Féminicides en Guyane : six femmes tuées en trois ans

Slogan inscrit sur les murs par ceux qui dénoncent les féminicides.
Depuis le 1er janvier 2021, 101 féminicides se sont produits sur le territoire français, dont un en Guyane où ces trois dernières années, six affaires ont défrayé la chronique.

Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, la Guyane enregistre le plus grand nombre de femmes victimes de violences conjugales, avec 10,4 femmes âgées de 20 ans ou plus pour 1 000 habitantes de mêmes sexe et âge. Vient ensuite la Seine-Saint-Denis avec 9,2 femmes victimes pour 1 000 habitantes. L’an dernier, elles étaient déjà 102 à avoir perdu la vie, 156 en 2019, 120 en 2018...Des chiffres qui effraient. La récidive est souvent difficile à accepter.

Six féminicides connus depuis 2019

La dernière affaire date du 14 septembre dernier. Les secours retrouvent deux personnes décédées dans un logement à Cayenne. Les premiers éléments de l’enquête laissent penser que l’homme aurait tué sa compagne avant de se suicider. C’est la fille du meurtrier présumé qui a donné l’alerte. Son père l’avait appelée pour lui annoncer qu’il comptait mettre fin à ses jours. Ne résidant pas en Guyane, elle contacte aussitôt les services de secours. Ils se rendent rapidement à l’adresse indiquée mais ils arrivent trop tard, l’homme s’est déjà donné la mort. Il s’est pendu.
A l’intérieur du domicile, les secours découvrent également le corps sans vie de sa compagne. Le médecin légiste relève de nombreuses lésions de violences, notamment des traces de strangulation. Le procureur de la République a ouvert une enquête et l'a confiée à la Brigade criminelle du service territoriale de police judiciaire.

La mort de Karina, le choc

Défilé contre les féminicides

Il a fallu une forte mobilisation des parents et amis de la victime, ainsi que la médiatisation de l’affaire au Brésil pour aboutir à l’interpellation de Sylvain Kereneur un homme de 34 ans. Il a été mis en examen et placé en détention provisoire  pour « meurtre aggravé par concubin » en 2020 sur sa compagne, une Brésilienne de 23 ans.

Le suspect a été interpellé le 31 mai à son domicile à Antibes (Alpes-Maritimes) par la section de recherche de Cayenne, puis transféré en Guyane. La victime avait été retrouvée sans vie sur les berges d’une crique à Cacao le 15 mai 2020. Son corps à moitié brûlé. Les médecins légistes avaient émis l’hypothèse d’une mort par asphyxie. L’autopsie a montré que la victime était enceinte « de 6 à 8 semaines », sans qu’il soit possible de déterminer qui était le père.

Le suspect avait fait l’objet d’une ordonnance de mise en accusation devant les assises de Cayenne en mai 2015 pour le meurtre, en 2006, d’une jeune femme retrouvée morte par asphyxie en Guyane et dont le corps avait été brûlé. L’un de ses avocats était alors Eric Dupond Moretti, l’actuel Garde des Sceaux. Suite à l’appel de l’accusé, ce renvoi aux assises avait été annulé par la Chambre de l’instruction de Cayenne en septembre 2015. Le procureur a indiqué que cette première affaire « est en cours de réexamen au parquet à la lumière des éléments de l’actuelle procédure, (…) ce précédent dossier criminel n’étant pas prescrit. »

Le féminicide : acte de violence ultime

Enceinte également cette jeune ressortissante haïtienne, mère d’un petit garçon. Le 30 mai 2020, les gendarmes de Matoury interviennent à Cogneau-Lamirande, dans le quartier dit « Bagdad ». Une dispute aurait mal tourné. La jeune femme âgée de 29 ans meurt sous les coups de couteau de son concubin. L’auteur présumé se serait lui-même infligé des coups de couteau pour nier les faits et se déclarer victime d'une agression. Il a raconté ne plus se souvenir de rien, mais des témoins ont assisté à la scène. 

Mélissa Barthes

Le féminicide est la forme la plus extrême d’acte de violence à l’égard d’une femme. Les actes de violence peuvent aller du harcèlement verbal, à d’autres formes de maltraitance psychologique, aux violences physiques et sexuelles. Le féminicide est l'ultime palier de cette spirale.  
Le meurtre de Mélissa a eu un écho national, à l'époque le débat sur les violences conjugales fait rage. La jeunesse de la victime a ému l'opinion. Le 31 juillet 2019, le corps sans vie, de Mélissa Barthez, 26 ans, a été découvert sur son lit dans son appartement du lotissement Wassai à Cayenne La jeune femme a été retrouvée avec une plaie à la carotide. Son compagnon a tenté de se suicider au couteau. Mickael Huang Fuck a avoué son crime à un proche de la victime qui a prévenu les forces de l'ordre. Interpellé, il a reconnu le meurtre. Mykaël avait déjà fait 7 ans de prison pour le meurtre de son ex beau père.

 

La préméditation rajoute à l'horreur

Un féminicide sur fond de drame de la misère. Le 22 janvier 2019, à Cayenne, une mère de famille de 40 ans est tuée par son compagnon. L'homme l'a ligotée ainsi que son frère avant d'incendier la maison avec de l'essence. L’incendie a ravagé deux maisons à la cité Mango à Cayenne mettant à la rue 23 personnes et surtout faisant trois victimes.

Deux d'entre elles ont péri dans les flammes et une autre a été gravement blessée, brûlée au 3ème degré. Cet incendie qui a tué deux adultes n'est pas accidentel. Il s'agit d'un crime passionnel selon l'nquête diligentée par le Parquet. L’incendie de la cité Mango à Cayenne a coûté la vie à deux personnes, un frère et sa sœur d’une quarantaine d’années.