Noël est-il menacé par la modernité, ou par ce qui nous en tient lieu ? Le débat est posé chaque année, ici comme ailleurs, tant la dérive mercantile semble altérer le sens de ce moment. Cette fête catholique est régulièrement remise en cause. Il est vrai qu’elle a quelque peu perdu, depuis les dix-sept siècles qu’elle existe, de sa signification première.
Fête populaire païenne dans la Rome antique, Noël a peu à peu évolué en fête religieuse une fois que le monde chrétien s’en est emparé. Sous l’impulsion de l’empereur de Rome Aurélien au 3e siècle de notre ère, elle devient un moment incontournable dans le calendrier liturgique catholique.
Depuis, dans les régions et les pays où le catholicisme est la religion dominante ou unique, Noël est le moment de célébration de la naissance de Jésus-Christ. Ironie de l’histoire, la dimension païenne des origines qui avait disparu a repris largement repris le pas sur la dimension religieuse, au fil du temps, ici comme ailleurs.
Noël ne s’est pas imposée dans le monde entier…
Une autre particularité de cette fête, c’est que, en dépit de la prédominance de la civilisation occidentale sur les autres civilisations contemporaines, Noël ne s’est pas imposée dans les régions du monde où d’autres religions dominent, qu’elles soient monothéistes ou pas. Il est vrai que la chrétienté des origines a connu d’innombrables mutations et qu’elle est tout sauf monolithique. Sa diversité n’a pas aidé à sa propagation sur la planète entière, où plusieurs dizaines de religions coexistent.
Le paradoxe est qu’une trêve planétaire est observée à l’occasion de Noël, alors que la majorité des Terriens ne sont pas catholiques. Le bruit ambiant du monde s’estompe quelque peu. Comme si chacun avait convenu de mettre à profit ce moment pour se recentrer sur quelques valeurs universelles, qui ne sont pas propres aux chrétiens, du reste.
Entre autres exemples : le partage, la solidarité envers les démunis, la générosité, la bienveillance. Mais voilà, à notre époque troublée, pouvons-nous attester que ces valeurs sont respectées ? Qui partage quoi, avec qui ? Qui se montre solidaire envers son prochain, chaque jour ? Qui pratique volontiers la tolérance et l’écoute de l’autre ?
… Mais ce moment marque une trêve planétaire
Force est de constater que dans notre société, la solidarité se dilue, que la misère partagée jadis est désormais cachée sous les habits factices d’une modernité inachevée ou mal assumée, que la joie est annihilée par les guerres, summum de l’inhumanité de l’être humain. Comme si le message des origines attaché à cette fête est de plus en plus ignoré.
Il est vrai que l’Eglise catholique est concurrencée par la persistance de l’athéisme et la vitalité des autres religions. Mais voilà, le message de la fraternité et l’appel à l’humanité de l’être humain est-il forcément propre à une seule religion, ou à un seul mode de spiritualité ?