Au cœur de cette rencontre internationale, sept candidats représentaient les Barreaux de Bruxelles, du Cameroun, de Liège, de Lubumbashi, de Paris, de Port-au-Prince et de la Martinique se sont affrontés lors d’un exercice oratoire de haut niveau.
L'avocate martiniquaise Me Sandra Sylvestre-Jean-François représentait le barreau. Pour cette première édition en Martinique, elle a offert une performance remarquable et remporte la première place, devant Me Victor Jean-Baptiste du barreau de Paris, qui a obtenu le second prix, et Me Lynda Kenmegne du barreau du Cameroun, lauréate du troisième prix.
Un sujet atypique transcendé
Le thème imposé, à première vue anecdotique, relatait une histoire de basse-cour :
Sept poules tuent la huitième qui ne pond pas, sous la menace du fermier qui exige huit œufs tous les matins dans le poulailler.
Un récit qui aurait pu prêter à sourire, mais que Me Sandra Sylvestre-Jean-François a transformé en une plaidoirie engagée sur les dégâts du productivisme et la contamination des sols dans les îles.
Elle confie avec humour :
Croyez-moi, moi qui suis avocate de la défense et qui ai dû défendre la poule tuée, je me suis dit qu’est-ce qu’ils sont allés pondre comme sujet ?
Me Sandra Sylvestre-Jean-François
Après de nombreuses réflexions, elle a choisi de donner à ce thème une profondeur inattendue.
Le thème de la défense durable m’a poussée à aller plus loin. J’ai élargi la réflexion pour éveiller les consciences sur notre impact environnemental.
En interrogeant le véritable coupable, elle décide de renverser les rôles et de faire une "métaphore de la société".
Est-ce la faute des poules qui ont commis l’acte, du coq qui ne réagit pas, ou du fermier, instrument d’un système productiviste ? En réalité, c’est un peu tout le monde et aucun à la fois, car c’est le système lui-même qui est en cause, mais personne ne réagit.
"Se soumettre ou se révolter"
Me Sandra Sylvestre-Jean-François a pris le temps de peaufiner son discours. Avec 18 essais avant la version finale, elle a travaillé l’articulation des idées, le choix des mots et la puissance des phrases.
Elle s’est appuyée sur des références littéraires et philosophiques, et cite notamment Amadou Hampâté Bâ et Aimé Césaire.
Face à l’oppression, on a toujours deux choix : se soumettre ou se révolter.
Une phrase qui a résonné dans la salle pour renforcer l’impact de sa plaidoirie.
Je n’ai pas pris le sujet à la légère. Sous des airs de banalité, on peut tirer de grandes leçons.
Une victoire riche en symboles
Pour Me Sandra Sylvestre-Jean-François, cette victoire est une reconnaissance pour le Barreau de Martinique et une occasion de mettre en avant le talent local.
Ça a apporté de la reconnaissance et de la légitimité. On voit souvent la Martinique comme un lieu de repos et de vacances, mais nous avons aussi des talents chez nous.
Plaider devant ses pairs en Martinique a été une expérience marquante, tant sur le plan professionnel qu’humain :
Il y avait d’excellent orateurs. Le niveau étaient très haut. Humainement c’était très riche. Voir tous mes confrères se réunir, c’était très fort en émotion.
La prochaine étape pour l’avocate sera en décembre 2025, lors de la 38ᵉ édition de la Conférence Internationale des Barreaux qui se tiendra au Togo, où elle présentera à nouveau sa plaidoirie.