PORTRAIT. Médéric Chauveau, nouveau pharmacien à Grand-Santi : "Je suis content d'enfin poser mes valises"

Médéric Chauveau et sa conjointe, Gwladys Forsans, devant la nouvelle pharmacie de Grand-Santi.
Rien a priori ne poussait Médéric Chauveau à s'installer à Grand-Santi. Ce trentenaire, originaire de Paris, ouvrira la première officine de la commune le 2 avril prochain. C'est en 2021 qu'il découvre la Guyane et ses habitants. Une rencontre qu'il l'amènera jusqu'aux rives du Maroni, où il a décidé de s'installer, en famille.

De Paris à Grand-Santi. Quelle est la motivation qui pousse un jeune pharmacien, originaire de la capitale, à s’installer dans l’intérieur guyanais ? Mardi 2 avril, Médéric Chauveau, ouvrira la pharmacie Wacapou, la première de Grand-Santi. Elle a été inaugurée ce samedi avec le maire Félix Dada, une représentante de l’ARS et un représentant de Société pharmaceutique guyanaise (SPG). Un changement majeur pour les habitants, qui devaient se rendre à Maripasoula ou au dispensaire pour obtenir des médicaments.

« Cela a pris du temps, maintenant on a enfin une pharmacie ! C’est une excellente nouvelle et il faut continuer à travailler pour ouvrir d’autres services de santé », se félicite Félix Dada, rencontré lors de l’inauguration. Une bonne nouvelle qui est d’autant plus surprenante au regard du parcours du propriétaire de cette pharmacie.

Né en banlieue parisienne, rien ne liait a priori Médéric Chauveau aux paysages amazoniens du Maroni. Ce pharmacien, âgé aujourd’hui de 32 ans, a grandi principalement en Seine-et-Marne, banlieue tranquille de l’est parisien. Une expérience, peut-être, lui a donné le goût du voyage. En 2002, ses parents, alors fonctionnaire et directrice de Chambre d’agriculture, l’embarquent en Nouvelle-Calédonie, où ils vivront quatre ans.

Première expérience à Maripasoula

De retour dans l’Hexagone, Médéric Chauveau obtient son bac scientifique puis se lance dans des études de pharmacie, qu’il réussit brillamment. En 2019, son diplôme de pharmacie en poche, il travaille pendant deux ans sur sa thèse, qu’il valide avec les félicitations du jury. Après plusieurs remplacements, il suit sa conjointe, qui a obtenu un stage à l’Institut Pasteur de Cayenne, pendant six mois. Le jeune professionnel travaille alors cinq mois sur le littoral guyanais.

Lors ce bref séjour, ils partent en vacances à Maripasoula et découvrent la pharmacie Kangkangtii. « Cela m’a étonné de trouver une pharmacie là-bas, dans cette espèce de bloc de béton », se souvient-il, en référence au bâtiment vert tenu depuis six ans par Christophe Martinez, le long du Maroni. Ce dernier lui propose alors de le remplacer pendant un mois, mission qu’il accepte volontiers.

Il découvre alors une tout autre réalité que celle du littoral. « Cela me plaisait beaucoup, plus que sur le littoral ou à Paris. Nous faisons un travail de première ligne sur les pathologies. Les gens ont un réel besoin de conseil et le rapport avec eux est différent. Ce ne sont pas des clients mais réellement des patients », appuie-t-il.

S’installer à Grand-Santi ?

L’idée germe alors d’ouvrir son officine à Grand-Santi, où les près de 10 000 habitants représentent un bassin de population suffisant pour constituer une patientèle. « Sans l’expérience avec Christophe Martinez, je n’aurais jamais pensé à m’installer ici. Je n’avais pas particulièrement en tête de m’installer en Guyane, ni dans une commune isolée », relate-t-il.

Reste à convaincre sa conjointe, au départ peu emballée à l’idée. « Aujourd’hui, elle est chercheuse en toxicologie environnementale donc finalement cela s’est pas trop mal déroulé. D’autant que c’est un domaine qui a du sens ici, car de nombreuses populations sont impactées par la pollution au mercure et au plomb ».

Quant à lui, il verra un an et demi à voir aboutir son projet, à cause des lenteurs administratives. Un travail de patience qui amène à 2024, où de nouvelles perspectives attendent le couple. Ensemble depuis 2017, ils attendent un enfant, un petit garçon qui naîtra mi-mars, il y a seulement deux semaines. S’ensuivent la préparation et l’inauguration de la pharmacie. Des bouleversements qui comblent le jeune papa. « Je cherchais à construire quelque chose de stable. J’ai beaucoup bougé pour mon travail, maintenant je suis content de me poser. J’ai même un chien ! », plaisante-t-il.

La pharmacie ouvrira le 2 avril. Les médicaments devraient être livrés toutes les deux semaines.

La réalité du fleuve

Pourtant, ce professionnel n’est pas dupe sur les conditions de vie dans les communes isolées. Le pharmacien s’entoure de proches, médecins, professeurs, et locaux qu’ils voient tous les dimanches à la messe. Mais ce sont les conditions d’exercice de son travail qui sont le plus handicapantes. « Ici, nous ne sommes pas sûrs d’être livrés à temps. S’il y a une grève dans la compagnie aérienne, nous n’avons aucune visibilité car il n’y a pas d’obligation minimale ! C’est inimaginable dans d’autres communes françaises », déplore-t-il.

Une situation qu’il espère voir évoluer à l’avenir. D’autant qu’il s’imagine bien rester longtemps sur les terres du Maroni. « J’espère que mon installation pourra inciter d’autres professions libérales à ouvrir ici. Grand-Santi a beaucoup d’atouts, y compris touristiques ! C’est dommage qu’il n’y ait pas plus de voyageurs. S’il faut, vous pouvez appeler le pharmacien, j’aurais des endroits à conseiller ! ».