A l’aube de ce vendredi 14 octobre, l’armée Comorienne est entrée à Mbeni. Selon plusieurs témoignages, elle a procédé « à des arrestations massives ». Impossible à l’heure qu’il est de connaitre le nombre de personnes arrêtées. Plusieurs maisons seraient saccagées par les forces de l’ordre. Au moins une fenêtre du service dentaire de l’hôpital de Mbeni a volé en éclat, information confirmée par un médecin. L’on fait état sur place de l’usage de gaz lacrymogènes et de citoyens arrêtés manu militari, embarqués dans des pick-up. La situation est tendue. Les habitants ont déserté la voie publique.
Jeudi dans la soirée, le ministre de l’intérieur Mahamoud Fakridine et le délégué à la Défense, Youssoufa Mohamed Ali se sont rendus à Mbeni. Ils ont visité les maisons incendiées par les jeunes, comme celle de leur collègue du ministère des finances, Mze Aboudou Chanfiou, originaire de la ville. Au cours de cette visite, le délégué à la défense a qualifié de « formidable », « le travail de maintien de l’ordre effectué par la Gendarmerie ». « Ce qui s’est passé ici est horrible, une ville ne peut pas être une zone de non droit, les auteurs de ces actes répréhensibles seront sanctionnés ».
Plus tôt dans l’après-midi du jeudi, c’est le procureur de la république Ali Mohamed Djounaid, qui s’est adressé à la presse, entouré par des officiers dont le commandant de la gendarmerie. Il a dressé un bilan « des actes de vandalisme perpétrés par des jeunes de Mbeni ».
9 maisons incendiées ainsi que la brigade de gendarmerie de la localité et 3 voitures appartenant aux forces de l’ordre. « Les auteurs de ces actes seront punis avec une sévérité particulière », a-t-il promis. Au cours de sa rencontre avec la presse, il n’a pas eu un mot pour les blessés ni pour les maisons vandalisées selon plusieurs témoignages par la force publique.
Les pouvoirs publics nient l’utilisation d’armes à feu et reconnaissent seulement l’usage de gaz lacrymogène, ce qui est contredit par plusieurs médecins. « Le plus gravement atteint a eu une balle ayant traversé la région lombaire », a confirmé un praticien présent au bloc opératoire le 12 octobre dans l’après-midi.
Jeudi matin, tous les accès menant à Mbeni sont bloqués par les gendarmes qui ont reçu l’ordre de ne laisser passer personne. Seules les ambulances transportant des blessés ont l’autorisation de circuler. Les journalistes sont concernés par cette interdiction
Le mercredi 12 octobre, Mbeni située à quelques 75 kilomètres de la capitale, s’apprête à célébrer l’anniversaire du prophète Mahomet à 15h30, qui comme tous les ans, intervient le 15eme jour du mois de Maoulid. La ville est divisée car le 28 septembre, le gouvernement a décrété que les cérémonies de Maoulid se tiendraient en soirée les jours de la semaine pour lutter contre l’absentéisme dans l’administration publique. La commémoration est maintenue.
Peu avant le début des festivités, la gendarmerie fait irruption usant de gaz lacrymogène pour disperser la foule. Les jeunes ripostent avec des projectiles. Les forces de l’ordre font feu notamment avec des balles réelles selon plusieurs sources autorisées. Il y a eu en tout une vingtaine de blessés « à la gravité modérée, pronostic fonctionnel osseux, tendineux et esthétique ». Dès que les hommes en treillis quittent la localité, en représailles, des jeunes incendient des maisons appartenant à des personnalités jugées proches du pouvoir. Depuis le mercredi au soir, personne n’a le droit de quitter la ville ni d’y entrer.