Entendu ici et là, à la faveur de la campagne électorale : "Je suis venu vous présenter mon programme". Ou encore : "Avec moi, la circonscription va se développer". Une autre variante : "Je défendrai les intérêts de ma population". Les auteurs de ces propos se reconnaîtront. Ils sont hors-sujet.
Nul n’a le monopole de l’ignorance des pouvoirs réels du député. Ce qui peut créer de la déception, si toutefois ceux qui tiennent ces propos sont élus. Car il y a loin de la coupe aux lèvres, entre certaines déclarations d’intention et la réalité des institutions.
Un député n’est pas un maire, ni un conseiller territorial. Il ne dirige pas une collectivité. Il ne dispose pas de services techniques, ni d’un calendrier de travaux, ni d’un budget. Il n’a aucun moyen direct d’agir sur les sujets de vie quotidienne, du ressort du maire. Il ne peut pas non plus planifier telle intervention ou arrêter telle orientation, comme à la CTM.
Un mandat encadré par la Constitution
Le député exerce un mandat défini par l’article 3 de la Constitution qui stipule notamment : "La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants (…)". Le député est le dépositaire d’une parcelle de la souveraineté du peuple. Sa mission est double.
Tout d’abord, il est un législateur. Il participe à l’élaboration des textes de loi. Ceux-ci peuvent être à l’initiative du gouvernement ou proposés par un de ses collègues. Il participe aux travaux de la commission dont il est obligatoirement membre. Il peut rédiger et faire voter des amendements. Il pose des questions écrites ou orales aux ministres pour demander des précisions ou argumenter son désaccord sur une décision.
Cette prérogative est parfois complexe à exercer quand le président en place dispose de la majorité absolue. L’opposition peut être marginalisée ou ignorée. La tentation est réelle pour le chef de l’Etat et ses soutiens de vouloir prendre le pas sur le Parlement. Mais rien n’interdit aux parlementaires de batailler pour exercer leur rôle de représentant du peuple. L’actualité nous le montre volontiers.
Une double mission essentielle
Le second devoir essentiel du député est le contrôle de l’action du gouvernement. À cet effet, il peut être nommé membre d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information. Il dispose de la faculté de renverser l’exécutif par une motion de censure, notamment lors du vote du budget, chaque année. Le gouvernement n’a été renversé qu’une seule fois, celui de Georges Pompidou, en octobre 1962, mais ce droit existe bel et bien.
En résumé, le député n’a pas vocation à être le délégué de sa seule circonscription d’élection. Ce qui ne l’empêche pas d’être une sorte d’ambassadeur de son territoire. Mais il est tenu, par les textes et par la pratique, de placer son activité dans un ensemble plus large.
À l’oublier ou à le négliger, le candidat imprudent contribue, sans le vouloir forcément, à éloigner le citoyen de la chose politique et à favoriser l’abstention. Exactement le contraire du but recherché quand on veut siéger à l’Assemblée nationale.