Abstention, vote blanc, vote nul, vote Macron, vote Le Pen. Pour le second tour, les électeurs de Martinique ont le choix entre ces cinq options. Un choix d’autant plus compliqué que les deux finalistes sont minoritaires à l’issue du premier tour de scrutin. Emmanuel Macron a recueilli 16% des voix et Marine Le Pen 13%. Ce qui donne un total de 29% en leur faveur. Autrement dit, 71% des électeurs ont effectué un autre choix. Notamment celui de Jean-Luc Mélenchon, qui emporte la mise avec 53%.
Des chiffres à comparer avec les résultats globaux à l’échelle de la France. Emmanuel Macron obtient 28% des voix et Marine Le Pen 24%. Ce qui donne un total de 51% ayant choisi les deux qualifiés, Jean-Luc Mélenchon étant crédité de 22% des votes.
La tentation de l’abstention ou du bulletin blanc sera d’autant plus forte que les électeurs ont de bonnes raisons de renvoyer dos à dos les deux qualifiés. Emmanuel Macron a subi un revers au premier tour, perdant 9 points par rapport à 2017. Aucun président sortant n’avait connu une telle infortune à ce jour. Valéry Giscard d’Estaing en 1981, François Mitterrand en 1988, Jacques Chirac en 2002 s’en étaient sortis fort honorablement.
Quelles réserves de voix pour les finalistes ?
D’où la question de savoir où se situent les réserves de voix du président sortant. Il a été trop nettement distancé par ses adversaires pour que ceux-ci appellent volontiers à voter pour lui ou à l’aider dans sa campagne. Nous ne sommes pas en 2017, quand il fallait faire barrage à l’extrême droite.
Il n’est pas certain que les consignes de vote données depuis le soir du premier tour par certains états-majors soient suivies par les électeurs. Il est certain que beaucoup auront du mal à voter Macron. Son quinquennat est pavé de renoncements. Il avait juré de réduire l’extrême droite à sa plus simple expression. Or, celle-ci est plus forte que jamais en France, avec plus de 32% des voix récoltées par ses trois candidats. Un record en Europe.
Dans les collectivités d’outre-mer, nous nous rappelons de ses discours de campagne sur la vie chère, la protection contre les pollutions de toutes natures, l’amélioration de la couverture sanitaire et la prise en compte de nos aspirations. Cinq ans plus tard, qu’en est-il de l’égalité réelle ? Ils ne sont pas rares, les électeurs qui se feront violence pour voter Macron.
Ceux qui se résoudront à voter le Pen ne le feront pas nécessairement de gaieté de cœur non plus. Si elle n’a pas de bilan, par définition, elle a un programme. Hormis ses propositions pour l’outre-mer, elle y développe des conceptions situées aux antipodes de notre culture politique et de notre personnalité. Notamment le volet sur l’immigration, qui a de quoi effrayer. Entre deux maux, il faut savoir choisir le moindre. Décidément, un choix cornélien pour la Martinique aussi.