Coronavirus : au deuxième jour de confinement les Martiniquais se plient difficilement aux règles

la Martinique au deuxième jour de confinement
Dérogations ou pas ? Il y avait encore beaucoup de monde ce mercredi 18 mars 2020 sur les routes, sur les plages et dans les magasins. Mais dans l’ensemble la population s’habitue peu à peu aux nouvelles mesures. C’est le cas déjà pour les obsèques.
Au deuxième jour de confinement général, la circulation ce matin sur les routes de Martinique ressemble ce mercredi 18 mars 2020 à celle d’un dimanche ordinaire. C’est dire si le mot d’ordre "restez chez vous", entré en vigueur la veille à midi, est diversement respecté, sauf si bien sûr toutes ces personnes ont une raison valable de sortir. 

À 11h25, une vingtaine d’automobilistes, venant du rond-point du Vietnam Héroïque, roulent, en tout cas, à bonne vitesse, à la queuleuleu, sur la route de Didier à Fort-de-France. Certains viennent sans doute de faire de l’essence dans l’une des stations-services de la zone ou de faire des courses dans l’un des supermarchés du secteur.

À 11h30, non loin de là, le parking de Carrefour est d’ailleurs bondé, des clients qui s’approvisionnent en produits en tout genre. C’est le cas de Narcisse, un septuagénaire, qui pousse nonchalamment son caddie, rempli de cinq pains, un pack de coca et diverses denrées.
Narcisse est sorti pour effectuer quelques courses

Pourquoi devrais-je me soucier de tout ce qu'il se passe ? Sinon, on ne pourra plus vivre sur la terre. Si quelqu’un prend la vie à cœur il ne peut pas vivre bien. Donc il faut prendre la vie comme ça vient. Nous sommes nés sur la terre et un jour, il faut que nous repartions. Mais quand même il ne faut pas qu’on parte avec le malheur qui arrive maintenant, parce que c’est très dur la maladie qui est là. Mais il ne faut pas prendre ça à cœur

explique sereinement Narcisse.

Le contraste est saisissant avec le parking de Madiana, totalement vide. Pas un véhicule. Pas un passant. Seulement le chant à peine audible de quelques oiseaux.
La barrière du complexe est cadenassée, mais on aperçoit, au loin, sur un panneau 4X3, l’affiche du nouveau film. Ça s’appelle "Sans un bruit 2". Il devait sortir cette semaine en salle.
Place des Arawaks, à Schœlcher
Le silence également, un peu plus loin, sur la place des Arawaks, à Schœlcher. Les promeneurs et les boulistes ont déserté le site.

La bibliothèque de rue installée par le Rotary Club de la ville sur le boulevard Allègre ne fait pas non plus recette, alors que des dizaines de livres sont proposés gratuitement au tout venant.
La porte de l’armoire n’est pourtant pas fermée. Il suffit de l’ouvrir, de se servir et de repartir avec un roman ou un essai pour se nourrir l’esprit pendant les longues heures de confinement. 

Le silence aussi, beaucoup plus loin encore, au cimetière de la Joyau. Les morts restent entre eux, ou presque.
La direction de l’espace funéraire et du crématorium a dû s’adapter aux nouvelles mesures annoncées par le gouvernement.
La grande salle de cérémonie a été mise en veilleuse. L’activité se concentre désormais dans les petits salons de présentation, où avaient lieu jusqu’à la semaine dernière les habituelles veillées.
Virginie Duranton espace funéraire et crématorium de la Joyau

"Nous n’accueillons plus les veillées. Nous n’accueillons plus les cérémonies. Avant la crémation, il est uniquement possible pour les ascendants, descendants et conjoints de se recueillir auprès de leurs défunts au moment de la fermeture du cercueil

souligne la directrice adjointe Virginie Duranton.

À 12h30, contrairement à sa périphérie, Fort-de-France ressemble justement à une ville morte. Devant la cathédrale, fermée, un homme dort sur un banc, recroquevillé sur lui-même. La place Romero est plongée dans le silence, tout comme les rues adjacentes. Pas une âme qui vive, jusqu’à l’arrivée, un quart d’heure plus tard, d’une femme. Elle hâte le pas, visiblement pressée de s’engouffrer dans sa berline.

"Je reviens de chez mon naturopathe et là je me dépêche de rentrer à la maison. C’est un rendez-vous qui était programmé depuis longtemps. Il a accepté de me recevoir, comme d’autres patients nécessiteux. J’avais des douleurs à combattre. Il m’a donné de bons conseils. C’est important pour mon bien-être dans le contexte actuel"

explique Mathilde.

En ce deuxième jour de confinement, entre celles et ceux qui ont une bonne raison de sortir et les autres qui s’exemptent des règles communes, la Martinique a encore des efforts à faire pour que tout le monde retienne la formule et l’applique au quotidien : "Rété a kay zot".