Le 2e épisode de samedi Mémoire est consacré à l’affaire dite, des "libres de couleur". Dans la Martinique du début du 19e siècle, cette catégorie d'habitants prend du poids. Les "libres" noirs ou mulâtres sont plus nombreux que les colons et commencent à représenter une menace.
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Affranchis par leurs maîtres, nés libres -issus de liaisons entre esclaves et békés- ou de parents déjà libérés, dans la Martinique du début du 19e, de nombreux noirs et mulâtres sont sortis du système esclavagiste. Ils sont appelés les "gens de couleur libres".
On les estime à environ 11 000 dans les années 1820, ils sont donc plus nombreux que les colons (9 000) et ne veulent plus se contenter des petits métiers de l’artisanat dans lesquels ils sont cantonnés.
En effet, alors que beaucoup accèdent aux études supérieures, la législation coloniale continue à leur interdire de devenir notaires, avocats ou médecins, de se faire appeler Sieur ou Dame, ou de fréquenter certains lieux. Par ailleurs, les lois somptuaires ne les autorisent pas à porter des bijoux en or ou de s’habiller comme les colons.
Revoir notre reportage.
Une discrimination dénoncée jusqu’à Paris, où leur cause est entendue. Une brochure rouge réclamant le changement intitulé "De la situation des gens de couleur libres aux Antilles française" est ainsi rédigée et imprimée en France pour être distribuée dans les colonies. Un texte dans lequel il est question d’égalité avec les blancs, mais qui ne demande surtout pas la fin du système esclavagiste…car les gens de couleur libres sont souvent, eux-mêmes, propriétaires d’esclaves.
C’est le cas de Cyrille Charles Auguste Bissette, un négociant mulâtre de 28 ans, neveu naturel de Joséphine De Beauharnais. Il vient de participer avec les milices de couleur de Fort Royal, à la répression contre les esclaves révoltés du Carbet en octobre et novembre 1823.
Un an plus tard, il se voit donc accusé d’avoir diffusé ce texte en Martinique, avec l’aide de plusieurs complices. La répression est terrible, arrestations, perquisitions, emprisonnements se multiplient. La justice coloniale veut littéralement écraser ce mouvement et annihiler les désirs d’égalité exprimés par les "libres".
En quelques semaines, Bissette et ses supposés complices, Jean-Baptiste Volny et Louis Fabien, sont inculpés, jugés et condamnés par la Cour de Fort Royal. Les trois hommes vont être marqués au fer rouge des trois lettres "G A L" signifiant galérien. Ils vont rejoindre le bagne, à Brest, comme 219 autres "libres de couleur" exilés en Europe, en Afrique, en Amérique continentale et dans d’autres îles de la Caraïbe. Le temps passe et en juillet 1830, la nouvelle Révolution française va relancer le débat sur la situation des "libres de couleur" aux Antilles. Alors que les soulèvements d’esclaves se multiplient, leurs droits sont finalement reconnus après l’arrivée sur le trône du nouveau roi : Louis Philippe I.
Ils ne peuvent plus être discriminés, pourrons se vêtir comme ils le souhaitent et même porter des noms de blancs. Ces nouvelles règles seront appliquées environ un an plus tard en Martinique, grâce à la détermination du gouverneur Jean Henri Joseph Dupotet, qui s’attire aussitôt la haine des békés.
Mais l’histoire est en marche et petit à petit, les gens de couleur libres comprennent que pour que la société change véritablement il faut que l’esclavage cesse.
Réfugié en France, Bissette finit également par embrasser la cause abolitionniste en 1835 en publiant dans la "Revue des Colonies" (qu’il a créé un an plus tôt), un article réclamant, sans ambiguïté, la libération immédiate des esclaves aux Antilles. Le début d’un long combat qui s’achèvera 13 ans plus tard, en mai 1848.
On les estime à environ 11 000 dans les années 1820, ils sont donc plus nombreux que les colons (9 000) et ne veulent plus se contenter des petits métiers de l’artisanat dans lesquels ils sont cantonnés.
En effet, alors que beaucoup accèdent aux études supérieures, la législation coloniale continue à leur interdire de devenir notaires, avocats ou médecins, de se faire appeler Sieur ou Dame, ou de fréquenter certains lieux. Par ailleurs, les lois somptuaires ne les autorisent pas à porter des bijoux en or ou de s’habiller comme les colons.
Revoir notre reportage.
La brochure du scandale
Une discrimination dénoncée jusqu’à Paris, où leur cause est entendue. Une brochure rouge réclamant le changement intitulé "De la situation des gens de couleur libres aux Antilles française" est ainsi rédigée et imprimée en France pour être distribuée dans les colonies. Un texte dans lequel il est question d’égalité avec les blancs, mais qui ne demande surtout pas la fin du système esclavagiste…car les gens de couleur libres sont souvent, eux-mêmes, propriétaires d’esclaves.
C’est le cas de Cyrille Charles Auguste Bissette, un négociant mulâtre de 28 ans, neveu naturel de Joséphine De Beauharnais. Il vient de participer avec les milices de couleur de Fort Royal, à la répression contre les esclaves révoltés du Carbet en octobre et novembre 1823.
Un an plus tard, il se voit donc accusé d’avoir diffusé ce texte en Martinique, avec l’aide de plusieurs complices. La répression est terrible, arrestations, perquisitions, emprisonnements se multiplient. La justice coloniale veut littéralement écraser ce mouvement et annihiler les désirs d’égalité exprimés par les "libres".
Les droits des "libres de couleur", reconnus par la nouvelle Révolution française de 1830
En quelques semaines, Bissette et ses supposés complices, Jean-Baptiste Volny et Louis Fabien, sont inculpés, jugés et condamnés par la Cour de Fort Royal. Les trois hommes vont être marqués au fer rouge des trois lettres "G A L" signifiant galérien. Ils vont rejoindre le bagne, à Brest, comme 219 autres "libres de couleur" exilés en Europe, en Afrique, en Amérique continentale et dans d’autres îles de la Caraïbe. Le temps passe et en juillet 1830, la nouvelle Révolution française va relancer le débat sur la situation des "libres de couleur" aux Antilles. Alors que les soulèvements d’esclaves se multiplient, leurs droits sont finalement reconnus après l’arrivée sur le trône du nouveau roi : Louis Philippe I.
Ils ne peuvent plus être discriminés, pourrons se vêtir comme ils le souhaitent et même porter des noms de blancs. Ces nouvelles règles seront appliquées environ un an plus tard en Martinique, grâce à la détermination du gouverneur Jean Henri Joseph Dupotet, qui s’attire aussitôt la haine des békés.
Le début d'un long combat avant l'abolition de 1848
Mais l’histoire est en marche et petit à petit, les gens de couleur libres comprennent que pour que la société change véritablement il faut que l’esclavage cesse.
Réfugié en France, Bissette finit également par embrasser la cause abolitionniste en 1835 en publiant dans la "Revue des Colonies" (qu’il a créé un an plus tôt), un article réclamant, sans ambiguïté, la libération immédiate des esclaves aux Antilles. Le début d’un long combat qui s’achèvera 13 ans plus tard, en mai 1848.