Pédocriminalité : l’Église catholique expie ses failles et ses lacunes

Prêtre de l'église catholique (illustration).
Le rapport sur la pédocriminalité dans l’Eglise catholique, rendu public le 6 octobre 2021, provoque de multiples réactions indignées. Il permet aussi une prise de conscience de la réalité des abus sexuels contre les enfants.

Entre 216 000 et 330 000 enfants ont été victimes d'abus sexuels au sein de l’Église catholique en France depuis sept décennies. Les conclusions du rapport de la commission indépendante présidée par le haut fonctionnaire Jean-Marc Sauvé sont accablantes.

L’enquête ayant permis de parvenir à ces résultats a duré plus de deux ans. Cette commission a travaillé en toute indépendance sur une commande de la haute hiérarchie catholique, la Conférence des évêques de France.

Son président a exprimé sa honte. Le pape François a confié que "cette effroyable réalité" provoque chez lui "un immense chagrin". L’évêque de Martinique et de Guadeloupe, Mgr Macaire, a déclaré : "Il faut recevoir ce chiffre, il faut l'analyser, le comprendre. Avec de la honte et puis le cri de douleur des victimes".

Des propos d’autant plus pertinents que la commission n’a identifié que de rares victimes aux Antilles, quand elle s’y est déplacée, en février 2020. Il est fort probable que les personnes abusées se sont abstenues de se dévoiler. La forte proximité sociale dans nos pays a joué un rôle dans cette absence de témoignages.

L’Eglise catholique trop présente aux Antilles

 

En outre, le poids de l’Église catholique demeure infiniment plus lourd dans nos sociétés où la religiosité est omniprésente dans l’espace public. Ce qui n’est plus le cas en France. Le rapport 2021 de l’Observatoire de la laïcité indique que 35% de la population se déclare croyante, toutes religions confondues. La proportion des athées des non croyants et des agnostiques s’élève à 44%.

À en croire Mgr. Macaire, le rapport Sauvé "va ébranler la confiance des fidèles dans l'institution". Il relativise en disant que les fidèles catholiques ne croient pas en une institution. Ici comme dans toute la France, l'Église ouvrira une structure consacrée au recueil des témoignages des victimes, mais aussi des religieux. Les suites utiles seront données à ces paroles.

Un procès n’est pas forcément la solution

 

Ce qui ne signifie pas qu’un procès soit la panacée. Les victimes souhaitent avant tout la reconnaissance de la faute de l’institution. "La vérité judiciaire ne fait pas toujours bon ménage avec la vérité tout court", conclut Jean-Marc Sauvé. L’essentiel est de libérer la parole et d’alléger les consciences, selon le président de la commission.

Laquelle a passé le relais à la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, (Ciivise). Elle est à l’œuvre septembre 2021. Elle se charge de recueillir la parole des victimes de violences sexuelles commises contre les enfants. Elle tâchera d’imposer la transparence sur les violences sexuelles contre les enfants à toutes les institutions sociales, notamment l’école, les clubs de sport et les autres religions.

Le repérage et la prise en charge des victimes doivent se généraliser à toutes les sphères de la société. Même si le crime se reproduit, il ne peut plus être impuni. C’est le sens du message délivré par le souhait des évêques. Leur geste en est d’autant plus méritoire.