'hémicycle de l'Assemblé nationale, n'a pas fini de faire des vagues. L'article 4ter permet aux chefs d’établissement du premier et second degré de connaître désormais le statut vaccinal des élèves.

Selon le gouvernement, par dérogation à l’article L. 1110‑4 du code de la Santé publique, il s'agit « de faciliter l’organisation de campagnes de dépistage et de vaccination et d’organiser des conditions d’enseignement permettant de prévenir les risques de propagation du virus » et donc de justifier les fermetures de classe.

Un vote houleux acquis à 135 voix contre 125 et auquel n'a pas participé le député guyanais Lénaick Adam. Le vote du texte tout entier s’est joué à dix voix près.

Une levée du secret médical ?

Selon ce texte, seuls les responsables des établissements scolaires (directeurs d'écoles, principaux de collèges et proviseurs de lycées) auront donc accès aux informations relatives au statut virologique des élèves, à l’existence de contacts avec des personnes contaminées ainsi qu’à leur statut vaccinal. Le rectorat lui n'aura accès qu'à des données anonymes.

Selon le protocole sanitaire en vigueur en Guyane, lors de la confirmation d'un cas positif, les parents contactent alors le chef d'établissement qui lui en réfère à la cellule Covid du Rectorat de Guyane et à l'ARS. Ces autorités décident ensuite des dispositions à mettre en place (fermetures de classes, isolements...).

Sylvie Audigeos-Berteaux, secrétaire académique du SNICS Guyane (syndicat national des infirmiers conseillers de santé ), regrette que cet amendement ait été présenté sans aucune concertation ou consultation préalable avec les acteurs du terrain. 

"Il ne faut pas perdre la confiance des parents. Chacun doit prendre sa part de responsabilité. Mais il ne faut pas que le directeur ou chef d'établissement délègue cette tâche à quelqu'un d'autre. Et donne ainsi accès à des données qui restent avant tout des données médicales. "

Sylvie Audigeos-Berteaux, secrétaire académique du SNICS Guyane

 

S'il existe déjà un contrôle lors de l’inscription à l'école pour plusieurs vaccins obligatoires, (fièvre jaune, diphtérie, tétanos, poliomyélite...), Sylvie Audigeos-Berteaux rappelle que la vaccination contre la Covid-19 est un choix : "Le risque pour les élèves est qu'ils soient stigmatisés pour une décision, pour laquelle, pour la plus part d'entre eux, il n'ont pas eu le choix, car mineurs et relevant de l'autorité des parents".

Etablir des limites

Conctactée par Franceinfo, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) demande donc "un texte réglementaire" pour encadrer son application et éviter les dérives. Par ailleurs, la Cnil s’interroge quant "au risque d’accoutumance et de banalisation de dispositifs attentatoires à la vie privée" mais aussi celui  d'un "glissement vers une société où de tels contrôles deviendraient la norme et non l’exception".

Le Sénat doit se prononcer à partir de jeudi prochain sur ce texte. La mesure concernant le statut vaccinal des élèves a de fortes de chances de ne pas passer au palais du Luxembourg. La Haute assemblée l’avait déjà rejetée en juillet dernier.