Lutte contre la pêche clandestine : un projet de protocole d'accord commun aux trois Guyanes

Vers un plan d'action commun aux 3 Guyane pour lutter contre la pêche clandestine ©Guyane la 1ère
A l’issue d’une réunion les 12 et 13 juin à Paramaribo, des acteurs de la pêche et des fonctionnaires du Guyana, du Surinam et de la Guyane ont rédigé un texte commun. Une démarche lancée en novembre au Guyana par le WWF et le Comité des Pêches de la Guyane. Les trois gouvernements vont étudier ces propositions pour une éventuelle mise en oeuvre.

Le poisson est une ressource menacée sur le plateau des Guyanes. En cause, la surpêche due notamment aux bateaux clandestins.

Propriétaire de douze navires, Marcellino Waldding, patron pêcheur à Paramaribo constate la chute des prises depuis trente ans.

" Avant dans les années 80 on pêchait beaucoup de poisson mais depuis les années 90 c'est vraiment en baisse !"

Il y a urgence à lutter contre la pêche illégale. Pendant deux jours s'est tenue une réunion au ministère de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche du Surinam à Paramaribo. Acteurs de la pêche et fonctionnaires du Guyana, du Surinam, et de Guyane française ont travaillé ensemble pour trouver des solutions rapporte Michel Tony Nalovic, consultant Pêche durable de la société fishing cleaner.com.

" Cet atelier a été organisé en utilisant des principes de résolution de conflits. On traite les sujets les plus simples d'abord pour les dépasser ensemble, avoir un constat partagé. Nous avons invité une panoplie de personnes de chaque pays qui représentent le système juridique, le système police, le système environnemental pour que chaque homologue puisse se rencontrer. Par la suite nous avons organisé des ateliers spécifiques sur chaque point pour faire émerger des idées ensemble et consensuelles".

Parmi les propositions, le partage des listes de bateaux de pêche de chaque pays, pour sanctionner d’éventuels contrevenants travaillant chez le voisin. Zojindra ARJUNE, directeur adjoint du département Pêche au ministère de l’agriculture du Surinam

"Nous sommes tous d'accord pour coopérer et partager des données. Comment nos bateaux sont immatriculés, leur identification, leur nombre. Toutes ses données peuvent aider à lutter contre la pêche illégale ".

Autres propositions, des patrouilles communes, et le partage d’informations sur les méthodes de contrôle. Wayne Razah, cadre douanes et Autorité Fiscale du Guyana, chef de la délégation du Guyana souhaite que cela se règle aussi avec la diplomatie :

" Nous allons rendre compte à nos dirigeants, leur dire l'importance de cette réunion et du combat contre la pêche clandestine au Guyana. Nous voulons le faire remonter au plus haut pour que les diplomates puissent se rencontrer."

Le temps presse. Ces derniers mois, le comité des pêches et le WWF ont compté dans l’ouest de la Guyane des dizaines de bateaux illégaux venus du Surinam, voire du Guyana explique Patrick Cosset, conseiller territorial de Guyane, délégué à la chasse et aux traditions :

"Nos voisins d'à côté pillent nos ressources, violent notre territoire et on a l'impression qu'il faut encore leur demander pardon pour ce qu'ils font. C'est pourquoi je vais plaider auprès du président de la collectivité pour que des réunions conjointes soient mises en place avec le ministre des affaires étrangères, le ministre de la pêche, le gouvernement français avec nos deux voisins pour qu'enfin les choses se décantent."

En cas d’inaction sur la pêche illégale, le Surinam et le Guyana pourraient se voir interdits d’exporter leurs poissons vers l’Union Européenne précise Léonard Ragnauth, président du Comité Régional des Pêches de la Guyane :

"La menace réelle c'est de sanctionner ces pays malheureusement par des cartons orange, jaune ou rouge comme cela a été le cas pour d'autres pays. Une menace européenne et même américaine. Il faut vraiment qu'ils se mettent au travail sérieusement et c'est l'espoir que l'on nourrit."

En juin 2025, la France accueille la conférence des Nations Unies sur l’océan. L’occasion d’exposer ce dossier au niveau international rappelle Laurent Kelle, responsable du WWF Guyane :

" Ce que l'on souhaite dire à chacun des gouvernements concernés, c'est qu'il leur reste un an pour trouver les modalités d'intervention et les protocoles d'accord qui permettront enfin la lutte efficace conjointe contre la pêche illégale."

Sous pression, le Surinam commence à agir. Selon son administration, un bateau a vu sa licence retirée le mois dernier pour avoir pêché en Guyane, d’autres sanctions seraient tombées. En revanche, il n'y a pas d’efforts encore perceptibles au Guyana…