Le 12 janvier 2025, dans une petite salle à la Villa d’accueil, l’un des rares lieux sûrs de Port-au-Prince, les autorités par intérim d’Haïti ont organisé une messe à la mémoire des plus de 300 000 victimes du séisme de 2010.
Aucune annonce officielle de la cérémonie n’a été publiée. Il s’agissait d’un évènement organisé à la dernière minute. Selon des médias haïtiens, c’était pour faire taire des critiques.
Le public n’était pas invité.
C’est la 3e année consécutive que les Haïtiens ne peuvent pas se rendre sur le site du mémorial érigé à St-Christophe, sur la route de Titanyen dans le nord de Port-au-Prince.
C’est sur ce site que les centaines de milliers de victimes du séisme sont enterrées.
Les gangs contrôlent toute la zone et tous les accès routiers.
Ne pas se rendre sur le site est une source de grande souffrance pour les proches des victimes.
Jusqu’en 2022, ils se déplaçaient en grand nombre pour se recueillir dans ce lieu symbolique.
Haïti de plus en plus vulnérable aux catastrophes
Claude Prepetit, ingénieur géologue et directeur du bureau des mines et de l'énergie a été l’invité d'un débat organisé par Mouvman Etidyan EDE autour des aléas naturels d’Haïti. Il était également interviewé pour le journal du TéléMétropole.
Il a constaté qu’Haïti est plus vulnérable que jamais.
À cause de la guerre urbaine à Port-au-Prince, les infrastructures parasismiques construites après 2010 ont été abandonnées ou vandalisées. Il s’agit des bâtiments publics, les écoles et les hôpitaux.
Sur 15 bâtiments administratifs, 13 y compris le palais national, le palais législatif et le palais de justice, ont été détruits. La reconstruction n’a pas été entamée.
Plusieurs administrations sont hébergées dans des structures privées qui ne sont pas antisismiques.
Des populations déplacées
Claude Prepetit affirme que la population de Port-au-Prince est aujourd'hui entassée entre Petion-Ville et Delmas.
La densité des habitants est passée de moins de 15 000 par km² en 2010 à 25 000 par km² en 2025, or Pétion-Ville est construite sur une faille sismique.
Imaginez si la faille commence à libérer son énergie à une puissance de 7 (sur l’échelle de Richter) comme en 2010 quand on avait encore des hôpitaux. Aujourd’hui on n’en a plus et le personnel de santé est parti.
Claude Prepetit, ingénieur géologue, bureau des mines et de l'énergie en Haïti
En Haïti, toutes les préparations aux catastrophes naturelles ont été également abandonnées. Claude Prepetit constate que la sécurité de la population n’est plus une priorité et que le pays est guerre.
La population est préoccupée par sa survie quotidienne. 96% de la population est très vulnérable aux chocs naturels. En 2010, l’arrondissement de Port-au-Prince avait une population de 2 millions 500 mille habitants. Aujourd’hui on parle de 700 000 déplacées.
Claude Prepetit
Les habitants sont plus prêts à fuir l’arrivée des gangs qu'à construire des logements parasismiques.
L'indifférence des autorités
L’insécurité a transformé Haïti et sa capitale Port-au-Prince en zone de guerre. Un séisme ou un cyclone entraîneront des conséquences catastrophiques sur la population.
Incapable de prévenir le pire, incapable de secourir, incapable de reconstruire, l’État haïtien effacerait bien, s’il le pouvait, le souvenir de la catastrophe.
Frantz Duval, rédacteur en chef du quotidien Le Nouvelliste
Dans la presse haïtienne, les journalistes ont résumé le jour de commémoration du tremblement de terre de 2010 avec les reportages défavorables envers les autorités intérimaires.