"Quand on devient le jouet du carnaval des autres", c’est le titre de la tribune d’Emmanuel de Reynal, publié sur son blog laissemoitedire.com, qui jette d’abord un regard inquiet sur l’actualité de la Guadeloupe.
Routes barrées, incendies, magasins saccagés, écoles fermées, médecins et touristes insultés…bref, "les fake-news pourrissent ce qu’il nous reste de cerveau. La Guadeloupe se suicide littéralement, et la Martinique s’interroge…" aux yeux de l’auteur.
Tout ça à cause, soi-disant, d’un vaccin.
Celui que les pays du monde entier ont choisi pour lutter contre la pandémie de Covid.
Celui qui, après une légitime période de doute, fait aujourd’hui l’unanimité dans la communauté scientifique mondiale.
Celui que la subversion locale a décidé d’instrumentaliser pour nourrir les peurs, premier carburant du chaos social.
Car "non" enchaine le chef d’entreprise, "le vaccin n’est pas responsable de nos malheurs. Il n’est responsable que des vies qu’il sauve. Point. Pas plus que l’État n’est responsable de nos turpitudes".
L’État que certains traitent d’assassin, est bien celui qui a mis gratuitement à notre disposition des milliers de vaccins et de tests, quand des centaines de pays pleuraient de ne pas en avoir (…), qui a mobilisé la solidarité nationale (…), qui a su tant bien que mal, protéger nos emplois et maintenir notre système de soin malgré un contexte extraordinairement difficile (…).
Bien sûr, on aurait mille choses à reprocher à l’État.
Bien sûr, on pourrait souligner des carences, des manquements et des failles. Surtout quand on refait le film.
"Devenir complice du chaos"
C’est si facile de conspuer ceux qui agissent, tout en restant à l’écart de l’action pour mieux alimenter les peurs légitimes.
C’est si facile de trouver des boucs émissaires en s’exonérant soi-même de toute responsabilité.
Et à force de contester systématiquement toutes les autorités, qu’elles soient politiques, républicaines, économiques, scientifiques ou spirituelles, on finit par devenir complice du chaos.
L’auteur fait aussi observer que "si nous n’avions pas eu accès au vaccin, notre déliquescence sociétale serait tout aussi forte. Car ce ne serait plus le vaccin, mais l’absence de vaccin qui serait prétextée pour soulever l’indignation". Paradoxe ?
"Le chaos et l’indépendance"
Emmanuel de Reynal termine sa tribune en identifiant la situation en Guadeloupe et en Martinique comme "une crise politique déguisée en crise sanitaire". Selon lui, "les destructeurs qui sont à l’œuvre n’ont strictement rien à faire de la santé des Guadeloupéens et des Martiniquais. Ce qu’ils veulent, c’est le chaos et l'indépendance".
Cessons d’être des éléphants involontaires, briseurs de porcelaine sous l’influence hypocrite des destructeurs masqués.
Cessons une bonne fois pour toute de prêter l'oreille à la subversion, d'entretenir le doute systématique et d'être complices malgré nous du suicide collectif.
Cessons d’être le jouet du carnaval des autres !
L’intégralité de cette tribune est à lire ICI►
L’entrepreneur martiniquais est un homme engagé, un publicitaire très investi dans la vie locale, en matière d’environnement notamment. L’ex-président de l’association de socio-professionnels "Contact Entreprise", est aussi membre de "Tous Créoles", dont le but est de "rapprocher les différentes cultures antillaises".
Emmanuel de Reynal a publié son second livre "Recta Linea" paru aux Editions du Panthéon en février 2021, après son premier ouvrage "Ubuntu".
L’autre réflexion qui jette un regard critique sur l’actualité du moment est signée Marie-Laurence Delor. Elle l'a postée le 5 novembre 2021 sur sa page Facebook. "En ces temps obscurs" (le titre) évoque d’abord "l’irruption dans le débat public, grâce aux médias sous pression des réseaux sociaux, de problématiques régressives jusque-là marginales, portées par une nébuleuse Rouge-Vert-Noir" explique la professeure de philo.
La notion de "régression", telle que nous en usons ici, n’est pas réductible à son sens courant d’opposition au "progrès".
Si elle recouvre l’idée d’un retour en arrière, d’une certaine façon proche de la psychologie expérimentale et de la psychanalyse, elle réfère surtout ici à des tendances inquiétantes et à leur banalisation à la faveur du silence des politiques et de la capitulation des intellectuels.
L’auteure assimile l’influence des réseaux sociaux à ce qu’elle appelle la "dictature de la croyance", et elle pointe du doigt les médias publics également.
Le défaut de filtre - résultant d’un affaiblissement de la vigilance critique par rapport aux contenus et d’une évaluation erronée de la représentativité des réseaux sociaux - a contribué largement à créer la confusion entre "savoir" et "croyance" et à renforcer l’emprise de cette dernière : les médias publics n’ont pas toujours été à la hauteur de leur mission d’information (…).
L’expression "dictature de la croyance" renvoie à une situation de violence et de chaos entretenue, de sorte qu’il n’y ait plus de place dans l’espace public pour un savoir informé et raisonné.
L’enseignante remet en lumière des faits récents qui ont provoqué le buzz sur ces réseaux sociaux qu’elle incrimine, comme dit-elle "le saccage hystérique de deux statues de Victor Schoelcher, au motif insensé qu’il était un esclavagiste (…), les inepties virales selon lesquelles le vaccin était la vraie cause de la contagion, et que les médecins européens avaient tué nos anciens et nos jeunes en les débranchant".
Marie-Laurence Delor revient aussi sur la "séquence affligeante" souligne-t-elle, "où 700 soignants syndiqués faisant valoir un "droit de retrait" sous des motifs discutables, pour ensuite dénoncer les dysfonctionnements et la fermeture de certains services".
L’activisme protestataire en contexte de dictature de la croyance s’est transformé en "fabrique" de relations sociales et de travail perverses.
Il n’y a rien dans tout ce tumulte qui ressemble de près ou de loin à la recherche d’un "bien commun" (…).
"Radicalisation de l’intolérance ethnique"
L’intellectuelle fait enfin allusion aux insultes racistes et xénophobes qui se multiplient sur ces mêmes réseaux sociaux.
Les haïtiens sont aujourd’hui particulièrement visés du fait de leur dynamisme entrepreneurial et de leur capacité actuelle d’investissement.
Les cadres "métropolitains", notamment de la fonction publique, le sont aussi depuis longtemps, parce-que perçus comme des concurrents avantagés.
Les uns et les autres sont donc invités à rentrer chez eux hic et nunc (sur-le-champ).
"Un passé surinvesti par la mémoire"
En conclusion, l’ancienne conseillère municipale de l’opposition indépendantiste à la mairie de Fort-de-France, considère que "le défi à relever, c’est celui de la clarté (...), contre l’obscurité dans laquelle certains veulent nous plonger durablement" (…).
L’hypothèse que nous soumettons au débat est que notre rapport à la temporalité est aujourd’hui comme dans l’hexagone, de l’ordre du "présentisme".
Nous entendons ainsi une manière de penser et d’être, où le présent est entravé par un passé surinvesti par la mémoire et où le futur cesse d’être un horizon de possible.
À lire l’intégralité de cette prise de position ICI►