L’extrême droite est-elle en mesure d’entrer à l’Elysée en 2022 ?

Marine Le Pen, la présidente du Rassemblement National après les résultats des élections européennes (dimanche 26 mai 2019).

Qui sera élu président de la République en 2022 ? Nul ne peut le prédire, bien que que plusieurs sondages avancent l’hypothèse d’un second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Laquelle pourrait l’emporter.

Insensiblement mais sûrement, l’électorat de gauche est en train de glisser de la question "Comment battre l’extrême droite ?" à une autre : "Pourquoi voter contre l’extrême droite ?". Une conclusion tirée par la rédaction du quotidien Libération dans ses éditions des 27 et 28 février 2021, à partir d’un appel à témoignages auprès de ses lecteurs.

Plusieurs milliers de personnes y ont répondu. L’un de ses lecteurs, qui se recrutent volontiers sur la gauche de l’échiquier politique, se demande : "Si c’est pour avoir une politique sur les mêmes thématiques, pourquoi refuser au Rassemblement national d’entrer à l’Elysée en 2022 ?".

La France au bord du fascisme ?

 

Ainsi, après la Hongrie, les Pays-Bas, l’Autriche, l’Italie, les États-Unis, le Brésil, est-ce au tour de la France d’être gouvernée ou codirigée par des militants se situant à l’extrémité de la droite de l’échiquier politique ? Il est vrai que plusieurs sondages d’intentions de vote donnent un coude-à-coude entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron.

Les hypothèses de second tour placent la présidente du Rassemblement national et le président de la République comme adversaires du second tour de scrutin. Toutefois, la route est encore longue d’ici à mai 2022. Le passé récent nous rappelle qu’il n’est pas de bon augure d’être favori une bonne année avant le jour décisif. Edouard Balladur, Lionel Jospin, Alain Juppé et François Fillon en savent quelque chose.

Les jeux sont loin d’être faits

 

Deux autres réserves, de taille, doivent être observées. Primo, le président actuel ne s’est pas déclaré candidat et nul ne sait s’il le sera. Deuxio, il n’est pas logique d’envisager la finale alors que les éliminatoires n’ont pas eu lieu. Comme nous disons chez nous, "Tro présé pa ka fè jou wouvé !" (Rien ne sert de courir, il faut partir à point ).

Toutefois, l’hypothèse d’une victoire du Rassemblement national à l’élection présidentielle est de plus en plus crédible pour une bonne partie de l’opinion publique. "Le temps de la dédiabolisation est passé. Nous sommes passés au temps de la présidentialisation", explique l’un de ses dirigeants. Les extrémistes de droite ont troqué le treillis paramilitaire pour le costume de ville.

Vingt ans après le second tour de 2002, lors duquel se sont affrontés le dernier des présidents gaullistes, Jacques Chirac, et le chef emblématique de l’extrême droite, Jean-Marie Le Pen, allons-nous revivre le même scénario ? Comme le dit l’éditorialiste de Libération, prenant le contrepied du célèbre slogan "le fascisme ne passera pas", il se peut que l’on dise en 2022 : "le fascisme passera". Il aurait pu ajouter : avec l’assentiment du peuple, en toute connaissance de cause.