« Nous, nous voudrions que les gens apprennent le créole, l’étudient vraiment et pour cela il faut passer par l’école ».
Robert Loe Mie a toujours parlé le créole dès son plus jeune âge dans la maison familiale. Il a voulu parfaire sa connaissance de la langue et a entrepris de l’étudier à l’université. Il a ainsi obtenu le diplôme universitaire en langue et culture régionale option créole (DULCR). Faire perdurer le créole guyanais passe, selon ce créoliste, par son enseignement pour son apprentissage académique :
« Parler une langue et l’étudier ce n’est pas la même chose. La majorité des gens qui parlent le créole ne l’ont pas appris. Ici les créoles se côtoient et, obligatoirement, il y a une interaction. Les gens issus de parents de différentes communautés (guyanaise, haïtienne ou antillaise) font forcément des mélanges en s’exprimant car ils n’ont pas appris le créole guyanais. La faute la plus courante étant la formation du pluriel des mots, il y aussi des mélanges du français sur le créole et du créole sur le français. »
Une inévitable interconnexion entre les créoles
Les personnes âgées des communes sont, souvent, considérées comme des références dans l’usage du créole souligne Robert Loe Mie pour la simple raison qu’elles étaient très peu en contact avec d’autres créoles et langues. : « Il n’y avait pas la radio, la télévision, elles vivaient presque en autarcie linguistique. Maintenant les gens ont des contacts avec d’autres créoles et d’autres références se créent. »
À l’exemple de Saint-Laurent où, la majorité des créoles au début et au milieu du 20e, hormis ceux qui travaillaient pour le bagne, étaient des créoles venus travailler l’or sur le Haut-Maroni, pour s’installer, ensuite à Saint-Laurent. Il s’agissait, souvent de personnes originaires de Sainte-Lucie. Le créole parlé à Saint-Laurent était celui de Sainte-Lucie ou des Antilles, nombre de militaires de Martinique ou de Guadeloupe ayant fait souche.
« Il n’y a pas de langues pures sauf les langues mortes. A partir du moment où les langues se côtoient, il y a forcément une interconnexion, des échanges. Ainsi, nous disons en Guyane, prendre sommeil au lieu de s’endormir et l’expression je ne suis pas mêlé est un créolisme. On peut parler de francisation et d’antillanisation et tout cela grâce aux musiques, aux mélanges familiaux. On peut même parler pour les jeunes de jamacaïsation « mo ka watch to » autant d’apports qui diluent le créole originel. »
45 classes bilingues français créole dans le primaire en Guyane
Sur le territoire, on compte 10 écoles réparties à Cayenne (2), Matoury (3), Macouria (2), Kourou (3) qui accueillent, au total, 45 classes ce qui représente environ 1100 élèves. Ces enfants reçoivent leur enseignement pour égale moitié dans les deux langues soit par un enseignant habilité pour les deux langues soit par deux enseignants.
Toutes les disciplines s’étudient autant en français qu’en créole. Cela est valable uniquement en primaire. À la fin du cycle qui a commencé en maternelle et s’achève au CM2, l’enfant doit pouvoir parler en interaction le créole, le lire et l’écrire.
Dans le secondaire, les élèves peuvent choisir d’étudier le créole en seconde langue au même titre que toute autre langue.
De nombreuses manifestations sont organisées tout au long de l’année pour la diffusion de la langue telle la fameuse dictée créole ou encore le tout nouveau concours d’éloquence en créole pour des élèves de la maternelle au CM2.
Une seconde édition est prévue en 2024, elle s’adressera à tous ceux qui parlent le créole de la maternelle au lycée.