Petite enfance : Frédérique Garré ou l'entreprenariat à taille humaine

Frédérique Garré, cheffe d'entreprise
Depuis un an Frédérique Garré avec sa société a ouvert une crèche de 20 places à Montjoly et et prévoit la mise en route d'un second établissement en 2022 à Rémire. Entreprendre témoigne la jeune femme n'est pas chose aisée, même dans ce secteur de la petite enfance où la demande est très forte.

Le 18 novembre la crèche "A petits pas" va fêter sa première année de fonctionnement. Pour la Guyanaise, Frédérique Garré qui a monté une SAS (Société par Actions Simplifiées) dont l'objet est de créer et gérer des structures d'accueil, cette première aventure s'avère plutôt positive après bien des péripéties.

Située à l'entrée de Montjoly, la crèche "A petits pas" accueille en moyenne 23 enfants tous les jours. Mais 30 enfants sont inscrits car il faut compter avec la moyenne de 5 à 6 enfants malades au quotidien. C'est une équipe de 10 personnes (dont deux apprenties une semaine sur trois) qui encadrent ces tous petits. En effet dans cet établissement l'amplitude horaire est de 10h30. Il y a 3 équipes, une le matin, une du milieu et une de l'après-midi.  

Un projet pas simple à mener

Frédérique Garré a accepté d'évoquer son parcours parce qu'elle veut encourager d'autres jeunes à suivre son exemple et à se lancer dans le domaine de la petite enfance où la demande est très forte.

Le secteur de la petite enfance est très soutenu par la Caisse des Allocations Familiales et les communes, mais les bailleurs sociaux, quant à eux, estime la jeune femme, se montrent frileux sur ce type de projet. Cela a découragé des associations ou des privés qui souhaitaient monter des projets similaires. Trop de complications administratives ou immobilières qui semblent insurmontables. 
La plus grosse des difficultés pour la gérante a, donc, été de trouver un local. Dans les programmes immobiliers qui se montent et se réalisent partout en Guyane et notamment à Rémire-Montjoly, les locaux pour ce genre d'activité ne sont pas prévus. Hors, ils doivent répondre à des normes spécifiques pour les enfants. 
Au bout de nombreuses recherches, Frédérique a pu compter sur un bailleur privé qui s'est montré patient jusqu'à l'aboutissement du dossier administratif et financier pour toucher ses premiers loyers. A cela se sont ajoutées, les transformations nécessaires pour mettre le local aux normes d'une crèche.

S'agissant de l'accompagnement financier sur son projet, Frédérique Garré déplore le manque d'implication des banques en Guyane :

"... même si le secteur est porteur, les banques se montrent très frileuses. Certes, il s'agissait d'une première activité mais on me demandait des garanties assez impressionnantes pour ce projet. Pourtant, il y avait le soutien de la CAF, de la CTG pour l'investissement, de la mairie pour l'investissement et le fonctionnement.  Je n'ai rien obtenu. J'ai mis des fonds propres et j'ai eu le soutien d'un constructeur qui  accepté d'attendre et de prendre le risque avec moi."


Autre étape à franchir : la mise en place d'une équipe qualifiée et motivée. Frédérique Garré rappelle que dans le secteur de la petite enfance, il existe une responsabilité pénale et elle s'est rendue compte : "... qu'il y avait beaucoup de personnes qui n'étaient pas conscientes des conséquences de leurs actes ou de leur inaction... Toutes ces personnes recrutées sont titulaires d'un CAP Petite enfance où d'un certificat d'assistante maternelle. Nous avons des auxiliaires de puériculture, la directrice est infirmière puéricultrice. Mais il a fallu renouveller l'équipe pour moitié entre novembre et le mois de mai"

Mais au fur et à mesure, l'équipe a pris ses marques et la direction a finalement misé sur un accompagnement et la formation en continu par le biais notamment de l'apprentissage. 
Le secteur de la petite enfance est très encadré sur le plan légistatif. Il y a de fortes contraintes sécuritaires à observer, il faut en avoir conscience.

"Mettre l'humain au centre de ce que je fais c'est quelque chose qui me porte"

Frédérique Garré se sent largement rétribuée de ses efforts par l'ambiance qui règne dans la structure. Les enfants accueillis sont âgés de 1 an à 3 ans. A la rentrée, ils étaient très contents de retrouver leur crèche. Finalement souligne t-elle : "Je suis très heureuse de dire que dans mon équipe il y a très peu d'absentéisme. On s'améliore en continu, il y a des projets. Chaque situation surmontée est une leçon dont on profite. Toujours se dire que l'on a vraiment à apprendre des enfants et des adultes qui les encadrent. Il y a un échange continu pour que l'enfant soit bien et le parent rassuré en le récupérant ."

Cette cheffe d'entreprise qui assure la gestion de sa structure, des ressources humaines, des partenariats reconnait être bien accompagnée par les services municipaux, la CAF qui continuent de la suivre sur d'autres projets. Autre partenaire incontournable la PMI (Service de la Protection maternelle et infantile) qui s'assure de la régularité du fonctionnement. 
Le deuxième projet est donc sur les rails. Il s'agit d'une crèche pour les enfants de 3 mois à 36 mois, de 23 places. Elle devrait ouvrir ses portes courant 2022. Un troisième établissement est prévu dans la foulée pour accueillir des bébés :

 "L'idée c'est d'accueillir sur un même projet des nourrissons jusqu'à ce qu'ils rentrent à l'école. C'est un suivi sur 3 ans. Cela devrait mieux se passer. Je travaille maintenant avec la Simko qui me met un local à disposition dans l'éco quartier de Rémire pour la seconde crèche. Il n'a pas été pensé au départ, il faut y faire des aménagements..."  


La cheffe d'entreprise ne souhaite pas créer de grosses structures.  :" ... j'aime bien que les choses restent à taille humaine. 60 enfants, je trouve que c'est lourd pour une équipe... Pour le bien-être des enfants, de l'équipe, de la famille, les petites structures cela est quand même mieux ... Mettre l'humain au centre de ce que je fais c'est quelque chose qui me porte."

Dans la réflexion de Frédérique Garré, il y avait deux choix :  la petite enfance ou les Ehpads. Mais entre les deux options, il lui a paru plus joyeux de s'occuper d'enfants car de toutes les façons le secteur des seniors est beaucoup plus lourd à gérer. Il faut prendre en compte l'aspect médical. L'investissement de départ n'est pas le même et se chiffre en millions. 
Dans le financement du budget des crèches, la majeure partie soit 90% est prise en charge par la CAF et la mairie, le reste, 10%, représente la partie versée par les parents.

Actuellement, il existe 9 crèches à Rémire-Montjoly mais selon les projections démographiques, il manque 400 places. Pour cette seule commune, il faudrait au moins que deux projets par an sortent durant 5 ans pour couvrir les besoins.