Sécheresse en Guyane : les communes de l’intérieur inquiètes

Le niveau du Maroni est extrêmement bas
Difficultés pour la circulation des personnes, augmentation des prix à la consommation, craintes pour l’approvisionnement en eau... Le déficit de pluviométrie qui frappe de plein fouet le territoire a des conséquences multiples pour les populations des communes de l’intérieur. Des habitants de Maripasoula donnent leur ressenti.

Dans une vidéo qu’il nous a envoyée, Fernand Bakaman montre le niveau du Maroni. Celui-ci est désespérément bas. Cette situation, conséquence du manque de précipitation à l’échelle de la Guyane, a une résonnance plus forte dans les communes de l’intérieur, comme chez lui, à Maripasoula. « On manque du minimum, s’indigne-t-il. Les prix de l’alimentation, du carburant ont flambé ! Le litre de carburant est passé de 1,50 euro à trois euros, la bouteille de gaz est passée de 45 à 70 euros, le sac de riz de 25 kilos est passé de 25 à 50 euros. Ça devient vraiment insupportable pour nous, population de Maripasoula. »

Cette inflation est directement imputable aux difficultés des pirogues à évoluer sur le Maroni. « De temps à autre, une pirogue arrive, avec des fûts et quelques bricoles, mais nous avons du mal à nous approvisionner parce qu’il n’y a pas, pour le moment de pont aérien pour nous aider. La commune reste enclavée » déplore le Maripasoulien. 

Fernand Bakaman, devant le Maroni

Alertée par l’association des maires, la préfecture a déclenché en début de semaine le plan Orsec Eau (Organisation de la réponse de sécurité civile, ndlr). Pour l’Etat, il s’agit ainsi de coordonner les réponses à apporter aux différentes parties concernées et garantir la sécurité des populations tant sur le plan sanitaire que sur l'approvisionnement en produits de première nécessité.

Désormais, des cellules de crises quotidiennes sont organisées par le Centre opérationnel de zone, qui coordonne les actions menées par les différents services de l’Etat.

Alors que l’approvisionnement par le fleuve est compliqué, le manque de place dans les avions se fait aussi sentir. « Avec Air Guyane (Guyane Express Fly), le fret prend désormais un mois à arriver », regrette Mimise Agouinti, habitante de Maripasoula.

"Eviter une rupture d'approvisionnement"

Pour tenter de résoudre ce problème, jeudi, en sortant de la cellule de crise, Thibault Lechat-Vega, troisième vice-président de la CTG a présenté certaines des pistes proposées par la collectivité. « Dès la semaine prochaine, un avion cargo assurera l’approvisionnement des communes impactées. Nous sommes aussi en train de voir avec les services et les différents partenaires si nous pouvons avoir un avion ATR tout cargo en renfort, si jamais la crise devait durer pour éviter qu’il n’y ait une rupture d’approvisionnement. » Toujours dans les airs, les Forces armées de Guyane se tiennent prêtes à mobiliser leur Casa en cas de nécessité.

A très courte échelle, se pose aussi la question de la scolarité. Alors que les vacances de la Toussaint s’achèvent, les élèves et leurs enseignants doivent rejoindre les établissements scolaires. « Avec la Collectivité territoriale de Guyane et le rectorat, indique le préfet, Antoine Poussier, nous sommes en train de réfléchir à un système pour assurer la continuité pédagogique. » Outre cet éventuel outil de télé-enseignement, une priorisation pour les enseignants sera faite sur les vols depuis le littoral.

Antoine Poussier, préfet de Guyane

Autre sujet d’inquiétude : l’énergie. Les centrales de Maripasoula et Papaïchton ont chacune besoin de 8 tonnes de carburant par jour. Là aussi la préfecture s’est montrée rassurante après ses échanges avec EDF.

Hormis la flambée des prix, le maire de Maripasoula, Serge Anneli, reconnaît que le bourg de sa commune n’est impacté par certaines difficultés que connaissent les villages éloignés. L’édile pense notamment à l’approvisionnement en eau potable. « Les forages établis sont asséchés. » S’il est conscient que certaines mesures doivent arriver urgemment, Serge Anneli voit déjà plus loin afin de réduire la dépendance de ses administrés aux niveaux des nappes phréatiques. « Il nous faut travailler avec la SGDE de nouveaux dispositifs de captation, peut-être directement dans le fleuve. Mais un tel système, pour un village comme Taluen, c’est au moins 400 000 euros. »