La victoire du Rassemblement national aux élections européennes de ce dimanche 9 juin a résonné comme un coup de tonnerre. À tel point qu’Emmanuel Macron a annoncé dans une allocution télévisée la dissolution de l’Assemblée nationale. Pour le chef de l’État, les défis auxquels la France est confrontée “exigent la clarté dans nos débats, l'ambition pour le pays et le respect pour chaque Français”.
De nouvelles élections législatives seront donc organisées le 30 juin pour le premier tour et le 7 juillet pour le second. Cette annonce fait bien entendu réagir les politiques calédoniens alors que la Nouvelle-Calédonie subit une violente crise depuis le 13 mai.
Des craintes pour le dossier calédonien, pour Philippe Dunoyer
Avec cette dissolution de l’Assemblée nationale, nos deux députés calédoniens perdent donc leur fauteuil au palais Bourbon.
Philippe Dunoyer, le député de la 1ère circonscription sous l’étiquette Renaissance, n’a pas encore dit officiellement s’il allait se représenter, mais déplore cette nouvelle situation qui s’impose aux Calédoniens. “Les Calédoniens n’ont toujours pas récupéré la sécurité à laquelle ils ont droit, ni les libertés publiques qui leur ont été coupées, et cette dissolution leur impose une nouvelle priorité qui n’est pas la leur et qui est celle d’organiser des élections pour redésigner leurs représentants à l’Assemblée nationale”.
Pour Philippe Dunoyer, le dossier calédonien va subir les conséquences de cette dissolution. Le gouvernement de Gabriel Attal va en effet expédier les affaires courantes d’ici les élections, et le député craint que les mesures très attendues en Nouvelle-Calédonie n’en pâtissent. “Cette période ne permettra probablement pas l’adoption des mesures qui sont très urgentes, très importantes, notamment en termes de redressement économique, de soutien aux acteurs du monde économique, de soutien à notre système de protection sociale et de financement de la Nouvelle-Calédonie”.
Philippe Dunoyer répond à Coralie Cochin et Cédric Michaut
Trop tôt pour se prononcer sur des alliances pour Nicolas Metzdorf
Le député de la deuxième circonscription, Nicolas Metzdorf, qui siégeait lui aussi sur les bancs du groupe Renaissance, a pris acte de la dissolution, même s’il regrette la tenue de nouvelles élections dans le climat actuel en Nouvelle-Calédonie : “Les campagnes électorales participent toujours à exacerber les tensions et en Nouvelle-Calédonie en ce moment on a besoin d’apaisement, on a besoin de sérénité, et donc la campagne va venir mettre un peu plus de tensions entre les partis politiques et donc entre les militants. Donc c’est une mauvaise nouvelle”.
Lors des législatives de 2022, les Loyalistes s’étaient rapprochés de Calédonie ensemble, mais la donne a changé et les Loyalistes se sont plus tournés vers Le Rassemblement. À quoi peut-on s’attendre au niveau alliances pour les législatives ?
Pour le député, les Loyalistes et Calédonie ensemble ne sont plus sur la même longueur d’onde concernant le maintien ou le retrait du texte sur le dégel du corps électoral, mais tout reste ouvert : “C’est vrai qu’on va devoir je pense rebâtir de nouvelles alliances même s’il faut bien évidemment continuer de discuter avec tout le monde. Il est beaucoup trop tôt pour se prononcer. Il faut se donner la semaine pour que chacun puisse discuter avec les uns et les autres”.
Nicolas Metzdorf se dit “inquiet de la position du Rassemblement national sur la Nouvelle-Calédonie puisque Marine Le Pen a changé de pied sur la Nouvelle-Calédonie française puisqu’elle a réclamé un nouveau référendum et qu’elle a dit que le calendrier pour le dégel du corps électoral n’était pas le bon. Donc c’est vrai que si le Rassemblement national venait à avoir une majorité aujourd’hui à l’Assemblée, ça serait un peu plus difficile qu’aujourd’hui. Je crois qu’il serait bien de continuer avec des personnalités politiques et des camps qui défendent la Nouvelle-Calédonie française sans ambiguïté”.
