Fils du Docteur Roland Barrat, maire de Cayenne de 1953 à 1965, Etienne-Yves Barrat né le 26 février 1936 à Cayenne est décédé paisiblement le 16 mai entouré de sa famille. Il laisse une épouse et 7 enfants.
Un brillant avocat
Cet homme politique de Guyane a été élevé dans la maison familiale à la rue de Gaulle juste en face du palais de Justice (clin d’œil du destin). Après son baccalauréat il part en métropole. Il effectue ses études de droit à Montpellier et obtient une licence de sciences politiques.
Se destinant à la haute fonction publique, il passe et obtient le concours d’attaché de l’administration centrale et est nommé à la préfecture de Paris au service des marchés publics.
Il fonde une famille et épouse Thérèse en décembre1960. Mais, rappelle sa fille Patricia Barrat qui évoque avec nous le parcours de son père, quelques années plus tard en 1966, il cède à l’appel du pays et abandonne sa carrière dans la haute administration qui l’aurait sans doute amené à être préfet.
Il rentre en Guyane, s’inscrit au barreau et effectue son stage au cabinet Vignon. Il prête serment le 28 avril 1966 et ouvre son cabinet au 37 de la rue Lallouette. Patricia se remémore un père très pris par sa vie publique et professionnelle. Toutefois passionné de pêche et de chasse, Etienne-Yves Barrat trouvait toujours du temps pour emmener ses enfants avec lui découvrir les joies de la nature. Fin gourmet, il cuisinait lui-même le gibier qu’il ramenait de la forêt. Des recettes traditionnelles qui, depuis, ont été soigneusement transmises aux différentes générations.
Au barreau de Cayenne, Etienne-Yves Barrat était connu pour ces plaidoiries : « Nous avons eu l’occasion d’aller le voir plaider. C’était un très grand orateur, il aimait les effets de manche, son éloquence impressionnait… »
Patricia se souvient d’une affaire qui a défrayé la chronique dans les années 90. Un trésorier payeur emprisonné niait farouchement le meurtre de sa femme et son père, avocat des parties civiles, avait fini par obtenir ses aveux en plein procès. Un fait d’arme qu’elle évoque avec fierté.
De1993 à 1998, Etienne-Yves Barrat a été directeur général des services de la Chambre de Commerce sous la mandature du président Jean-Pierre Prévot. Il a aussi été conseiller économique et social durant 10 ans et membre du Conseil de l’IEDOM.
Il a repris ensuite ses activités au barreau de Cayenne en collaborant avec maître Hélène Sirder jusqu’à sa retraite à plus de 80 ans. « C’était un homme de dossiers, un travailleur de l’ombre. Il a mené des dossiers à Bruxelles... Il a été passionné par son métier et passionné par la vie politique…» conclut sobrement sa fille Patricia.
Plusieurs décennies d’une vie politique remplie
L’ancien sénateur Antoine Karam qui a vécu un compagnonnage politique avec Etienne-Yves Barrat, décrit un homme très affable qui s’était construit une très belle carrière professionnelle tout en œuvrant auprès de ses concitoyens.
« J’ai travaillé avec Maître Etienne-Yves Barrat alors qu'il était 1er vice-président du Conseil général dans les années 80 au cours de la mandature d'Elie Castor. Il faisait partie de ces jeunes guyanais de retour au pays dans les années 66-67 et qui se sont engagés en politique. Il a été élu conseiller général du canton ouest de Cayenne de 1970 à 1976, il avait battu le conseiller général sortant l’inamovible Paul Rullier … Une surprise ! Il a alors intégré la majorité du Conseil Général présidé par Léopold Héder accompagné des jeunes de l’époque Claude Ho A Chuck, Yves Robo et Georges Giffard. »
En 1973, une scission se crée au sein de cette majorité et Claude Ho A Chuck en devient le président. Etienne-Yves Barrat quitte ce poste en 1976 et revient dans le canton de Matoury-Rémire-Montjoly en 1982 qu’il représente jusqu’en 1988.
En 1985, il est élu 1er vice-président sous la présidence d’Elie Castor. Antoine Karam souligne :
« C’était un très gros travailleur, qui conseillait beaucoup. Il était juriste de profession et étudiait toutes les lois de la décentralisation liées aux transferts de compétences. Mais surtout il fut un excellent un médiateur. Il y avait souvent des conflits et des divergences entre les élus de la majorité, il intervenait efficacement. »
Etienne-Yves Barrat avait été introduit au Parti socialiste guyanais en 1982 par la militante Dolore Boromé. En 1988 sous la bannière du PSG, il se présente à la députation dans la deuxième circonscription et est battu au 2e tour de 264 voix par Léon Bertrand. En 1989, candidat une nouvelle fois pour le poste de conseiller général sur le canton de Matoury désormais séparé de Rémire-Montjoly, il n’obtient pas la victoire face à Jean-Pierre Roumillac.
Il ne reviendra plus sur le devant de la scène politique.
L’ancien président de la Collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre a salué sa mémoire : « … C’était un homme aussi brillant qu’humble et réservé, dont la technicité et la maîtrise des dossiers constitua un atout irremplaçable pour tous ceux auprès de qui il a travaillé, et notamment pour son parti, le PSG… Avocat intègre et rigoureux, il illustra le tribunal par des plaidoiries brillantes sur des dossiers complexes et apporta, par humanisme et loyauté envers son parti, assistance gracieuse à bon nombre de ses militants réclamant plus d’équité… ».
Les obsèques d’Etienne-Yves Barrat se dérouleront le 20 mai à 15h à la cathédrale Saint-Sauveur de Cayenne.