« Nous risquons une augmentation du prix du pain à moins d’un allégement des taxes portuaires »
Même si des chiffres officiels font défaut, le pain est un produit de consommation très prisé des comoriens. Pour s’en persuader, il suffit de se rendre, nuitamment, aux abords des boulangeries qui sont encore en activité dans la capitale. Les files d’attente qui sont de plus en plus longues au point de déborder sur la voie publique sont la conséquence d’une pénurie de farine devenue presque chronique depuis juin dernier, avec toutefois, des répits de quelques semaines.
Pour Houssam Chamsoudine, directeur exécutif des Établissements Nassib possédant 3 boulangeries dans la capitale, donc de loin le plus grand producteur de pains, les raisons de la raréfaction de cette matière première sont nombreuses. « Il y a le manque de conteners sur le marché, surtout ceux adaptés pour le transport de produits alimentaires, ce qui fait que nos fournisseurs ont du mal à en trouver pour nos marchandises. Il y a aussi l’embouteillage maritime qui impacte tout le commerce au niveau mondial. Pour notre cas, nos conteners qui proviennent de Maurice s’accumulent à Longoni durant des semaines, entrainant des difficultés à respecter les délais de déchargement à Moroni », a-t-il longuement expliqué. Résultat, une persistante pénurie de farine. Ainsi, les boulangeries Nassib ont diminué leur production journalière passant de 30 pétrins équivalant à 18300 pains à 10 pétrins soit 6100 pains.
D’autres boulangeries ont baissé les rideaux en attendant des jours meilleurs, comme celle située non loin de la place de l’Indépendance à Moroni. « Cela fait deux semaines que j’ai fermé mon commerce pour la simple raison que je n’ai plus de farine », a réagi son gérant, Abbas Mahmoud Soidiki que nous avons contacté au téléphone. Il se fournissait en farine à partir de la Turquie mais « l’acheminement de la marchandise à partir de là-bas est de plus en plus compliqué », a-t-il déploré. Houssam Chamsoudine des Établissements Nassib trouve lui aussi que faire venir ses conteners de farine à partir de l’île Maurice prend trop de temps alors « qu’en temps normal, il faut juste 7 jours pour rallier Port-Louis à Moroni ». Il n’exclue donc d’importer son stock de farine à partir de la Tanzanie, ce qui ne sera peut-être pas sans conséquence sur le prix du pain. « Je serai peut-être obligé d’en commander à Dar-Es Salaam seulement la tonne se vend à 650 euros alors qu’à Maurice elle s’écoule à 500 euros. A moins d’un allègement des taxes portuaires, le prix du pain pourrait être revu à la hausse ».
Joint au téléphone pour connaitre la position du gouvernement quant à une éventuelle baisse des charges portuaires afin d’éviter la hausse du prix du pain dans un contexte d’une flambée des prix de produits de première nécessité ; le ministre de l’économie, Mze Aboudou Chanfiou a fait savoir ceci : « mes services chercheront à savoir quelles sont les charges liées à l’importation de la farine et s’il y a un impact au niveau douanier, le gouvernement avisera ». Il faut noter que le gouvernement a accordé une ligne de crédit d’une dizaine de millions d’euros au secteur privé avec un taux d’intérêt de 6.5% (au lieu des 13% habituels), pour justement faciliter les commandes des produits de première nécessité (dont la farine fait partie).
En attendant, si dans les lieux de vente habituels, le prix du pain n’a pas augmenté, certains revendeurs spéculent et tirent ainsi le coût de la baguette vers le haut.