Les industriels des Antilles-Guyane et de la Réunion dénoncent une "tentative de hold-up" sur l’Octroi de Mer

De gauche à droite : Daniel Moreau (Réunion) - Josiane Capron (Martinique) - Ernest Prévot (Guyane) - Franck Desalme (Guadeloupe)
"La production locale et ses emplois sont attaqués" estiment les industriels de Réunion, Guyane, Guadeloupe et Martinique, suite à un rapport d’étude "à charge" selon les entrepreneurs. Le document rendu public le 25 mars 2020, préconise le remplacement de cet impôt (l'OM) par une nouvelle TVA.
Les industriels des Antilles-Guyane et de la Réunion sont très remontés contre un rapport d’étude datant du 25 mars 2020, rendu public par la Fondation pour les Études et Recherches sur le Développement International (FERDI).

Ce rapport rédigé par Anne-Marie Geourjon (experte pour le FMI en politique fiscale et administration douanière) et Bertrand Laporte (maître de conférences-HDR à l’Université Clermont Auvergne) préconise la suppression de l’Octroi de Mer (OM) et son remplacement par un nouveau taux de TVA.

(...) L’objectif final d’une réforme du système actuel de l’OM devrait sans nul doute viser sa suppression. La compensation des handicaps éventuels des activités ultramarines pourrait alors s’effectuer par l’octroi de subventions ciblées et la fiscalité indirecte interne serait utilisée pour mobiliser les recettes perdues au titre de l’OM.


Les auteurs argumentent pages 21 et 22 du rapport (commandé par Bercy) sur la TVA qui apparaît selon eux, "comme l’outil le plus efficace".

Elle est aussi économiquement neutre pour les opérateurs assujettis, ce qui constitue un avantage supplémentaire. Une augmentation des taux actuellement en vigueur dans les DOM sera ainsi nécessaire.

Les taux aujourd’hui appliqués dans les DOM (hormis Guyane et Mayotte) sont de 2,10% pour le taux réduit et de 8,5% pour le taux majoré, ce qui constitue un écart significatif relativement aux taux métropolitains respectivement de 5,5% et 20%.

En tout état de cause, en raison de la restructuration du tissu économique nécessaire pour accompagner la suppression de l’OM, cette dernière devra être progressive et la durée de la période de transition, permettant aux agents économiques de s’adapter, est à déterminer. 


Le rapport avance plus loin, les scénarii envisagés et leur impact économique et budgétaire, ainsi que les modifications des taux de TVA "nécessaires pour compenser les pertes de recettes d’OM."
Produits importés sur un port des Antilles.

Les industriels vent debout


Dans un communiqué de presse en date du 26 mai 2020, l’Association Martiniquaise pour la Promotion de l’Industrie s’interroge.
 

Comment en pleine crise de Covid 19 inédite, le gouvernement peut-il laisser sortir un tel rapport à charge qui assassine non pas exclusivement l’octroi de mer, mais s’en prend directement à la production locale et aux finances des communes et de la CTM ?

(Josiane Capron, Présidente de l’AMPI


L’Octroi de Mer est une imposition spécifique des départements d’Outremer  (Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion) dont l'origine remonte au "droit de poids" institué en 1670. Cette taxe indirecte porte sur les produits importés (de pays tiers comme de la communauté Européenne, y compris la France métropolitaine) comme sur les productions locales.

Elle permet d’assurer des ressources aux budgets des collectivités, en particulier pour les communes, et de favoriser le développement des entreprises locales, en instaurant des possibilités d’exonérations.

Le 27 décembre 2014, le conseil des ministres de l’Union Européenne a décidé de reconduire cet Octroi de Mer jusqu’en 2020.
Produits de l'industrie martiniquaise (illustration).

Emmanuel Macron favorable à l’OM, mais...

 

...On peut sans doute le moderniser.

(Le Président de la République, Emmanuel Macron - octobre 2019)

Emmanuel Macron Président de la République

Les Outremer font front commun


Dans une tribune annexe au communiqué de l’AMPI, sa présidente Josiane Capron, fustige le rapport FERDI.
 

L’absence d’approfondissement (données détaillées, référentiel,..) et le niveau d’analyse retenu (celle d’une approche macro économique) rendent inopérantes les conclusions des auteurs qui s’obstinent dans leur raisonnement à nier l’évidence et à ne pas prendre en compte les handicaps structurels de notre territoire, les surcoûts que supportent les entreprises de production locale et leurs nécessaires compensations, pour rétablir les conditions d’une concurrence loyale avec l’importation. 

 

Le  21 mai 2020, la présidente de l’AMPI avec ses homologues de la Réunion, de la Guyane et de Guadeloupe, ont saisi par courrier le premier ministre Édouard Philippe, à propos de ce document
intitulé :

"Impact économique de l'octroi de mer dans les départements d'Outre-mer français".

Ces industriels ont également sollicité le soutien des élus locaux, dont les maires et les parlementaires des quatre territoires, "compte tenu des enjeux et des incidences pour nos productions et pour les finances des collectivités des Outre-mer", pour une "modernisation utile". 

Dans les prochaines semaines, la martiniquaise Josiane Capron promet "des propositions ayant pour objectif (tout en simplifiant le dispositif pour le rendre plus lisible), de soutenir dans la durée la production locale, de développer ainsi l’emploi dans notre territoire et d’offrir des prix équitables à nos consommateurs, conscients des contraintes de pouvoir d’achat de nos populations."
L'Octroi de Mer en Outremer
 
  • Le taux  moyen d'Octroi de Mer est de 15 % en Guyane, 7% en Guadeloupe et en Martinique, et de 4% à la Réunion. Le taux régional d'Octroi de Mer (taxe additionnelle) est de 2.5%
  • La recette  s'élève à plus d'un milliard d'euros par an (tous DOM confondus)
  • L'octroi de mer est la 1ère recette fiscale des communes  (environ 45%)  et impacte également le budget des régions.
(Source : observatoire.outre-mer.gouv.fr)