Le contesté franco-hollandais en Guyane au 19e siècle expliqué par l’historien Tristan Bellardie

Tristan Bellardie, historien et chargé de cours à l'Université de Guyane
Il travaille depuis plus de 30 ans sur les relations entre les Français et les Bonis au 19e et sur le problème frontalier de la Guyane, l’historien Tristan Bellardie installé à Maripasoula, enseignant à l’Université de Guyane promet de nous expliquer le fameux contesté franco-hollandais et les populations du Haut-Maroni (1860 et 1893) lors d’une conférence qui va se tenir à la Maison des Cultures et des Mémoires ce vendredi 28 juin.

De nombreuses péripéties ont jalonné les siècles sur les délimitations de la colonie française en Amérique du Sud : la Guyane. S’il y eut à l’est de la colonie, le contesté du territoire de l’Inini entre la France et le Brésil, il y eut aussi un processus similaire à l’ouest entre la France et la Hollande et il a aussi fallu un arbitrage international pour résoudre le différend géo stratégique.

L’historien Tristan Bellardie va narrer ce processus diplomatique pour lequel il a effectué de nombreuses recherches depuis des décennies. Il nous dévoile pour partie le propos de sa conférence :

« On aborde là un morceau d’histoire de la Guyane sur sa partie ouest à la la frontière avec le Surinam. Le contesté franco-hollandais c’est le problème d’un territoire qui nait au 19e siècle entre la Guyane hollandaise et la Guyane française. Une partie de territoire comprise entre l’Awa l’actuelle branche qui remonte le long de Grand-Santi et Maripasoula et la rivière Tapanahony qui entoure Grand Santi  vers le Surinam. »

Un enjeu diplomatique et économique

« Il s’agit de deux bras du fleuve qui sont assez semblables et la question qui se pose au 19e c’est de savoir finalement lequel des deux est le bras formateur puisque les Hollandais et les Français se sont accordés au cours des siècles précédents pour décréter le Maroni comme frontière entre les deux colonies. Mais à la fin du 19 siècle la problématique territoriale devient stratégique parce qu’on y découvre de l’or. À partir des années 1885, on trouve de l’or sur la rive gauche de l’Awa c’est-à-dire en plein dans ce territoire qui est contesté entre les Français et les Hollandais. À ce moment-là les machines diplomatiques vont engager un bras de fer qui va demander un arbitrage à une tierce nation qui est la Russie. C’est le tsar qui va arbitrer sur cette affaire-là. Un dossier va être constitué par les uns et les autres pour faire valoir leurs droits. À l’arrivée ce sont les Hollandais qui l’emporteront et la frontière sera définitivement fixée sur l’Awa. »

L’or au centre du contesté franco hollandais

« Mais, entre-temps poursuit Tristan Bellardie, on se trouve sur une décennie durant laquelle il y a un afflux de chercheurs d’or. Ils sont plusieurs centaines, voire plusieurs milliers qui exploitent un territoire contesté sur lequel on ne sait pas qui a droit à l’or. Il y a donc des stratégies qui se mettent en place pour les orpailleurs pour passer à travers les mailles des tentatives de contrôle. Les autorités quant à elles veulent mettre en place des contrôles qui permettent de déterminer d’où vient l’or pour le confisquer ou pas. Au milieu de tout cela il y a les businengue, bonis en l’occurrence puisque nous sommes en plein pays boni. Ils vont jouer à la fois le jeu des orpailleurs parce que cela les intègre économiquement par rapport au reste de la Guyane et aussi le jeu de l’administration française parce que cela les protège d’autres populations businengue comme les djukas. Ils jouent le jeu de middle ground, un concept développé par Richard Wright aux USA en étudiant les colons français et les populations amérindiennes d’Amérique du Nord. C’est une espèce de zone grise ou chacun s’arrange en fonction de sa grille de lecture culturelle. »

Cette page d’histoire sera développée ce vendredi 28 juin à 18h30 à la Maison des Cultures et Mémoires de Guyane.