Avec 349 voix pour et 186 contre, le projet de loi “pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration” a été définitivement approuvé par le Parlement mardi soir (19 décembre). Après son rejet par les députés la semaine dernière, le projet de loi immigration a finalement été réécrit.
Réunie les lundi 18 et mardi 19 décembre pour l’examen du projet de loi, la Commission mixte paritaire (CMP) est parvenue à un accord sur un texte qui reprend très largement celui voté par le Sénat le 14 novembre 2023. Il en résulte l’adoption d’un texte “significativement durci” par rapport au projet de loi initial du Gouvernement.
La nouvelle mouture de la loi, renforcée par la droite, prévoit notamment de mettre en place de quotas migratoires, de durcir les conditions d’accès au regroupement familial, de resserrer les conditions d’accès aux titres de séjour pour motif familial, de créer de nouveaux cas de refus de délivrance ou de retrait de titre de séjour et d'instaurer des conditions pour bénéficier des prestations sociales non contributives (allocations familiales, aide personnalisée au logement, droit au logement opposable et allocation personnalisée d'autonomie).
"C’est un premier jour sombre pour la France tout entière"
Les députés martiniquais Marcellin Nadeau, Jean-Philippe Nilor et Johnny Hajjar ont tous voté contre. Le député Jiovanny William, membre de la NUPES, n'a pas pris part au vote à l'Assemblée. Au Sénat, Catherine Conconne a voté contre et le Frédéric Buval, qui siège au sein de la majorité présidentielle, s'est abstenu.
J’ai évidemment voté contre en tant qu’humaniste progressiste et même aussi en tant que fils de parents d’origine étrangère. Aujourd’hui on a stigmatisé, on a extremisé, on a créé la discrimination. On a inscrit dans le droit de la France, pays des droits de l’Homme, et c’est vraiment une contradiction, un vrai paradoxe : le racisme et la xénophobie, tout simplement du fait qu’on soit d’origine étrangère.
Johnny Hajjar, député martiniquais du Groupe Socialistes et apparentésInterrogé par Pédro Monnerville
Le parlementaire estime que la "xénophobie s'est inscrite dans le droit français" à travers ce texte.
C’est le Rassemblement National qui sort gagnant, avec ses idées d’extrême droite qui aujourd’hui ont obtenu une majorité au sein de l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, le fait d’opposé des français simplement parce qu’ils seraient d’origines étrangères et non nés sur le territoire français, parce que le droit du sol est remis en cause, crée des oppositions intérieures à la France qui est pourtant par nature une société multiculturelle, humaniste et progressiste. Donc aujourd’hui, cette xénophobie qui s’est inscrite dans le droit français va devenir exacerbée et va créer des tensions majeures. Personne ne sort grandi. C’est un premier jour sombre pour la France tout entière et on en verra les conséquences très rapidement.
Pour le député martiniquais, cette nouvelle loi immigration pourrait changer les relations avec nos voisins de la Caraïbe.
Ce sera de plus en plus difficile d’obtenir un visa. Même si vous venez faire des études, il va falloir payer une caution. Seuls les étudiants qui ont les moyens et qui sont issus de classes sociales favorisées pourront venir faire des études alors que le génie humain existe quel que soit le lieu où il se trouve. (...) Donc la situation risque d'être très grave non seulement économiquement, mais humainement et socialement puisque nous avons besoin de cette richesse pour pouvoir à la fois ne pas nous enfermer sur nous-mêmes. Cette réalité fait que nous ne pourrons pas rayonner, ni nous intégrer dans la Caraïbe facilement à travers cette loi qui va bloquer l’ensemble des frontières même à des personnes qui veulent contribuer à la création de richesses humaines, au développement de l'épanouissement individuel et collectif de la France à travers la Martinique et la Caraïbe.
Dès ce mercredi le président Emmanuel Macron va transmettre le projet de loi immigration au Conseil constitutionnel. La haute juridiction pourrait déclarer certaines dispositions contraires à la Constitution.