Les colocations pour seniors : une solution face au vieillissement de la population martiniquaise ?

Une résidence partagée pour senior voit le jour à Rivière-Pilote.
Une nouvelle résidence partagée pour personnes âgées verra le jour en septembre 2023 à Rivière-Pilote. C'est la sixième mise en place par l'association Les ailes des Anges. Une manière de pallier l'isolement des seniors tout en réduisant les coûts de prise en charge dans un contexte de vieillissement de la population martiniquaise.

Vieillir dans le village où l'on a (toujours) vécu, entouré du voisinage et des commerces que l'on affectionne. Vieillir en communauté, aux côtés d'autres personnes âgées, mais dans une vraie maison, dont la couleur des murs ne rappelle pas ceux des hôpitaux.

Intermédiaires entre les EHPAD et l'aide à domicile personnalisé, les résidences partagées pour personnes âgées se développent en Martinique. Inhabitée, une villa de Rivière-Pilote accueillera par exemple neuf personnes au mois de septembre 2023.

C'est le résultat d'une convention tripartite entre le propriétaire des lieux - qui part s'installer dans l'Hexagone, la mairie de Rivière Pilote - garant des lieux - ainsi que l'association Les ailes des anges.

Des maisons vides pour des seniors isolés

L'idée a germé en 2020. À cette époque, Les ailes des anges est une association d'aide à la personne classique. Mais avec la crise sanitaire, l'isolement de ses bénéficiaires devient criant.

Il y avait de plus en plus de seniors seuls car leurs enfants ne voulaient pas ou ne pouvaient pas rentrer de métropole. Parfois, ces personnes habitaient de grandes maisons, dont la surface n'était pas exploitée.

Mickaëlle Ovarbury, directrice de l'association Les ailes des anges

À la famille d'une dame qui vivait seule au Lamentin, l'association a donc soumis l'idée d'une résidence partagée. "Ils ont trouvé ça génial", se souvient Mickaëlle Ovarbury. Passées les démarches administratives, une autre personne âgée a pu emménager dans la colocation. D'après la directrice de l'association, "elle ne se plaisait pas dans l'EHPAD où elle résidait".

Des bénéfices humains et économiques

"Les bénéfices tirés d'une telle structure sont à la fois humains et économiques", poursuit Mickaëlle Ovarbury. Au lieu de se déplacer et faire les courses pour 4,5, voire 6 personnes dans la journée, les efforts des prestataires sont mutualisés au sein de la colocation.

L'aide à domicile en habitat inclusif requiert aussi des compétences particulières. Pour sa capacité à créer de l'emploi et à former du personnel avec un tel projet, l'association a d'ailleurs été lauréate des Trophées SilverEco 2022.

De son côté, le personnel aidant souligne l'intérêt de rester auprès des résidents des heures durant, plutôt que de courir après la montre toute la journée, d'un domicile à l'autre.

"La colocation ouvre les maisons sur le quartier"

Dans une résidence partagée, le personnel est en effet présent 24 heures sur 24. Les résidents ne sont d'ailleurs pas contraints de souscrire aux prestations proposées par l'association. S'ils le souhaitent, ils peuvent décider de garder leur auxiliaire de vie.

Et si la perspective d'une colocation les réjouit, les colocataires devraient avoir tout à y gagner.

Ils partagent leur quotidien et sont chouchoutés par les voisins. Souvent, la colocation ouvre les maisons sur le quartier. Tout le monde veut participer, passer déposer un gâteau, discuter un peu...

Mickaëlle Ovarbury, directrice de l'association Les ailes des anges

Aujourd'hui, l'association n'est plus seule à opérer. Depuis 2020, environ une quinzaine de colocations ont fleuri dans les rues de la Martinique.

2000 à 2 500€ par mois

Une solution d'autant plus pertinente que la population de l'île continue de vieillir. En 2020, une étude de l'INSEE annonçait 40% de Martiniquais de plus de 60 ans à l'horizon 2030. D'après ces prévisions, ce sera deux fois plus que la part des habitants âgés de moins de 20 ans.

Le taux de natalité de la Martinique est aussi le plus faible des territoires d'Outre-mer. Moins grandes, les fratries seront donc dépossédées de moyens pour venir en aide à leurs aînés.

Point positif : les progrès médicaux gériatriques devraient atténuer la hausse des besoins en prise en charge. Toujours d'après l'INSEE, le nombre de personnes dépendantes n'augmentera pas aussi rapidement que celui des personnes âgées.

Les personnes autonomes peuvent d'ailleurs elles aussi accéder à des colocations pour seniors. Reste que ces dernières ont un coût : 2 000 à 2 500 € par mois pour s'offrir une chambre et les services des Ailes des anges.