Les trois paradoxes de la CTM, une institution en construction

Une partie du conseil exécutif de la CTM pendant la présentation du bilan de mandature (18 décembre 2020).

Le cinquième anniversaire de la Collectivité Territoriale de Martinique, le 18 décembre 2020, nous permet de nous demander si elle constitue un progrès par rapport au schéma institutionnel précédent.

Depuis l’état de grâce né lors de l’installation de la CTM il y a cinq ans, le climat a bien changé. A la parfaite entente entre toutes les composantes de la majorité composite a succédé une crise politique majeure. La coalition au pouvoir est désormais scindée en trois tendances.

Si l’opposition d’Ensemble pour une Martinique Nouvelle ne souhaite pas s’immiscer dans les querelles intestines du Gran sablé pou ba péyi’a an chans, elle pâtit aussi de la situation. Des électeurs déçus peuvent considérer que les élus de tous bords sont incapables de s’entendre sur le long terme pour diriger le pays. Surtout en période de difficultés, quand nous devons resserrer les rangs pour affronter l’adversité.

Le climat électrique que nous vivons ne doit pas nous surprendre si nous considérons qu’il met en relief les trois paradoxes de la CTM. Le premier de ces paradoxes est que la CTM n’a obtenu aucune compétence nouvelle par rapport à celles exercées auparavant par le département et la région. Ses pouvoirs restent circonscrits à ceux que détenaient les deux collectivités ayant fusionné avec leur patrimoine, leurs budgets et leurs agents.

Dépasser les clivages actuels est-il possible ?

 

Le deuxième paradoxe consiste, pour ses deux présidents, à administrer une institution alors qu’ils ont été hostiles ou perplexes quant à certaines dispositions de la loi instaurant la CTM. L’ancien député Alfred Marie-Jeanne et l’ancien sénateur Claude Lise avaient exprimé leur désaccord sur plusieurs aspects de ce texte imaginé par leurs opposants du PPM.

Ils se retrouvent dans la position de l’architecte empêché d’habiter la maison qu’il a imaginé finalement occupée par ses voisins récalcitrants. Des voisins qui s’y sentent bien, après coup.

Troisième paradoxe de la CTM première mouture, la guerre tantôt larvée, tantôt ouverte entre le PPM et le MIM et leurs chefs respectifs. Cette concurrence permanente depuis deux décennies se déporte dans le champ clos de la collectivité et contribue à la rendre inefficace. La bipolarité du paysage politique ne favorise pas l’émergence d’autres voix. Pourtant la Martinique politique est riche de nuances et de différences.

A l’occasion de son cinquième anniversaire, il reste à savoir si la nouvelle collectivité unique est plus efficace que les anciennes auxquelles elle s’est substituée. Et s’il est encore possible de corriger ou ses imperfections, au-delà des conflits entre les personnalités qui la composent.