Loi fiscale : après son annulation, le flou juridique et économique

De nombreux acteurs économiques ont mis leurs projets en stand by après la suppression de la loi fiscale.
Annulée sur la forme par le Conseil d'Etat le 25 mars, réexaminée dès le lendemain par la commission des Finances à l'Assemblée, prochainement soumise à nouveau au vote, la loi fiscale est au coeur des préoccupations. Tourisme, immobilier, secteur automobile, les allers-retours institutionnels d'un texte jugé irrégulier ne sont pas sans impact. Et inquiètent les acteurs économiques du Pays.

La morosité est générale. Une loi fiscale adoptée, puis annulée puis représentée en l’état. Rien de tel pour décourager les investisseurs. Résultat : des projets de construction ou de rénovation d’hôtels suspendus alors que le secteur touristique reprenait des couleurs en 2023. Sans défiscalisation ou autre exonération d’impôts, les craintes des investisseurs, soucieux du dynamisme économique du Pays, sont bien réelles. "Les investisseurs ont besoin de pérénité, de voir loin, de pouvoir se se projeter. Ils ont également besoin du corollaire à cela, c'est-à-dire de la stabilité. Bien évidemment, ils ont aussi besoin d'un environnement législatif qui soit favorable", explique Thierry Buttau, directeur général de South Pacific Management.

Redressement fiscal

Côté immobilier plus qu’un statu quo, la situation est désastreuse pour les personnes ayant acheté un logement depuis le 15 décembre. Les nouveaux acquérants seront soumis à un redressement par le service de l’enregistrement. "Par exemple un jeune qui a acheté un appartement à 50 millions cfp, le Pays va lui demander un redressement d'1,5 million cfp. Déjà que l'immobilier est cher, que les taux d'intérêt sont hauts, en plus le Pays en rajoute une couche avec un redressement fiscal. C'est dramatique parce que ces gens-là, ces familles polynésiennes n'ont rien demandé, et on subit finalement l'insécurité fiscale", déplore Jean Philippe Pina, président du syndicat des notaires.

Jean-Philippe Pina, président du syndicat des notaires, perplexe après l'annulation de la loi fiscale.

Dans le secteur automobile, si on a écoulé les stocks de voitures propres de 2023, exonérés de droits de douane, le problème se pose pour les véhicules achetés en 2024. Les concessionnaires s’interrogent. Quid des recettes fiscales déjà récoltées ou des exonérations octroyées ?

Inquiétude grandissante

"Le fait que la loi a été annulée, et maintenant va être réintégrée, on se demande à quelle sauce on va être mangé ? On n'a pas vendu que des voitures de 2023, et ceux qui ont payé les taxes en 2024, il va falloir qu'on les rembourse ou pas ? La nouvelle loi qu'ils vont mettre, est-ce qu'elle va être applicable à partir du 1er janvier ? A ce moment on n'aura pas à rembourser les clients", s'interroge Narii Faugerat, concessionnaire automobile.

Alors que la loi doit être à nouveau votée le 11 avril, l’inquiétude ne cesse de grandir dans les secteurs clés de l’économie polynésienne.