La fleur d'ylang est l'or jaune de Mayotte. Le pays lui doit son nom "d'île aux parfums". A Ouangani Hassani a fait de son exploitation le coeur de son activité économique. Un destin hors du commun.
Hassani remonte le mauvais sentier creusé d'ornières qui mène à l'exploitation familiale. Du pas assuré de celui qui connaît parfaitement son terrain. "Ici, j'ai l'impression d'être avec mes ancêtres. Le manguier, là, c'est mon arrière grand-père qui l'a planté". Il poursuit, désignant un autre arbre "Là, le cocotier, c'est mon grand-père. La vanille c'est mon père!" Lui a mis en terre un bambou géant. Trente mètres de haut qui grandit de 2 centimètres par heure dans sa première poussée.
Route de l'ylang
Couché dans le lit d'un torrent un panneau "route de l'ylang". "Il va falloir le remettre en place!". Souci d'ordre, l'une de ses caractéristiques. Organiser, construire des projets.
A 30 ans il a repris depuis plusieurs années les 4,5 hectares des terres de sa famille. Elle est installée depuis 6 générations à Ouangani. D'un terrain qui parvenait difficilement à nourrir les 9 enfants il a fait une petite PME rentable.
Cette "route de l'ylang" ne s'est pas tracée sans mal.
Jeune, Hassani accompagnait son père "Mon père m'a initié. Il m'emmenait tout le temps. On coupait les fleurs dès qu'elle étaient écloses". se rappelle-t-il. Et d'ajouter avec un sourire : "L'ylang c'est comme les vaches! Il faut les traire! Plus on trait et plus elles donnent du lait!"
Le "déclic" de son destin se produit tôt dans sa vie. "En classe de troisième je me suis mis en tête d'aider mon père à mieux gagner sa vie. Il faisait 7000 à 8000 euros par an. Plus le temps passait -c'était il y a 15 ans- plus ça devenait limite! Tout augmentait!"
En permanence à ses côtés le jeune homme comprend qu'il faut tracer d'autres pistes pour rentabiliser ce bout de terrain.
Vendre en direct
"Mon père travaille tout le temps mais son travail n'est pas valorisé! Il se fait avoir!" constate le fils. Encore en troisième!
Il organise le changement. Commence par acheter des flacons. Distille les fleurs d'ylang et remplit les fioles de la précieuse essence. Organise la vente directe.
Il échappe ainsi en partie aux grossistes qui passaient une fois par semaine . Et achetaient la production familiale à bas prix.
Le collégien se lance seul dans une activité de marketting "J'ai fait des affiches "venez visiter la plantation!" Vente directe d'ylang". Salles des profs, lieux publics, gites.
En peu de temps résultats suivent! La petite exploitation multiplie par quatre son chiffre d'affaires. 30 000 euros par an! Un vrai pactole dans ce pays loin des sites touristiques balnéaires du lagon.
Porté par sa volonté de réussir Hassani passe un bac éco et social, décroche un BTS "assistant de gestion PMI" et s'engage dans une licence "éco et gestion d'entreprise". Il a à peine 20 ans.
Des projets... à la dépression
En 2010 il crée son entreprise : "AROMAORE". Avec trois associés il s'engage dans trois directions. L'agro-tourisme, l'exploitation agricole et la vente en boutique.
A Mamoudzou beaucoup d'habitants se souviennent de ces boutiques. Vanille, ylang, d'autres produits locaux et de l'artisanat étaient vendus en direct.
Un succès commercial couronné de prix régionaux et nationaux "catégorie dynamique rurale". En 2015 un prix "développement durable".
Avec la réussite les tensions naissent au sein de l'équipe. Les trois associés se séparent. Hassan continue. Seul. Et seul il porte les trois actibvités. "Je travaillais 20 heures par jour!"
En 2014, corps et esprit lâchent.En médecine cela s'appelle un "burn out". Une "explosion" sous le crâne où la personnalité est comme "carbonisée" -"burn" en anglais- par des pressions qu'elle ne supporte plus.
