Yonaël Assard et Cristofe Montabord le clament haut et fort : les jeunes Guyanais ne doivent pas s'interdire l'excellence. Tous les deux étudient à Sciences Po Paris. Yonaël, actuellement en 2e année se trouve sur le campus de Reims et prépare un bachelor en Sciences humaines et sociales
Cristofe a commencé son cursus au mois de septembre 2020 à Poitiers afin d'obtenir un master en stratégies territoriales et urbaines.
De retour pour 3 semaines en Guyane, ils ont mis à profit ce temps et ont démarché pour de futurs stages et aussi rencontrer les élèves de la section internationale de leur ancien lycée Melkior et Garré afin de les motiver.
Le choix d'intégrer Sciences Po
Avant d'être des condisciples, ces deux Guyanais de 19 ans, sont d'abord des amis de longue date. Tout a commencé à Cayenne, au collège Eugène Nonnon pour continuer au lycée Melkior et Garré ou chacun a suivi la filière internationale à un an d'intervalle. Titulaires d'un bac économique et social pour l'un et scientifique pour l'autre avec la mention très bien, ils ont choisi le parcours sciences po. Un parcours d'excellence qui exige du travail et une motivation sans faille.
Ils évoquent avec enthousiasme leurs débuts alors même que la crise covid sévit et a quelque peu compliqué, surtout pour Cristofe, leur intégration au sein de cette école prestigieuse où n'entre pas qui veut.
Cristofe qui découvrait l'Europe, la France, a du très vite s'adapter :
Au début cela était difficile. Mais en campus délocalisé nous sommes plus proches de l'administration. Tout est fait pour nous aider...
Avec une quinzaine d'heures de cours par semaine, il faut effectuer un travail personnel intense. Le confinement du à la pandémie covid a rendu obligatoire les cours à distance. Dans cette configuration, les étudiants peuvent rester scotchés de 15 à 18h par jour devant leur écran d'ordinateur. Un rythme soutenu qu'il faut tenir. Durant ce premier semestre, Cristofe a découvert avec appétit le cours "humanité", un mélange de philosophie et d'histoire appliquée, dans son cas, à la zone latino-américaine. Bilingue, il suit les cours en espagnol.
Ses examens d'essais comme les partiels se sont bien déroulés et il a obtenu sa moyenne partout voir davantage dans certaines matières.
Yonaël Assard avoue que son choix a été tardif, il ne voulait pas se spécialiser immédiatement. Il envisageait une prépa au lycée Félix Eboué et a finalement opté pour Sciences Po. L'école offrant un choix pluridisciplinaire lui à permis de suivre en première année un cursus général ambitieux :
J'étais en filière scientifique, je n'avais pas accès à certains cours comme l'histoire, la philosophie, l'économie et le droit des matières qui m'intéressaient beaucoup que j'ai découvert en une même année. Pour cette 2è année, j'ai choisi politique et humanité et je me spécialise au fur et à mesure en ayant conscience de la chance que j'ai eu d'essayer certains cours...
Pour sa troisième année qui doit s'effectuer obligatoirement à l'étranger, Yonaël veut rejoindre l'université de Montréal au Canada ou encore celle de San-Francisco en Californie dans la perspective de valider sa majeure qui est politique et humanité.
L'étudiant reconnaît avoir toujours eu de bons résultats scolaires poussés par ses parents. Aujourd'hui, il est ouvert à tout : un master en communication, en journalisme ou encore en communication et industrie créative par exemple pourrait lui convenir. Mais l'anthropologie, les études post coloniales l'intéressent également fortement. Un cursus qu'il envisagerait dans une université nord-américaine.
Trois guyanais en première année à Sciences-Po Poitiers
Travailler au sein des associations
Sur le campus de Poitiers, Cristofe Montabord a retrouvé Rose Emmanuella Hector et Florence Kibido qui sont toutes les deux de Saint-Laurent-du-Maroni. La solidarité joue à fond à travers un groupe whatsapp. Elles, aussi, font mieux que s'accrocher et se trouvent sur une bonne lancée.
L'étudiant Sciences-Po type est un citoyen concerné ouvert à tous. Il est vivement recommendé de s'investir dans des associations. Yonaël Assard a affectué un parcours civique d'un mois en 2020 avec l'association des Frères de la Krik. Une expérience formatrice qu'il a vécu au mois de juillet en pleine pandémie pour faire de la prévention et distribuer des vivres aux plus démunis. A Reims, il se trouve dans 6 associations dont celle des étudiants ultra-marins "Sciences O". Il s'y "éclate" et en profite pour promouvoir, dès qu'il le peut, la Guyane.
Cristofe Montabord est le délégué de sa promo. Un poste essentiel où il rayonne et qui l'amène à fréquenter les quelques 150 étudiants qui la compose. Il est aussi au pôle communication du bureau des élèves. Il y déploie et complète ses connaissances en communication digitale.
Cristofe est très intéressé par les problématiques sociétales territoriales, il souhaite effectuer son parcours civique dans une structure collective en Guyane au mois de mai et démarche dans ce sens.
Créer l'émulation auprès des lycéens guyanais
Aucun étudiant de Guyane ne doit s'interdire l'excellence
Vendredi dernier, Yoanël et Cristofe se sont rendus dans leur ancien lycée Melkior et Garré à la rencontre des élèves de la section internationale américaine. Leur objectif : parler de leur cursus, expliquer les démarches à faire, les embûches à éviter et surtout créer l'émulation auprès de ces jeunes, souvent en manque de confiance. Durant cet échange, les questions ont fusé. Pour les deux étudiants, cet exercice a répondu à leurs attentes d'enrichissement mutuel.
Cultiver la maîtrise de soi et trouver les solutions pour avancer. Cristofe durant ce confinement Covid s'est livré à l'introspection :
La maîtrise de soi, c'est vraiment quelques chose que j'ai découvert chez moi, lier travail et contexte sanitaire c'est quelque chose que je ne pensais pas pouvoir réussir . Au final, j'ai tenu! Il fallait avoir confiance en soi ...
Hors de chez eux, les deux étudiants ont découvert leur guyanité profonde, leur appartenance à une société d'Amazonie. Dans leur campus, ils côtoient des étudiants venus du monde entier. Ce milieu très élitiste, autrefois réservé uniquement à une caste, effrait certains. Pourtant depuis 20 ans les conditions d'accès ont évolué. En 2005, 12% des étudiants bénéficiaient d'une bourse, actuellement 25% des étudiants sont boursiers. De leur multiculturalité, les Guyanais font un atout. Ils ne veulent rien s'interdire. Surtout, ils disent aux autres jeunes : être Guyanais n'est pas handicap quelque soit le milieu d'où l'on vient. Alors ne vous interdisez rien, vous y arriverez!
Ecoutez-les :