Loutoufia CHAMSIDDINE , créatrice de l’entreprise « Manager's Office » à Kaweni, est nominée pour les " Trophées Mahorais de l’entreprise" 2016.Diplômée en management à l’université de Clermont Ferrand,elle est spécialisée en gestion des finances des entreprises.
Loutoufia CHAMSIDDINE, jeune mahoraise battante de 25 ans, trouve dans cette nomination une reconnaissance des efforts entrepris à 21 ans.
Emmanuel Tusevo l’a rencontrée pour " Mayotte 1ère .FR Actualités"
Emmanuel TUSEVO : Qu'est - ce qui vous a motivée à entreprendre ce projet ?
Loutoufia CHAMSIDDINE : Avant, je travaillais dans un cabinet connu sous le nom de " Financière de Mayotte" et c'est là que j’ai vu défiler beaucoup d'artisans du bâtiment qui souhaitaient avoir des aides en investissements et assez souvent, les dossiers n’aboutissaient pas parce qu’il y avait un défaut d’organisation administrative et financière de leurs activités.
C'est de là qu’a germée dans ma tête l’idée de créer " Manager's Office" afin d'accompagner, au quotidien et de manière assez ponctuelle, ces artisans.
"Managers Office" les accompagne essentiellement pour toute la partie administrative de leur activité...en ce qui concerne notamment la préparation des dossiers pour les appels d’offre, les devis, les factures, les relances clients.
Souvent, ces artisans ne cherchent pas à engager des prestations en continu faute de moyens et vu leur taille alors qu'ils ont un réel besoin de recourir à un professionnel qui les accompagne dans ce travail.
EMMANUEL TUSEVO :Dans le contexte socio économique difficile de Mayotte, comment avez-vous osé vous attaquer à un tel challenge ?
Loutoufia CHAMSIDDINE : Moi, j’ai choisi l’option de relever ce défi à petits pas pour être sûre d’y arriver. Pour ça, j’ai commencé à domicile. De bouche à oreille, par les contacts que j’avais, j’ai fait connaître le projet et j’ai été soutenue par le cabinet " Maoré Conseils" qui m’a accompagnée dans cette démarche et j’ai commencé avec un , puis deux artisans.
J’intervenais chez eux, ils avaient aménagé pour moi un petit coin travail où je faisais les traitements dont ils avaient besoin. Durant deux ans, j’allais chez le client pour faire le travail chez lui.
Avec le temps, il a fallu s’installer quelque part pour se faire connaître.J’ai demandé une petite aide auprès du Conseil Général qui m’a soutenue et j’ai pu installer un bureau ouvert au public sur Kaweni.
Aujourd'hui, on ne s’adresse pas qu’aux artisans, on continue de faire le travail pour eux, mais on propose aussi des prestations aux particuliers. En plein village de Kaweni où nous sommes installés, les gens ont souvent besoin de faire rédiger une lettre administrative et des jeunes étudiants ont des traitements de dossiers à faire...
Emmanuel TUSEVO : Et comment évolue votre jeune entreprise ?
Loutoufia CHAMSIDDINE : Avec les finances, on ne s’ennuie pas. Comme c’est une matière présente dans tous les secteurs, ça permet de pouvoir prétendre à plusieurs domaines d’activité.
Je suis très active de nature et j’ai besoin d’être dans un domaine professionnel où on est en éternel rebondissement comme dans le bâtiment. On touche à tout. Il y a des mecs qui sont sur les chantiers, ils touchent au béton mais derrière, il y a toute une batterie des personnes en ressources humaines qui travaillent, que ce soit au niveau du suivi des chantiers, du suivi financier de l’opération, il y a une panoplie de savoirs faire, c'est ça qui m’attire, on ne s’ennuie pas. On touche à tous les domaines. On n’est pas figé, on ne se dit pas: j’ai fini ma tâche, je ne sais plus quoi faire... il y a toujours quelque chose à faire.
Emmanuel Tusevo: Avez-vous un message à partager aux jeunes en général et aux jeunes femmes en particulier qui se posent la question d’entreprendre ou de ne pas entreprendre ?
Loutoufia CHAMSIDDINE : Je suis originaire de Kaweni. Aujourd'hui, arriver là où je suis, j'ose dire sans prétention que c' est une grande fierté d' avoir pu installé mon entreprise dans Kaweni , de pouvoir ramener du monde dans mon village, montrer qu' à Kaweni , il n' y a pas que le côté négatif dont on parle souvent mais qu' il y a des jeunes qui réussissent et qui invitent les gens à rentrer dans Kaweni pour voir ce qui s' y fait.
Créer et développer une entreprise n’est pas un long fleuve tranquille.
On traverse des moments très durs. On est tenté, quelques fois, de se dire que c'est parce que je suis une femme que c’est dur mais je ne pense pas que ce soit propre à la femme. C'est parce le monde des affaires est un univers impitoyable. Je reste convaincue, comme disait un jeune entrepreneur et digital nomade de 15 ans, que " c'est une arme de pouvoir créer son propre job, là où il y en a la demande ou bien là où il peut être exercé...car, avoir l' esprit d' entreprendre, c'est accepter de s' adapter et de prendre soi-même son destin en main."
Emmanuel TUSEVO : Comment avez-vous réagi en apprenant que vous étiez nominée pour les Trophées Mahorais de l’entreprise" organisés par le groupe SOMAPRESSE qui publie notamment le magazine " Mayotte Hebdo"?