Aujourd'hui Hassani évoque ce temps de la dépression avec recul. Sinon sérénité.. Une ananlyse sans concession. "Pendant trois ans je n'ai pas eu de vie sociale! Toujours "Objectif chiffre" ou "objectif croissance"! On laisse tomber le côté humain!"
Il devient étranger aux autres parce qu'étranger à lui-même. Ses proches ne comprennent pas.
Sur des conseils d'amis il ferme les boutiques. Et se consacre à la culture et à l'agro-tourisme.
"Je recommence trouver un équilibre. Les choses se mettent en place tranquillement" conclut-il. Une vie retrouvée.
Des projets à taille humaine
Encore des projets... mais "à taille humaine" pour un seul homme! Avec d'autres petits producteurs il s'est engagé dans une organisation de la filière ylang. Une nécéssité pour résister aux grossistes qui proposent d'acheter la production à bas prix. Pour la revendre à prix d'or.
La concurrence extérieure est rude. Aux Comores le kilo d'essence au départ producteur est de 100 à 110 euros. Ici, 300 euros. Premier atout, c'est la qualité de l'ylang de Mayotte.
L'autre atout réside dans la cueillette et la distillation. Cueillir exige des gestes précis. Délicats. Sur une même branche certaines fleurs sont écloses. D'autres sont en bouton. A proximité immédiate. Il s'agit d'aller vite... sans massacrer.
Quand on sait qu'il faut 50 kilos de fleurs pour un litre d'essence d'ylang... la finesse du savoir-faire est évident!
"C'est pas facile" commente Hassani. "Un saisonnier entraîné va cueillir 2,5 à 4 kilos de fleurs en une heure. Un novice 500 grammes"... Mieux vaut éviter le gâchis...
La distillation se fait dans un almbic artisanal alimenté à l'eau de source. Captée à quelques centaines de mètres.
Chaque fin de semaine des groupes de touristes, de scolaires, viennent visiter la plantation. Et participent aux activités traditionnelles (tressage, msindzano..).Découvrent les cultures de la plantation 'ylang, vanille, curcuma, fruit à pain, banane rouge. Et goûtent au repas composé de produits de la plantation.
Une plongée dans une nature et une culture préservées. "Oui, c'est une belle réussite! C'est une belle histoire" s'exclame en riant Hassani "Et elle n'est pas finie!"
On s'en doutait un peu...
Route de l'ylang
Couché dans le lit d'un torrent un panneau "route de l'ylang". "Il va falloir le remettre en place!". Souci d'ordre, l'une de ses caractéristiques. Organiser, construire des projets.
A 30 ans il a repris depuis plusieurs années les 4,5 hectares des terres de sa famille. Elle est installée depuis 6 générations à Ouangani. D'un terrain qui parvenait difficilement à nourrir les 9 enfants il a fait une petite PME rentable.
Cette "route de l'ylang" ne s'est pas tracée sans mal.
Jeune, Hassani accompagnait son père "Mon père m'a initié. Il m'emmenait tout le temps. On coupait les fleurs dès qu'elle étaient écloses". se rappelle-t-il. Et d'ajouter avec un sourire : "L'ylang c'est comme les vaches! Il faut les traire! Plus on trait et plus elles donnent du lait!"
Le "déclic" de son destin se produit tôt dans sa vie. "En classe de troisième je me suis mis en tête d'aider mon père à mieux gagner sa vie. Il faisait 7000 à 8000 euros par an. Plus le temps passait -c'était il y a 15 ans- plus ça devenait limite! Tout augmentait!"
En permanence à ses côtés le jeune homme comprend qu'il faut tracer d'autres pistes pour rentabiliser ce bout de terrain.
Vendre en direct
"Mon père travaille tout le temps mais son travail n'est pas valorisé! Il se fait avoir!" constate le fils. Encore en troisième!
Il organise le changement. Commence par acheter des flacons. Distille les fleurs d'ylang et remplit les fioles de la précieuse essence. Organise la vente directe.
