Et soudain, la colonisation s'invita au débat !

Emmanuel Macron, à Alger, la capitale algérienne, le 14 février 2017.
Comme un inattendu, le thème de la colonisation française surgit dans la campagne présidentielle. Une vive controverse a été ouverte par Emmanuel Macron qui s’attire des critiques venues de la droite et de l’extrême droite. Pas toujours à bon escient.
"La colonisation a été un crime contre l’humanité et une vraie barbarie". Ainsi parlait Emmanuel Macron dans une interview accordée à la télévision privée algérienne Echorouk News, diffusée ce mardi 14 février. Aussitôt, tollé à droite. Son candidat décoche de sévères critiques contre cette manie de "la repentance" dont seraient victimes certains dirigeants politiques, qui plus est, durant une campagne électorale. C’est oublier un peu vite ses propos qui ont heurté plus d’un, sur le prétendu partage des cultures qu’aurait été la colonisation.
 
Puis, indignation à l’extrême droite. Les porte-paroles de sa candidate dénoncent "des propos irresponsables d’un candidat à la présidence de la République". Là, rien que de très normal, vu les origines intellectuelles et politiques du Front national et de ses héritiers : le fascisme, le racisme, la négation de l’autre pour ce qu’il est, des notions ayant légitimé la colonisation, dont tire fierté cette mouvance.
 
Dans ce tintamarre de réactions courroucées marquées au sceau de l’hypocrisie et du cynisme, la gauche est silencieuse. Là aussi, rien que de très banal, la colonisation ayant souvent été portée par ce camp, de Jules Ferry, à la fin du 19 ème siècle, à François Mitterrand. Lequel, ministre de l’Intérieur, a organisé la répression, puis ministre de la Justice, a fait jouer la guillotine. Avec le résultat que l’on sait : l’indépendance de l’Algérie, péniblement conquise en 1830, piteusement perdue en 1962, après moins d’un siècle et demi. Une défaite que nombre de Français de tous bords politiques n’ont pas digéré. Ce qui explique en partie le tir de barrages contre un candidat qui a montré un certain courage en évoquant des faits et en refusant une légende.
 
Notons, enfin, que dans ce genre de controverse, la voix des descendants des victimes de la colonisation n’est pas entendue. Comme si la parole confisquée du vaincu, devenu rebelle, n’a pas de poids. Comme si les femmes et hommes déportés, les peuples humiliés, les civilisations disparues n’ont jamais existé. Si repentance doit rimer avec innocence, le droit à la décence, comme le crime contre l’humanité, est imprescriptible.