Vie chère : pourquoi acheter une voiture coûte si cher en Outre-mer ?

Voiture dans un parking (image d'illustration)
Gestion des stocks, importation depuis l’Europe, conditions climatiques... Interrogés par les sénateurs de la délégation aux Outre-mer, les distributeurs automobiles ultramarins se sont justifiés sur les écarts de prix observés avec l'Hexagone.

Acheter une voiture coûte bien plus cher en Outre-mer que dans l’Hexagone. "Cet écart résulte pour nous de deux facteurs essentiels : la taille limitée de nos marchés et l’éloignement géographique avec nos sources d’approvisionnement", explique Ludovic Erbeïa, le directeur de GBH Automobile, un groupe présent en Guadeloupe et en Martinique. Ce jeudi, il était interrogé aux côtés d'autres concessionnaires par la délégation aux Outre-mer du Sénat, qui s'intéresse à l'une des composantes de la vie chère : le marché de l'automobile. 

Premier défi pour les distributeurs ultramarins : la gestion des stocks. Alors que les concessionnaires de l’Hexagone peuvent être livrés au fil de l’eau, ceux d’Outre-mer sont contraints d’importer les véhicules en grande quantité et de les stocker, ce qui coûte cher. Mais même en stockant, ils ne peuvent pas forcément répondre à la demande. "On doit gérer au bas mot 250 000 références sur chacune des marques que nous distribuons, c’est impossible de stocker l’intégralité de la gamme, ça nous oblige à importer un nombre important de références par avion, précise Cyril Comte, le président du Groupe Citadelle, implanté dans les cinq DROM. Pour les petites marques, cela peut représenter jusqu’à 80% de nos approvisionnements, renchérissant ainsi nos frais d’approche."

En Hexagone, un concessionnaire est livré deux fois par jour, en Outre-mer, dans le meilleur des cas, nous sommes livrés en deux mois par bateau et en sept à dix jours par avion, avec évidemment des surcoûts considérables.

Cyril Comte, Président du Groupe Citadelle.

Le problème des stocks concerne à la fois les voitures et les pièces de rechange. "On a un stock qui représente jusqu’à six mois de vente, là où un concessionnaire de métropole n’en a quasiment pas", explique Ludovic Erbeïa. Le coût du stockage se répercute sur les prix, ce qui pousse de plus en plus de consommateurs à s’approvisionner directement en pièces détachées depuis l’Europe, en les commandant par internet. Mais bien souvent, quand elles sont achetées via ce biais, les pièces ne sont "pas déclarées à l’octroi de mer" avance Cyril Comte, pointant la fiscalité comme une autre raison des écarts de prix observés entre les DROM et l'Hexagone.

L'impact du climat

Non seulement les voitures neuves coûtent plus cher quand elles sont achetées en Outre-mer, mais l’occasion n’est pas forcément une solution. L’humidité, la chaleur et l’état des routes accélèrent le vieillissement des voitures qui, en plus, roulent plus dans les territoires ultramarins qu'ailleurs en France. "À cause de la sévérité de nos climats les véhicules s’abiment beaucoup plus vite et il est beaucoup plus difficile de s’approvisionner en véhicule d’occasion", commente Cyril Comte, qui pointe aussi "l’utilisation intensive" de la voiture dans les DROM : "Ce sont de petits territoires mais nous roulons beaucoup plus. En Guadeloupe, le kilométrage moyen c'est 16 500 km par an, en métropole, c'est 12 000 km. C’est 40% de plus, ça génère aussi un vieillissement prononcé des véhicules."

Bertrand Joyau, le directeur général de la Société Guadeloupéenne de Distribution Moderne (SGDM), une filiale du groupe GBH, se félicite que, malgré les contraintes nombreuses, l’écart de prix entre l’Hexagone et les Outre-mer ne soit "que" de 20% en moyenne pour une pièce détachée et de 10% pour une voiture. Un chiffre que remet en cause le sénateur de Guadeloupe Dominique Théophile, qui pense que "c’est plus que ça" citant un écart "de 30% pour certaines marques".

Si les Ultramarins payent plus cher quand ils achètent une voiture, à la pompe, ils payent autant voire moins que leurs compatriotes de l’Hexagone. Depuis le décret Lurel de 2013, le prix des carburants en Outre-mer est règlementé et fixé par l’État. Les prix sont modifiés une fois par mois par les préfectures de chaque territoire.