Georgetown, capitale du Guyana, pays de 800 000 habitants, au nord-est de l’Amérique du Sud : c’est ici, le 15 novembre, que le président et le secrétaire du comité régional des pêches de Guyane sont venus alerter leurs partenaires des pays voisins sur la pêche illégale. "Aujourd’hui, c’est un moment historique, non seulement par rapport au déplacement mais aussi par rapport aux attentes que nous avons envers ces échanges", explique Léonard Raghnauth, président du Comité Régional des Pêches de la Guyane. "La méthode, c’est de faire comprendre à ces pays les conséquences de la pêche pirate sur nos territoires", ajoute le chef de file des pêcheurs guyanais.
La réunion se déroule au ministère de l’agriculture. Dans la salle, des responsables des pêches et du contrôle maritime du Guyana et du Surinam… Premier constat : La surpêche menace le renouvellement des stocks de poissons… C’est ce qui ressort d’une étude menée en 2018 au Surinam et au Guyana sur cinq espèces, dont l’acoupa, par Tomas Willems, chercheur au département Pêche du Ministère de l’agriculture du Surinam : "Les chiffres montrent que la capacité de reproduction de ces stocks de poissons est très basse, surtout en raison de la surpêche de ces espèces", indique le chercheur. "Le principal conseil de gestion serait de réduire l’effort de pêche : moins de bateaux et moins de pression sur les stocks", conclut Tomas Willems.
Comment expliquer la surpêche ? D’abord par l’importance des flottes exceptée en Guyane, qui compte seulement 82 bateaux actifs en pêche côtière, environ 600 de ce type au Guyana, et 500 au Surinam. Ce dernier pays tente désormais de limiter la production : "En 2019, nous avons fixé un tonnage maximum pour chaque espèce pêchée", explique Zojindra ARJUNE, directeur adjoint du département pêche au ministère de l’agriculture du Surinam. "Nous ne donnons plus de nouvelle licence, et nous essayons de réduire le tonnage maximum autant que possible : par exemple, si quelqu’un quitte la pêche, on ne donne pas de nouvelles licences à quelqu’un d’autre", conclut-il.
Autre raison de la surpêche : les bateaux illégaux. Au Guyana, 40° % de la flotte côtière est sans licence, selon le département des pêches. Au Surinam, on compte 20 % d’illégaux, qui s’ajoutent aux 500 bateaux autorisés, estime l’administration. "De nombreux bateaux sont des "bateaux fantômes, ils copient des licences de pêche existantes, une partie vient du Guyana, une autre du Surinam, ils pêchent sans immatriculation, avec des licences copiées", indique Zojindra ARJUNE. "Certains vont en Guyane française, le problème a pris de l’ampleur… Ce n’est pas seulement un problème chez vous, mais aussi au Surinam", conclue le directeur adjoint du département Pêche du Surinam. Des "bateaux fantômes" venus du Surinam ou du Guyana signalés régulièrement en Guyane (voir photo prise par le WWF au large de Kourou début 2022) Le président du Comité Régional des pêches de la Guyane évoque une flotte clandestine étrangère au moins trois fois plus nombreuse que la flotte guyanaise qui là aussi menace le renouvellement de la ressource. "On a pu constater depuis quelque temps une baisse de la production locale de poissons en Guyane", s’inquiète Léonard Raghnauth. "Le constat est plus flagrant au Surinam et au Guyana, d’où l’importance d’une gestion durable de la ressource sur le plateau des Guyanes", ajoute-t-il.
Le WWF organise et finance ces réunions au nom de la protection de la biodiversité, notamment des tortues marines. Le Guyana est au cœur de la problématique : 15 000 personnes vivent de la pêche dans ce pays, et dans la région, y compris dans l’ouest de la Guyane française, la plupart des pêcheurs viennent du Guyana.
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