La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint- Denis de la Réunion a remis en liberté Hakim Karki le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Mamoudzou (Mayotte), incarcéré depuis lundi après avoir été mis en examen pour viol . Il a été placé sous contrôle judiciaire.
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a remis en liberté Hakim Karki, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Mamoudzou (Mayotte), incarcéré depuis lundi après avoir été mis en examen pour viol, a-t-on appris de source judiciaire.
Le magistrat a été placé sous contrôle judiciaire, a précisé cette source à l' AFP.
La détention provisoire de M. Karki, 42 ans, avait été décidée par la juge des libertés et de la détention de Saint-Denis alors que les trois juges d'instruction, siégeant en formation collégiale dans ce dossier, s'étaient prononcés pour une mise sous contrôle judiciaire. Le parquet avait demandé l'incarcération du magistrat.
La plainte d'une jeune femme d'une trentaine d'années est à l'origine de la procédure judiciaire lancée à l'encontre du juge.
Après une soirée passée dans un restaurant de Mamoudzou, le chef-lieu de Mayotte, dans la nuit du 1er au 2 juillet, Hakim Karki serait rentré chez lui en compagnie de la plaignante, et l'aurait violée, selon les faits dénoncés par la plaignante le mercredi 2 juillet.
Selon le parquet "M. Karki, sur lequel ont été constatées de multiples traces de violences et notamment des griffures, reconnaît l’existence de relations sexuelles empreintes de violences, selon lui, demandées par la plaignante".
Cette version des faits "est formellement contestée par la victime" souligne la procureure adjointe, Emmanuelle Barre.
Aucune confrontation ...
L'affaire est instruite à La Réunion car le procureur de Mayotte, Joël Garrigue, s'est lui-même dessaisi de l'enquête, le mis en cause étant magistrat dans le même tribunal que lui. Les investigations ont donc été confiées au parquet de Saint-Denis de La Réunion, juridiction la plus proche et dont dépend le tribunal de Mayotte.
M. Karki a été interrogé samedi de la semaine dernière et mis en garde-à-vue par trois policiers venus spécialement de La Réunion. Il a été transféré à La Réunion lundi.
Les trois enquêteurs ont également entendu la plaignante mais aucune confrontation n'a été organisée entre elle et Hakim Karki. La jeune femme a quitté Mayotte pour la Métropole dimanche soir.
Atteintes aux droits de la défense, selon des avocats de Mayotte
Une situation qui provoque la colère de plusieurs avocats du barreau de Mamoudzou. Dans une motion publiée ce jeudi, ils estiment que des "atteintes graves aux droits de la défense (ont été) perpétrées au cours de cette procédure" et regrettent " la précipitation avec laquelle la décision de déférer le magistrat a été prise, sans une enquête sérieuse et équilibrée" ainsi que de "l'absence, à (leur) connaissance, de vérification de la crédibilité des propos de la plaignante".
Nouveau dépaysement en perspective
L'affaire devrait une nouvelle fois être dépaysée puisque "compte-tenu des fonctions exercées par M. Karki dans le ressort de la Cour d’appel de Saint-Denis", le procureur général de Saint-Denis a sollicité dès lundi le dessaisissement du Tribunal de grande instance de Saint-Denis au profit d’une autre juridiction, a priori en France métropolitaine.
Hakim Karki instruit depuis 2011 l'affaire Roukia, du nom d'une jeune fille décédée à Mayotte des suites d'une overdose.
Dans ce dossier sensible aux multiples rebondissements, l'enquête a notamment mis en lumière l'implication d'agents du groupement d'intervention régional (GIR) de Mayotte dans un trafic de drogue entre les Comores et Mayotte.
Certains agents du GIR sont soupçonnés d'avoir fourni de la drogue à des indics comoriens.
Plusieurs tentatives de dessaisissement du juge Hakim Karki n'ont pas abouti.
AFP : Mahdia Benhamla / Guillaume Daudin