Chlordécone : les Antilles doivent "poursuivre les efforts pour diminuer les expositions" (l’ANSES)

Le 28 novembre 2022, l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a publié sur son site, une nouvelle expertise sur les risques liés à l’exposition de la population antillaise à la chlordécone. Dans cette dernière publication, l’Agence confirme que "ces risques peuvent être fortement réduits en respectant l’ensemble des recommandations émises, concernant la consommation de certains aliments issus de circuits informels".

Ce nouvel avis s’inscrit dans la continuité d’un ensemble de travaux sur lesquels l’ANSES se mobilise à propos des enjeux sanitaires et des risques associés à l’exposition au chlordécone aux Antilles.

La chlordécone est un pesticide utilisé entre 1973 et 1993 en Martinique et en Guadeloupe contre le charançon du bananier. Son usage a entraîné une pollution persistante des sols, des eaux de rivières, des sédiments et une contamination de la chaîne alimentaire qui maintiennent un risque d'exposition de la population, notamment via l'alimentation.

Santé publique France

Ce dernier document fait suite à une publication proposant des valeurs sanitaires de référence mises à jour pour la chlordécone (ANSES 2021), à savoir deux Valeurs Toxicologiques de Référence (VTR) : une valeur interne et une valeur externe "pour une exposition chronique".

"Contamination des aliments issus des circuits informels"

Cet avis fournit une nouvelle évaluation des risques sanitaires liés aux expositions des populations antillaises à cette substance (…). S’agissant tout d’abord du socle des données disponibles, l’Anses recommande l’acquisition de nouvelles données de contamination des aliments issus des circuits informels de consommation (…). Les populations résidant en ZC présentent des taux et des niveaux de dépassement plus élevés. Les dépassements sont majoritairement dus à la consommation de certains aliments (tels que les œufs, les poissons, les crustacés et les abats).

L'ANSES

L’ANSES rappelle qu’elle avait déjà formulé en 2007, des recommandations de consommation pour réduire l’exposition alimentaire à la chlordécone dans les deux îles (Guadeloupe et Martinique), portant sur "une limitation de la consommation de certains produits de la pêche en mer et en eau douce, ainsi que de légumes racines provenant des jardins familiaux en ZC (Zone Réputées Contaminées)".

En ZC, les œufs issus de l’autoproduction ou des dons expliquent une part très importante des expositions chez les enfants (supérieure à 50%) et les adultes (entre 40 et 50%). Les crustacés (d’eau douce et de mer) et les poissons contribuent également de façon conséquente à l’exposition des individus dépassant la VTR en zone réputée non contaminée (ZNC) et en ZC. Même si les calculs indiquent pour les produits de la pêche que les circuits informels et formels sont tous deux concernés, il semble difficile de s’assurer qu’ils ne proviennent pas des mêmes sources (artisans pêcheurs).

L’Agence

 "Participer aux programmes jardins familiaux"

L’Agence suggère aussi aux populations élevant des volailles et qui ne l’auraient pas encore fait de "participer aux programmes jardins familiaux JAFA des ARS", lesquels permettent notamment de bénéficier d’analyses de sols gratuites et de conseils pratiques, permettant de réduire la contamination des œufs, et l’exposition associée.

Cette communication complémentaire est rendue publique dans un contexte de mécontentement aux Antilles, à la suite du non-lieu prononcé fin novembre 2022 par le parquet de Paris, concernant ce scandale sanitaire. Plusieurs organisations citoyennes, politiques et syndicales préparent actuellement des manifestations de contestation dans les deux îles.

Rapport de l'ANSES relative aux valeurs sanitaires de référence pour la chlordécone.

Publié le 28 novembre 2022