Il échappe ainsi en partie aux grossistes qui passaient une fois par semaine . Et achetaient la production familiale à bas prix.
Le collégien se lance seul dans une activité de marketting "J'ai fait des affiches "venez visiter la plantation!" Vente directe d'ylang". Salles des profs, lieux publics, gites.
En peu de temps résultats suivent! La petite exploitation multiplie par quatre son chiffre d'affaires. 30 000 euros par an! Un vrai pactole dans ce pays loin des sites touristiques balnéaires du lagon.
Porté par sa volonté de réussir Hassani passe un bac éco et social, décroche un BTS "assistant de gestion PMI" et s'engage dans une licence "éco et gestion d'entreprise". Il a à peine 20 ans.
Des projets... à la dépression
En 2010 il crée son entreprise : "AROMAORE". Avec trois associés il s'engage dans trois directions. L'agro-tourisme, l'exploitation agricole et la vente en boutique.
A Mamoudzou beaucoup d'habitants se souviennent de ces boutiques. Vanille, ylang, d'autres produits locaux et de l'artisanat étaient vendus en direct.
Un succès commercial couronné de prix régionaux et nationaux "catégorie dynamique rurale". En 2015 un prix "développement durable".
Avec la réussite les tensions naissent au sein de l'équipe. Les trois associés se séparent. Hassan continue. Seul. Et seul il porte les trois actibvités. "Je travaillais 20 heures par jour!"
En 2014, corps et esprit lâchent.En médecine cela s'appelle un "burn out". Une "explosion" sous le crâne où la personnalité est comme "carbonisée" -"burn" en anglais- par des pressions qu'elle ne supporte plus.
Aujourd'hui Hassani évoque ce temps de la dépression avec recul. Sinon sérénité.. Une ananlyse sans concession. "Pendant trois ans je n'ai pas eu de vie sociale! Toujours "Objectif chiffre" ou "objectif croissance"! On laisse tomber le côté humain!"
Il devient étranger aux autres parce qu'étranger à lui-même. Ses proches ne comprennent pas.
Sur des conseils d'amis il ferme les boutiques. Et se consacre à la culture et à l'agro-tourisme.
"Je recommence trouver un équilibre. Les choses se mettent en place tranquillement" conclut-il. Une vie retrouvée.
Des projets à taille humaine
Encore des projets... mais "à taille humaine" pour un seul homme! Avec d'autres petits producteurs il s'est engagé dans une organisation de la filière ylang. Une nécéssité pour résister aux grossistes qui proposent d'acheter la production à bas prix. Pour la revendre à prix d'or.
La concurrence extérieure est rude. Aux Comores le kilo d'essence au départ producteur est de 100 à 110 euros. Ici, 300 euros. Premier atout, c'est la qualité de l'ylang de Mayotte.
L'autre atout réside dans la cueillette et la distillation. Cueillir exige des gestes précis. Délicats. Sur une même branche certaines fleurs sont écloses. D'autres sont en bouton. A proximité immédiate. Il s'agit d'aller vite... sans massacrer.
Quand on sait qu'il faut 50 kilos de fleurs pour un litre d'essence d'ylang... la finesse du savoir-faire est évident!
"C'est pas facile" commente Hassani. "Un saisonnier entraîné va cueillir 2,5 à 4 kilos de fleurs en une heure. Un novice 500 grammes"... Mieux vaut éviter le gâchis...
La distillation se fait dans un almbic artisanal alimenté à l'eau de source. Captée à quelques centaines de mètres.
Chaque fin de semaine des groupes de touristes, de scolaires, viennent visiter la plantation. Et participent aux activités traditionnelles (tressage, msindzano..).Découvrent les cultures de la plantation 'ylang, vanille, curcuma, fruit à pain, banane rouge. Et goûtent au repas composé de produits de la plantation.
Une plongée dans une nature et une culture préservées. "Oui, c'est une belle réussite! C'est une belle histoire" s'exclame en riant Hassani "Et elle n'est pas finie!"
On s'en doutait un peu...