Yakapin et Aïku Alemin sont partis depuis fin Juillet d' Antecume- Pata avec leurs 2 filles et 2 de leurs cousines du haut Maroni, en pirogue jusqu’à Saint-Laurent.11 heures de bateau puis la route en covoiturage, avec encore prés de 3 heures de voyage pour rejoindre Cayenne. La famille est venue accompagner ses filles et leurs cousines pour leur rentrée des classes à Cayenne. Aïku Alemin, le père de la famiile, agent de santé dans son village à Antecume-Pata, avait prévu le budget mais les dépenses pour le voyage ont dépassé ses prévisions.
J’ai gaspillé 1500 Euros, juste pour le transport fluvial et la voiture, mais je voulais avoir l’expérience de toutes ces démarches à faire pour la rentrée et je n’étais pas sûr que la Collectivité Territoriale allait pouvoir avoir des places pour nous les parents et nos enfants. Les avions, il n’y avait pas de place et je savais aussi que pour les familles d’accueil et les démarches à faire, c’est compliqué. D’ailleurs, c’est la rentrée et ce n’est toujours pas terminé.
Au-delà de l’investissement financier, la rentrée des classes est un moment difficile pour la famille.
2 filles de la famille, toutes 2 lycéennes, vont vivre leur année de scolarité dans une famille d’accueil.
Une nouvelle vie loin des traditions amérindiennes Wayana qui suscite beaucoup d’interrogations pour la famille.
Pour moi, c’est le stress de laisser les enfants dans une famille d’accueil ou à l’internat. Très souvent, on se dit est : est-ce que ça se passe bien ? Est ce qu’ils mangent tous les jours ? Est-ce que la famille d’accueil est une bonne personne ? Je me pose ces questions.
Lorie a 18 ans et rentre en terminale au lycée Balata de Matoury. Quitter ses parents et vivre en famille d’accueil est un moment qu’elle appréhende.
Mes parents, ils comptent pour moi et ils font tout pour nous. C’est difficile pour eux et pour moi aussi. Je ne suis jamais allée dans une famille d’accueil et je me pose des questions sur elle et j’espère aussi ne pas la décevoir.
Les jeunes amérindiens quittent leurs foyers, leurs villages et plongent dans un nouveau monde avec de nouveaux codes.
Les premières années d’études à Cayenne restent pour beaucoup de jeunes Wayanas un mauvais souvenir.
J’ai eu des difficultés avec ma famille d’accueil ma 1ere année et la 2ieme année aussi. C’était très difficile aussi avec mes parents car mon père ne me croyait pas et ma mère, elle me comprenait mais finalement, il a pris conscience que j’avais raison.
Malgré toutes ces difficultes, l’école reste une priorité pour beaucoup de familles amérindiennes des communes du haut Maroni.
Le père de cette famille est agent de sante à Antecume Pata. Il avait un rêve : devenir avocat. Il veut aujourd’hui que ses filles puissent aller au bout de leurs ambitions.
Moi, quand j’allais à l’école, je n’avais rien ! Aucun papier ! J’ai arrêté en 3ième et j’ai dû m’inscrire au CNED pour faire ma formation et devenir agent de santé Ce n’était pas mon objectif. Je voulais devenir un avocat. L’école, pour nos enfants, c’est très important.
Il ne faut pas que l’histoire se répète, qu’ils suivent mon histoire. Ils ont besoin de leurs propres initiations. Il ne faut pas aller à l’école juste pour décorer la classe. Il faut y aller pour travailler et réussir. Il faut qu’un jour, on se dise, on n’a pas fait pas fait ça pour rien. Il y a quelqu’un dans la famille qui a réussi son bac ou son diplôme
Encore très peu de jeunes amérindiens des villages éloignés de Guyane poursuivent leurs études à l’issue du collège ou des premières années lycée.
Un abandon lié souvent aux difficultés financières des familles mais aussi à une immersion parfois douloureuse dans un autre monde très éloigné de la culture Wayana.