Semaines d'information sur la santé mentale : comment se portent les jeunes de Guyane ?

Des jeunes à Kourou
Les semaines d'information sur la santé mentale prennent fin ce 23 octobre 2022. Les récentes études nationales montrent que les deux dernières années, marquées par la crise sanitaire liée au Covid-19, ont eu un impact négatif sur le mental de la population, et en particulier des jeunes. Alors, comment se portent nos jeunes Guyanais ?

Les jeunes sont les plus vulnérables au regard de la santé mentale. C'est ce que révèle une étude menée en 2021 sur les six communes de la Communauté d’Agglomération du Centre littoral (à consulter ici). 900 personnes ont participé à cette étude. Parmi les jeunes de 18 - 29 ans, 48,7 % présentent au moins un trouble psychique (hors risque suicidaire et insomnie). 

Les troubles anxieux et de l'humeur sont plus élevés

Chez les adultes et les jeunes, les troubles les plus fréquents sont ceux liés à l'anxiété (24,6 %) et ceux de l’humeur (21.2 % et en grande partie les troubles dépressifs). Ils peuvent également se présenter simultanément. Néanmoins, les proportions sont plus élevées chez les jeunes : troubles anxieux (29  %) et les troubles de l’humeur (33,6 %)

A cette période, où les individus peuvent-être particulièrement vulnérables, ils ne sont pas forcément informés sur les ressources disponibles pour leur venir en aide. Les Semaines de l'Information sur la santé mentale sont là pour ça. Des séminaires sur le thème "Jeune et santé mentale" étaient proposés par la CACL du 10 au 18 octobre dernier.

L’adolescence et l’entrée dans la vie adulte constituent une période de la vie sujette à de nombreux changements. C’est une période clé en terme de construction identitaire, de prise d’autonomie et d’arrivée de nouvelles préoccupations susceptibles d’impacter la santé mentale. Certains jeunes sont plus ou moins outillés et accompagnés par leurs proches dans ce passage à la vie d’adulte, d’autres rencontrent des difficultés liées à l’orientation professionnelles ou le suivi d’études supérieures qui peuvent engendrer de l’anxiété.

Johanna PAVIE, coordinatrice du conseil intercommunal en santé mentale

L'environnement et la santé mentale

En 2022, le thème des semaines d'information sur la santé mentale est l'environnement. Et pour cause : "Les difficultés pour accéder à un logement et le conserver peuvent pousser vers la précarité, dégrader la situation sociale, déclencher ou aggraver des souffrances psychiques", rappelle la coordinatrice. Il s'agit de l'environnement immédiat. Il y a aussi l'environnement "plus large".

La manière dont les communes sont aménagées a également un impact. Cela passe, par exemple, par la qualité du réseau de transports en commun. Il permet de rendre accessible les différents services et lieux ressourçants d’une commune. Il y a aussi le développement des mobilités douces comme le vélo, la réduction des nuisances sonores et de la pollution ou encore, l’aménagement d’espaces verts dans la ville.

Johanna PAVIE, coordinatrice du conseil intercommunal en santé mentale

Puis, il y a l'environnement "plus lointain". Là, il est question de la crise climatique. "La prise de conscience des enjeux liés au réchauffement peut affecter la vie quotidienne des personnes qui sont engagées dans la transition écologique.", affirme Johanna Pavie. Peuvent alors apparaître de l’éco-anxiété, du stress post-traumatique ou encore l’aggravation de troubles psychiques déjà présents.

Le phénomène des suicides chez les amérindiens témoignent de l'influence de l'environnement sur la santé mentale. Un rapport de Santé Publique France publié en 2020, indique que "la majorité des cas de suicides sont enregistrés dans les communautés amérindiennes".

Entre 2007 et 2018, les taux de suicide les plus élevés étaient retrouvés sur Trois Sauts, Camopi et Talhuen. Parmi les causes avancées par les auteurs : le manque de perspectives économiques, l’isolement social et géographique, le choc entre des coutumes traditionnelles et un mode de vie globalisé à l’occidentale .

L'aide de l'entourage avant les professionnels

Malgré la vulnérabilité, à laquelle ils sont exposés "les jeunes déclarent privilégier en premier lieu l’aide de leur entourage, avant de s’en référer à un professionnel", explique Johanna Pavie. Et de poursuivre : "il est possible d’y voir une certaine forme de réticence".

En Guyane, jeunes et moins jeunes ont du mal à se tourner vers un psychologue ou un psychiatre. Le tabou qui pèse sur les questions de santé mentale constitue un frein. "Pourtant la plupart des troubles, lorsqu’ils sont pris en compte, ne sont que passagers", dit-elle.

D'autres freins existent et peuvent justifier le moindre recours aux professionnels : "L’identification des professionnels qui peuvent être sollicités", "la connaissance des lieux où ils exercent" et "le coût d’une consultation peut être un facteur rédhibitoire pour les jeunes qui ne disposent pas encore de ressources propres".

Notez, à ce sujet, que depuis mars 2021, jusqu'à décembre 2022, les étudiants peuvent bénéficier de huit consultations gratuites avec un psychologue, sans avance de frais. Il s'agit du dispositif Santé Psy Étudiant.