"On en a marre !"… le cri de colère des abonnés d'un quartier de Fort-de-France, "trop souvent" en panne d’eau

Un robinet d'eau potable (image d'illustration).
Depuis plusieurs années, nombre d’usagers de Fort-de-France, en particulier du quartier Ravine-Vilaine, subissent de fréquentes coupures d’eau sans une explication "plausible" déplorent-ils. Certains n’hésitent plus à adresser de sévères courriels de protestation à Odyssi, la régie communautaire de l’eau et de l’assainissement du centre de Martinique.

Mercredi 8 mars 2023, sur le site internet de la régie communautaire de l’eau et de l’assainissement (odyssi.fr), plusieurs centaines d’abonnés sont privés d’eau. 

Plus tôt dans la matinée, trois autres quartiers ont été prévenus d’une coupure peu après 7h via un communiqué électronique, alors que les robinets étaient déjà à sec 2 heures avant selon nos informations.

Annonce de coupures à Fort-de-France.

A Ravine-Vilaine, les habitants sont particulièrement remontés, car victimes "trop souvent" d'interruptions.

Message d'internaute...

"5 coupures en un mois"

Les usagers de ce quartier sont d’autant plus en colère, que plusieurs d’entre eux jugent "incorrectes" les réponses de certains agents du service d’astreinte d'Odyssi, lorsque surviennent les ruptures d’approvisionnement.

En 1 mois nous avons subi 5 coupures d’eau sur le quartier de Ravine-Vilaine. Nous ne sommes pas encore en période de sécheresse alors que se passe-t-il sur le réseau d’eau dans ce secteur ? En tant qu’abonnés, nous avons droit à une explication plausible. Le problème sur le réseau de ce quartier existe depuis des décennies et rien n’est fait pour le résoudre de façon pérenne.

Courriel d’un usager excédé

"Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ?"

D’autre part, formez les agents d’astreinte à apporter des réponses correctes à vos abonnés lorsqu’ils appellent (…), car s’entendre répondre : "Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? Vous n’avez qu’à faire des mails de réclamation !" est une réponse inadmissible !

L’usager
Les pompiers sont sollicités pour remplir les citernes mises à la disposition du public, à cause d'une pénurie d'eau potable (image d'illustration).

Dans ses communiqués d’alerte, Odyssi s’excuse toujours, certes, "pour les inconvénients qui peuvent en découler" selon la formule consacrée.

Mais c’est une bien maigre consolation pour ces abonnés foyalais régulièrement impactés, d’où leur colère. Et à l’approche du carême, ces derniers craignent le pire, ayant gardé en mémoire notamment l’étiage de 2020.

La vétusté des installations… une écharde aux pieds des fermiers

Comme les exploitants SME et SMDS, la régie communautaire ODYSSI, reste confrontée à la problématique majeure liée à la vétusté des tuyaux du réseau de distribution sur l’ensemble du territoire.

Par conséquent, le délégataire du service public de l’eau peine à donner des réponses concrètes aux habitants qui se plaignent de pénuries à répétition.

"Une rénovation s’impose"

En 2019, Yvan Bertin professeur agrégé d'histoire-géographie au lycée et en classes préparatoires BCPST (au lycée de Bellevue à Fort-de-France et celui du centre-sud à Ducos) s'est penché sur la question, dans un dossier intitulé : "La France : des territoires en mutation". Pour ce spécialiste, "une rénovation s’impose".

Les casses sont fréquentes (…). Les fuites sur les réseaux sont un problème qui occasionne la perte d’environ 20 % à 30 % de l’eau distribuée. La vétusté des réseaux et leur entretien défectueux, les mouvements de terrain fréquents, la longueur des réseaux due au phénomène de mitage, pas toujours contrôlé par les plans d’urbanisme, expliquent cette situation.À partir des années 2010, une chasse à la fuite d’eau a été entreprise par les organismes de distribution.

Yvan Bertin

Des réparations "au coup par coup"

On estime à 500 km le linéaire de tuyau à reprendre à court terme. Cependant pour l’instant, on s’emploie surtout à réparer les casses, au coup par coup. Cependant, le prix de l’eau en Martinique étant déjà jugé excessif, il semble impossible de l’augmenter davantage pour financer des travaux de rénovation du réseau. Il s’agit là d’investissements lourds que les organismes de distribution ne peuvent effectuer seuls sans l’aide des collectivités territoriales, de l’État ou de l’Union européenne. La réduction des frais de fonctionnement des organismes liés à la gestion de l’eau permettrait sans doute de dégager des marges de manœuvre permettant d’envisager plus sereinement les investissements à venir.

Yvan Bertin

A LIRE >>> l’intégralité du dossier en cliquant⇒ ICI.

Casse sur le réseau d'eau potable au quartier Séguineau au Lorrai (jeudi 3 septembre 2020).

Le coût est en effet, le second écueil dans "l’écosystème" de la gestion de l’eau dans l'île. Un organisme unique est envisagé mais pour l’heure, c’est toujours l’arlésienne.

En attendant, la Collectivité majeure a entrepris les travaux jugés les plus "urgents" pour la réparation des conduites les plus abîmées. Ce chantier titanesque devrait se poursuivre dans les années à venir.

La Collectivité Territoriale de Martinique apporte son appui technique et financier aux communes pour les installations de production et de distribution de l’eau potable, participe aux actions du SDAGE et assure un service de prélèvement, de stockage à des fins d’irrigation (barrage de la Manzo…), de distribution, d’entretien des réseaux d’eau, de mise en place de périmètres de protection des captages et de suivi de la ressource.

L’Office De L’Eau

"Une amélioration significative et durable"

Quant à L'ODE (l’Office De l’Eau), l'établissement public dont la mission est de faciliter les politiques publiques, elle a du pain sur la planche pour coordonner "une amélioration significative et durable de la distribution de l’eau potable" dans l’île. C’est en tous cas, l'un des souhaits prioritaires exprimés par la population.