"Mois sans tabac" : leur combat pour arrêter de fumer

En Guyane, comme ailleurs, les dégâts provoqués par la consommation de tabac sur la santé sont considérables. C’est la raison pour laquelle le Ministère de la Santé et l’Assurance Maladie ont mis en place le "mois sans tabac" en novembre. Voici le parcours de deux Guyanais qui essayent d'arrêter.

48% de Guyanais ont déjà essayé de fumer au cours de leur vie, selon les chiffres de l’Agence Régionale de Santé. 12% finissent par consommer du tabac quotidiennement. 16% sont des hommes et 8% sont des femmes. Dans notre département, la consommation de tabac est souvent associée à d'autres produits psychoactifs comme le cannabis. Le paquet de cigarette est deux fois moins cher qu’en Hexagone et facilement accessible. Les dégâts sanitaires provoqués par la consommation du tabac sont considérables. C’est la raison pour laquelle le Ministère de la Solidarité et de la Santé et l’Assurance Maladie ont mis en place le "mois sans tabac" du 1er au 30 novembre.

Le mois sans tabac, c’est quoi ?

Ce dispositif gratuit est une main tendue aux 57% de fumeurs qui souhaitent arrêter. Pour y participer, il suffit de s’inscrire sur le site mois-sans-tabac.tabac-info-service.fr. Les inscrits (plus de 101300 personnes à ce jour) bénéficient de plusieurs outils d’accompagnement dont une consultation avec un professionnel de l’arrêt du tabac, des divertissements pour ne pas craquer, la possibilité de rejoindre une communauté d’entraide et un kit d’aide à l’arrêt.

Ce kit, disponible dans les pharmacies de Guyane, contient :

  • un programme de 40 jours avec des défis et conseils quotidiens pour accompagner dans l’arrêt de la cigarette,
  • une roue pour calculer les économies,
  • des informations sur tous les outils d’aide disponibles 
  • des précisions pour bénéficier d’un entretien offert avec un professionnel de santé ou un tabacologue.

"Je ne veux pas que ma fille devienne fumeuse passive"

Yann a 25 ans, sa dernière cigarette remonte à deux jours. Depuis un an, il essaye d’arrêter de fumer. C’est sa 3ème tentative depuis 2015, date à laquelle il a commencé les cigarettes. C’est aussi la période durant laquelle il a quitté la Guyane vers l’Hexagone et connu le froid hivernal, la déprime et des moments difficiles. Selon lui, tous ces événements ont contribué à faire de lui un fumeur. Avant qu’il ne tente d’arrêter, il fumait un paquet de cigarette tous les trois jours. Aujourd’hui, il essaye de se limiter à un paquet par mois. Il n’a pas vraiment de méthode et ne s’est dirigé vers aucune alternative telle que le patch ou la cigarette électronique.

Depuis 1 an, Yann essaye d'arrêter de fumer.

Il ne compte pas non plus sur les aides proposées par l’Etat, même s’il sait qu’elles existent. S’il veut arrêter aujourd’hui, c’est pour sa fille âgée d’un an. "Je ne veux pas qu’elle soit fumeuse passive", confie-t-il. Le tabagisme passif est le fait d’inhaler, de façon involontaire, la fumée dégagée par un ou plusieurs fumeurs. C’est un risque pour la santé auquel un million de Français sont exposés. Le tabagisme passif provoquerait 3 000 à 5 000 morts par an.

Depuis qu’il a diminué sa consommation de tabac, Yann remarque des effets positifs sur sa santé : "Je respire mieux, je suis moins essoufflé et je me sens mieux en général mais aussi moins frustré". Il poursuit : "Mon corps s’habitue (à la diminution de consommation, ndlr). Maintenant, la cigarette commence à me dégouter." Il peut aussi compter sur le soutien de ses proches : "ils me donnent des défis pour m’aider. Par exemple, là, je dois essayer de ne rien fumer jusqu’à Noël." Il pourra, d'ici là, économiser puisque ses paquets de cigarettes lui côutent 9,80 euros.

