Les dimensions sociologiques de l'acte de voter sont souvent sous-estimées

Des électeurs devant un bureau de vote à Saint-Joseph (juin 2020).

Environ 306 000 électeurs sont concernés par le premier tour des élections territoriales, ce dimanche 20 juin 2021. Voter n’est pas un acte forcément individuel, ni neutre, contrairement à une légende tenace.

Au premier tour, on choisit ; au second, on élimine. Chacun connaît cette règle s’appliquant aux élections. Elle résume les deux orientations usitées pour choisir nos représentants : le vote par calcul et le vote par intérêt. Cet acte n’est jamais neutre. Nous avons conscience qu’il peut conditionner notre vie, selon le degré de responsabilité des élus de notre choix.

Pour autant, nous ignorons comment est conditionné notre vote. Nous sommes persuadés qu’il s’agit d’un geste résultant de notre seule volonté. Ceci est parfaitement vrai. Sauf que le vote, comme tous les faits sociaux, relève aussi d’une logique collective, sans que nous en ayons pleinement conscience.

La sociologie électorale nous enseigne depuis 80 ans que voter découle partiellement de nos conditions économiques et sociales. L’âge, le genre - féminin ou masculin - et le lieu de résidence influent peu sur le comportement électoral, selon d’innombrables études menées sur tous les continents.

Le vote n’est pas un acte gratuit

 

Les éléments les plus fortement déterminants sont : la religion, et notamment son degré de pratique ; le statut socioprofessionnel, salarié ou entrepreneur ; le niveau d’instruction et les diplômes obtenus, ou encore le patrimoine et les revenus.

D’autres facteurs sont tout aussi importants : l’influence de notre milieu familial, notre culture politique personnelle, notre intérêt pour l’information, notre éthique et notre vision du monde. Chacun de nous est ainsi à la confluence de nombreuses normes sociales et valeurs culturelles qui nous prédestinent, en quelque sorte, pour accomplir tel ou tel acte.

Ajoutons que le vote répond aussi aux enjeux de l’élection concernée, vu que l’offre politique du moment se situe au centre de notre intérêt de citoyen. Nous savons aussi que l’électeur stratège se détermine autant sur les programmes que sur les personnalités qui les portent. Un électeur stratège qui n’est pas toujours là où il est attendu. Il contribue ainsi à composer un électorat volatil.

Le rôle des médias est surévalué

 

Quant au rôle des médias dans l’acte de voter, il a été démontré par l’équipe du sociologue américain Paul Lazarsfeld en 1944 que celui-ci est limité. L’influence directe de la télévision, de la radio, des journaux et des sites numériques sur les citoyens reste marginale. En revanche, le traitement de l’actualité électorale choisi par un organe de presse peut influencer, même indirectement, la décision du citoyen.

Classer les candidats en catégories, offrir une exposition privilégiée à tel autre ou ignorer un autre peut orienter le choix final. Encore qu’il faille démontrer que ce sont les journalistes qui font l’élection. Le reconnaître serait sous-estimer le libre-arbitre du citoyen. Celui-ci se détermine sur des critères échappant en définitive aux raisonnements simplistes.