Présidentielle : la campagne de tous les dangers

François Fillon s'adresse à ses partisans réunis place du Trocadéro à Paris, dimanche 5 mars 2017
Drôle d’élection présidentielle ! Pas un jour ne se passe sans un rebondissement ou une révélation sur tel ou tel candidat englué dans les affaires judiciaires ou futur protagoniste d’un scandale en préparation. Comme si nous vivions avant l’heure, une fin de régime.


Cette campagne de tous les dangers signe au mieux une crise de régime, au pire, une fin de régime, celui de la Cinquième République, datant de 1958. Un régime né des décombres de la Quatrième République, qui n’a pas survécu à son instabilité chronique ni à la crise politique née de la guerre d’Algérie, perdue par la France.

La Cinquième République, au contraire de la précédente, a instauré un régime présidentiel, nettement accentué en 1965, année où le président est élu au suffrage universel. Le général de Gaulle, l’homme fort du nouveau régime, avait été choisi en 1958 par un collège électoral de 82 000 conseillers municipaux, conseillers généraux et députés. Le chef de l’Etat exerce le pouvoir exécutif, incarne l’équilibre des institutions et arbitre une vie publique animée par deux grands courants idéologiques : la droite, partagée entre les gaullistes et sa fraction libérale ; la gauche, divisée entre communistes et socialistes.

Au fil du temps, et surtout après la démission du général de Gaulle en 1969, ces deux familles se scindent en plusieurs autres formations plus ou moins rivales, plus ou moins alliées, selon les circonstances et le tempérament de leurs chefs. Pour la droite : Georges Pompidou (président de 1969 à 1974), Valéry Giscard d’Estaing (président de 1974 à 1981), Jacques Chirac (président de 1995 à 2007), Nicolas Sarkozy (président de 2007 à 2012). Pour la gauche : François Mitterrand (président de 1981 à 1995), Lionel Jospin (Premier ministre de 1997 à 2002), François Hollande (président depuis 2012).

En 2017, le système semble être parvenu à bout de souffle. L’accumulation de faits divers au détriment du débat sur les programmes des candidats laisse voir en relief l’échec d’une certaine modalité de la démocratie représentative. Et en tout cas, du présidentialisme qui révèle ses limites et son anachronisme. Ce qui peut expliquer l’attrait d’une bonne proportion de l’électorat pour des candidats dénonçant l’habituel clivage droite-gauche. Les candidats de l’extrême-centre et de l’extrême-droite réunissent la moitié des intentions de vote, du jamais vu.

Faute de disposer de sondages d’opinion fiables et réalisés par des instituts sérieux, il est difficile de mesurer l’impact de ces deux candidats inattendus en Martinique. Pourtant, il ne serait pas surprenant que le vote pour "En Marche!" et pour le Front national soient massifs chez nous, surtout que la campagne se déroule dans un silence sépulcral. Comme si gauche et droite locales étaient en vacances. Et pourtant, en paraphrasant une formule passée à la postérité, "l’élection, c’est maintenant"!