Pouvons-nous faire revenir au pays nos émigrés et/ou faire rester ceux qui se sentent obligés de s’en aller ? Ce sujet doit être placé au cœur des politiques publiques de nos collectivités et de la stratégie de nos entreprises.
C’est la conviction du président du conseil exécutif de la Collectivité Territoriale de Martinique. Pour Serge Letchimy, l’État doit participer à la lutte contre la baisse démographique. Il attend la réponse du ministre des Outre-mer à sa proposition de signer un "Pacte démographique".
Les grandes lignes de ce pacte sont déjà contenues dans la Maison du retour et de la famille. Ce dispositif adopté en février dernier par l’Assemblée de Martinique contient plus de quarante mesures destinées à enrayer le déclin numérique de notre population.
La Maison du retour est une première réponse…
L’objectif recherché est de rendre notre territoire plus attractif qu’il ne l’est. Ce qui suppose la mise à niveau économique, le renforcement de la sécurité publique ou encore l’amélioration du système de soins. En résumé, il faut créer un environnement suffisamment favorable pour que nos émigrés reviennent. Ou alors pour que les candidats au départ restent au pays ou y retournent rapidement pour y vivre et travailler.
Le gouvernement répondra-t-il à la demande d’inversion des flux démographiques ? Il est permis d’en douter. L’État a fortement contribué au désastre que nous assumons seuls. Nos émigrés seront-ils convaincus par la volonté politique affichée par la CTM ? Il est permis de s’interroger. De nombreuses questions posées par la création de cette Maison du retour et de la famille restent sans réponse, pour le moment.
Il manque d’une évaluation sur le nombre prévisionnel d’émigrés souhaitant revenir. Qui le voudra tant que le pays sera aussi déceptif ? Que deviendront leurs enfants et petits-enfants nés là-bas, et qui y ont leur vie ? Et revenir dans quelle famille, les parents ou les grands-parents étant décédés et les frères et sœurs étant là-bas aussi ?
…à une problématique complexe
Il convient de réfléchir aussi sur les emplois à occuper par les émigrés. Ils sont ouvriers et employés dans leur grande majorité. Quelles entreprises et quels services publics les attendent ? Quant aux plus jeunes, qui s’en vont en masse depuis une décennie, leurs diplômes sont mieux valorisés en France qu’aux Antilles. Et leurs salaires y sont supérieurs. Pour quel motif abandonneraient-ils une situation plus confortable que celle qu’ils pourraient trouver au pays ?
Une note positive, tout de même. Ceux qui reviennent avec une expérience de quelques années trouvent à s’employer plus facilement et sont mieux payés que ceux qui ne sont pas partis.
Une récente étude menée par l’INED (Institut national d’études démographiques) et l’Université de Strasbourg montre que les moins de 35 ans s’étant formés et/ou ayant travaillé en France réussissent mieux leur insertion professionnelle que leurs homologues restés sur place.
Mais pouvons-nous imaginer un destin collectif à partir de réussites individuelles ? Le débat reste entier.