"Un jour, j’ai voulu tester"

Christila a commencé à fumer à 14 ans. "Mon défunt oncle était fumeur et en situation de handicap, il avait un bras amputé. Parfois, quand j’étais chez lui, il me demandait d’allumer ses clopes pour lui. Un jour, j’ai voulu tester", raconte la femme de 37 ans. Après avoir essayé une première fois, Christila est devenue fumeuse occasionnelle malgré son jeune âge et son asthme. A 18 ans, elle est partie en Hexagone et sa consommation de cigarette a augmenté, elle est devenue fumeuse quotidienne. "Je suis passée à un paquet par jour environ et ça augmentait pendant l’hiver", raconte-t-elle.

Depuis, elle est rentrée en Guyane et eu a des enfants, dont un âgé de 14 ans. "Ma plus grande crainte est qu’il s’y mette lui-même", avoue-t-elle. Ses enfants et son conjoint la soutiennent dans sa démarche. Pour Christila, c’est avant tout un exercice psychologique. "Je me fais violence et je ne m’aide d’aucun dispositif", explique-t-elle. Pourtant, elle connaît les dispositifs tels que le mois sans tabac ou le kit d’arrêt du tabac : "Je suis assistante médico-sociale donc je connais tout ça mais c’est un choix".

Cigarette fumante.

223 euros de cigarettes par mois

Elle entend bien se prouver qu’elle est capable d'arrêter. "J’ai déjà réussi à arrêter de fumer. Pendant mes grossesses, avec la crainte de transmettre quelque chose à mes enfants, j’ai arrêté sans me poser de question", se rappelle Christila. Désormais, elle compte sur sa force mentale, même si c’est parfois difficile : "on n’a pas besoin de grand-chose pour replonger, du stress ou un petit cocktail et c’est reparti". Lorsqu’elle est au travail, elle évite de sortir pendant que ses collègues sont en "pause cigarette".

La dernière fois qu'elle a essayé d'arrêter, elle avait pris 6 kg en un mois. Pour compenser le manque de tabac, elle grignotait beaucoup. Elle a donc repris le sport, c’est là qu’elle a décidé d’arrêter la cigarette pour la seconde fois. "J’ai senti, au niveau du cardio, que c’était difficile", indique Christila. C’est pourtant une habituée, elle a pratiqué le handball pendant des années. La santé n’est pas le seul déclic qu’elle a eu. La marque de cigarettes qu’elle fume coûte 7,20 euros. En achetant un paquet de cigarette par jour, elle dépensait 223 euros par mois en cigarettes. 

« Je me dis qu’avec cet argent je peux acheter un nouveau vélo pour mes enfants, faires des courses, etc. » 

                       Christila

Un autre élément inattendu l’a beaucoup aidé : le confinement. "C’était difficile de trouver des commerces ouverts le dimanche pour acheter des cigarettes. Au début je demandais aux autres s’ils en avaient, puis j’ai arrêté", confie-t-elle. Désormais, elle essaie de ne plus en acheter. En ce moment, elle suit une formation pour devenir coach de vie et les cours l'aident. "Il faut une expérience pour aider les autres donc j’en fais mon expérience", a-t-elle décidé. Comme Yann, elle a remarqué des changements depuis qu’elle essaie d’arrêter le tabac : "J’étais sur les nerfs au départ, alors que je suis quelqu’un de pacifique." Elle a donc pris une décision : "J’ai demandé à mes proches de me dire s’il y avait des changements. Je ne veux pas que la cigarette devienne une partie de moi."

Les aides disponibles en Guyane : 
  • Unité de tabacologie du centre hospitalier de Cayenne : avenue des Flamboyants. Tél : 0594 39 53 56
  • CSAPA du centre hospitalier de Cayenne : 76 rue Justin Catayée. Tél. : 05 94 35 13 80
  • CSAPA de l’AKATIJ à Kourou : 4 rue des Artisans.Tél. : 0594 32 1079
  • CSAPA de l’AKATIJ à Saint-Laurent du Maroni : 1 impasse Marguerite. Tél. : 0594 27 94 72

Depuis 2018, l'Assurance maladie rembourse les substituts nicotiniques (patch, gomme à mâcher, pastille, inhaleur) à hauteur de 150€ par an.