Les violences à l'école défrayent rarement la chronique en Martinique, excepté les plus dramatiques, comme l'incident d'octobre 2015, à la cité scolaire de Trinité. Un individu avait fait irruption dans une salle de classe, pour régler ses comptes avec un élève et l'avait grièvement blessé avec un ustensile de cuisine.
On n'a pas le droit d'aller se plaindre !
Mis à part les cas exceptionnels comme celui-ci, on déplore également un certain nombre d'incidents et d'incivilités dans les établissements scolaires de l'île. Seulement, les langues ont du mal à se délier. Certains enseignants préfèrent se taire, convaincus qu'ils ne sauront pas entendus par leur hiérarchie. Une enseignante confie:
On n' a pas le droit de se plaindre. Si tu signales, on ne t'écoute pas, on ne te croit pas. Cela a toujours été ainsi. Mais avant, on avait moins d 'élèves difficiles. On n'attend pas de nous qu'on se plaigne. On attend de nous qu'on garde les élèves. On n'attend pas de nous qu'on leur enseigne quoi que ce soit. Réussir à se faire respecter constamment, c'est très difficile. Cela demande une énergie redoutable.
Un collègue ajoute :
Lorsqu'on regarde dans la salle, c'est un vrai foutoir. Mais rien de doit sortir de la classe, parce que le professeur doit être perçu comme quelqu'un de rigoureux,sans problème.
C'est une omerta !
Face à la violence scolaire, certains enseignants estiment être livrés à eux-mêmes et dénoncent l'inertie de certains chefs d'établissement qui les incitent à fermer les yeux. Gabriel Jean Marie, le délégué syndical du SMPE-CGTM, précise :
Ce n'est pas tous les chefs d'établissement qui disent de ne pas faire de vague. Mais on demande souvent de gérer en interne. Nous avons de nombreux collègues qui rapportent des situations et veulent bien témoigner. Mais ils revendiquent l'anonymat. C'est une omerta parce qu'il y a des situations où on vous dit :" Pensez à votre carrière."
Retrouvez un extrait sonore de l'entretien que nous a accordé Gabriel Jean-Marie, sur les violences dans les établissements scolaires.
INTERVIEW
Selon les enseignants, la situation n'est pas prête de s'améliorer dans les établissements scolaires. Ils s'inquiètent de la baisse constante des effectifs parmi le personnel enseignant et encadrant.
D'après le SMPE-CGTM, 1 800 postes d'enseignants seront supprimés dans l'enseignement secondaire, l'an prochain au niveau national, avec comme conséquence, des classes d'élèves surchargées, une cause de tensions supplémentaire.
La présence de policiers dans les établissements scolaires difficiles jugée "démagogique et dérisoire"
Avec la réduction du nombre de contrats aidés, des établissements ont perdu des postes de surveillants, précieux pour la résolution des conflits. Des associations ont également disparu. Certaines luttaient contre le décrochage scolaire.
Garantir une école sûre pour un apprentissage serein.
— Jean-Michel Blanquer (@jmblanquer) 31 octobre 2018
Respecter les professeurs et tous les adultes.
Assurer le suivi et la sanction des faits signalés.
Avec tous les recteurs de France pour présenter notre plan d'actions pour la protection de l'École https://t.co/VexxFJLJBY pic.twitter.com/Uiwt3Zvrkw
Dernièrement, le gouvernement a annoncé une série de mesures de sécurité, suite à l'agression filmée d'une enseignante à Créteil, par un élève qui possédait une arme factice. Les Ministres de l'Éducation, de la Justice et de l'intérieur prévoient notamment, la présence de policiers dans les établissements scolaires difficiles.
Visiblement, cette mesure est très mal accueillie par les enseignants. Dans un communiqué, le SMPE- CGTM la qualifie de "démagogique et dérisoire".