Nicolas Metzdorf est au micro d’Angela Palmiéri et Cédric Michaut
La mobilisation continue, selon Daniel Goa
“Ce n’était pas une surprise” réagit à cette annonce de dissolution Daniel Goa, le président de l’Union calédonienne. Il estime qu’Emmanuel Macron a peu de chance de retrouver une majorité à l’Assemblée nationale.
“Ça nous donne quelques jours pour décider qui sont nos candidats, et ça nous donne quelques semaines pour faire de la campagne électorale. Et nous irons renforcer la représentation qu’on a au Sénat pour porter notre consigne là-bas à l’Assemblée nationale”.
Daniel Goa qui affirme que la mobilisation de la CCAT ne va pas s’arrêter pour autant : “Le président Macron a perdu la main, c’est nous qui avons la main. […] Les mobilisations sur les routes vont rester, les blocages, peut-être qu’on va faciliter la circulation pendant cette période [de campagne électorale], mais ça va s’arrêter là. Tant que le dégel n’est pas tombé, il ne faut pas se faire d’illusions, les choses vont rester sur le bord de la route”.
Daniel Goa au micro de Coralie Cochin
La politique de l’urgence, pour Jean-Pierre Djaïwé
Pour Jean-Pierre Djaïwé, le président du groupe UNI au Congrès, cette dissolution a “de graves conséquences pour nous Calédoniens”, en évoquant un calendrier très restreint pour les dépôts de candidature et la campagne.
“Nous sommes dans la politique de l’urgence, et la politique de l’urgence, elle n’est pas bonne” estime Jean-Pierre Djaïwé, qui évoque aussi cette politique de l’urgence et du passage en force concernant le dégel du corps électoral. “On finit par croire que c’est la marque de fabrique de Macron. Ce n’est pas une bonne chose, et à la fin, c’est l’échec”.
Le chef de l’UNI au Congrès attend de savoir à l’issue de ces nouvelles législatives quelle sera la nouvelle majorité et quel ministre dans le futur gouvernement aura en main le dossier calédonien. “C’est la grande question et la grande préoccupation que nous avons, d’autant plus que si on décide au niveau du FLNKS de présenter des candidatures, on sait pertinemment que les circonscriptions sont taillées sur mesure pour ne pas qu’il y ait des indépendantistes à l’Assemblée nationale. Donc on n’a pas les moyens de faire pression sur quoi que ce soit au niveau de l’Assemblée nationale”.
Pour Jean-Pierre Djaïwé, ces élections ne vont pas favoriser le climat local :“ Après tout ce qu’on a vécu dans le pays, ce dont on a besoin aujourd’hui, c’est de la sérénité. Et partir dans des élections, on sait que ce n’est pas de nature à ramener la sérénité. Encore une fois, on subit la politique Macron”.
Jean-Pierre Djaïwé réagit au micro d'Angela Palmiéri et Gaël Detcheverry
“ Ce sera pour la Calédonie une élection amère”, pour Guy-Olivier Cuénot
La Calédonie a désormais trois semaines pour faire campagne, alors que le calme a encore du mal à revenir dans certains quartiers du Grand Nouméa.
Pour Guy-Olivier Cuenot, délégué territorial du Rassemblement national en Nouvelle-Calédonie, ce moment de démocratie risque d’être amer. “La Calédonie paie le prix fort de la Macronie avec l’état de quasi guerre civile qu’elle subit. L’absence de hauteur de vue, de mesure et d’être à la hauteur de l’événement qui était cette fin de l’Accord de Nouméa, cet “en même temps” jamais assumé, cette précipitation, nous a malheureusement coûté très cher. Ce sera pour la Calédonie une élection amère, dans des conditions qui ne sont pas idéales en termes de démocratie”.
Guy-Olivier Cuénot répond à Lizzie Carboni