Nous poursuivons notre série de découvertes des entrepreneures de Mayotte dans le Fashion. Après Darline Daroueche, nous sommes allés à la rencontre de Zili HAMIDA, cogérante du magasin UVAGA Concept Store à Mamoudzou.
Emmanuel TUSEVO : Zili Hamida,vous êtes cogérante du magasin UVAGA CONCEPT STORE. Est-ce que le terme UVAGA a une signification particulière ?
ZILI HAMIDA : Bien sûr. UVAGA veut dire briller en shimaoré. On a voulu appeler notre boutique UVAGA parce que chez nous les femmes brillent et les hommes aussi.
ET : Votre boutique s’adresse aussi bien aux femmes qu’aux hommes
ZH : Exactement. Au départ, notre collection ne s’adressait qu’aux femmes. Mais parce qu’elles souhaitent habiller leurs maris, leurs conjoints, on a mis un petit corner dédié aux hommes, une collection ethnique, classique, branchée.
ET :Comment êtes-vous tombée dans le bain du fashion ?
ZH : Je crois que toutes les femmes aiment le fashion, elles aiment les belles choses. Parce que nous aimons le beau, on a voulu faire ouvrir une boutique qui soit dédiée à la mode pour partager notre idée de fashion avec les autres.
ET : Vous auriez pu choisir aussi une autre profession. D'où vous vient cette passion ? Expliquez-nous davantage cette passion pour la mode, le stylisme.
ZH : Euh... D'où me vient la passion de la mode ? C'est depuis que j'étais toute petite. J'avais une maman très coquette qui était couturière. Dans toute la famille, pratiquement, on est couturier. On nous confectionnait des petites choses, des petites robes quand j’étais petite. Même mes sous-vêtements, ma grand mère me les faisait à la main. La passion de la mode est venue de là, en tant que femme, on aime bien être jolie, être bien habillée.
ET : C'est important ces histoires de code vestimentaire comme vous dîtes : être bien habillé, bien sur soi, c'est important dans la vie ?
ZH : Bien sûr, bien sûr c'est très important. Bien s'habiller apporte de la lumière, de l'assurance, un bienfait, de la confiance en soi. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde où tout le monde veut se montrer et se faire voir, l' image est très importante. Quand je vois sur les réseaux sociaux le succès des selfies ; on en fait beaucoup, on les retouche pour sublimer notre image, publier une image travaillée avec un autre teint plus lumineux et plus sophistiqué.
ET : Et aujourd'hui, vous organisez avec une autre collègue, une journée Pangu Shopping , c’est quoi ?
ZH : Le Pangu, c'est ce qui m’a fait grandir. Le Pangu, c'est le reste du riz qui est cramé plus ou moins et on ajoute de l’eau et on boit ça. On buvait ça le matin et on buvait ça au goûter en sortant de l’école coranique, du shioni. Ma grand-mère me préparait mon pangu, j’avais mon pangu sucré ou pas sucré. Le Pangu Shopping, est une journée ouverte UVAGA, où on célèbre la beauté. J’ai voulu associer cette saveur maternelle du pangu au plaisir de shopper. En métropole ou ailleurs, on organise des apéros pour les ventes privées et chez UVAGA nous offrons le pangu. Le Pangu shopping est un moment très convivial, c'est le 5 ème pangu qu'on organise, les gens adhèrent, il y a plein d’animation, les femmes viennent en famille, on rigole, on décompresse. Le Pangu shopping est un rendez-vous publique ponctuel organisé un dimanche pour shopper entre ami(es) et en famille tout en dégustant le pangu.
ET : Avez-vous rencontré des obstacles ou des freins dans le développement de votre boutique ?
ZH: Je crois qu'en tant qu'entrepreneure, que ce soit dans la mode ou dans n' importe quelle branche, c'est un combat ! Nous nous battons chaque matin, chaque jour. Nous avons beaucoup de projets et d’ambition et la clé pour la réussite est la passion. Grâce à elle, nous nous battons tous les jours, nous nous baissons pas les bras. Il faut avoir confiance en soi, il faut aimer ce qu'on fait et vivre et partager cette passion avec les clients ou avec tes collaborateurs.
ET : Donc à Mayotte, on peut vivre de son entreprise, d’un fashion concept store ?
ZILI HAMIDA : Bien sûr, on a des clients, on y vit, à Mayotte, on a le droit d'avoir un concept store, d'avoir même, différents concepts stores. Moi personnellement, je crois beaucoup aux Mahorais, je crois énormément à cette génération qui arrive, je crois en nous, je crois à la femme mahoraise, je crois à mon île quand même. Je reste optimiste.
" Les kabua me vont si bien "
ET : A la dernière opération « Le salouva vous va bien » beaucoup de femmes, jeunes, adultes, jolies, mignonnes les unes et les autres, étaient bien sapées en salouva. Mais comme en tant journaliste, je laisse traîner mes oreilles par ci et par là, j’ai entendu une personne dire : « C’est dommage, certaines dames sont bien habillées en salouva mais au niveau des chaussures, des kabua, ce n’est pas à la hauteur». Je vois que vous vendez aussi des chaussures dans votre boutique. Quels conseils donnez-vous à vos clientes et clients pour que leur kabua leur aille si bien ? C’est important les kabua bien assortis aux lambas*?
ZH : C’est très important. Les kabuas, c’est la clé de la tenue vestimentaire que ce soit pour une femme ou pour un homme. La base, c’est les chaussures. On ne peut pas sortir avec une robe par exemple, ne serait-ce qu’une robe en lamba one, porter ça avec une paire de tongue magnégné comme on dit chez nous. Donc le kabua, c’est la base, c’est la clé d’une tenue bien réussie. Le kabua pour nous les femmes, c’est une histoired’amour !En général, chaque femme dans ce monde, que ce soit à Mayotte ou ailleurs, a au moins 30 paires de chaussures chez elle, au moins. On achète des chaussures tout le temps, nos chaussures nous rassurent, nos chaussures nous stabilisent, nos chaussures nous donnent une posture, donc, c’est très important, c’est la clé. Donc, je suis entièrement d’accord avec la personne qui a dit que les salouvas étaient super bien portés mais il y avait un hic pour les kabua. En effet, le kabua, c’est effectivement le détail qui fait la différence sur chaque tenue.
E.T : Si j’arrive chez vous, je frappe à votre porte, je vous dis : « Habillez-moi ! » ou alors, « relookez-moi !!»,Comment ça se passe ?
Z.H : Ça se passe très bien. J’ai cette clientèle qui vient me voir. Récemment, j’ai validé une formation de conseillère en image. Je suis « coach en image pour hommes et femmes ». Quand vous venez me voir, vous pouvez sortir complètement relookés. Le relooking et le conseil en images sont deux choses différentes.L’idée est de prendre en charge le look d’une personne mais en tant que conseiller le processus est plus long. Normalement une personne fait appel à un coach en image, pendant une ou deux semaines et ne revient plus. Le relooking est éphémère, donc vous pouvez sortir de là super bien sapé ou complètement changé et retrouver votre look habituel le lendemain. J’ai des femmes qui arrivent et qui me disent : « Habillez-moi, je dois aller à un cocktail, je dois aller à un mariage, coiffez-moi, maquillez moi ! Ce service aussi est supplémentaire, nous n’avons pas encore communiqué dessus mais cela fait partie des projets en cours de UVAGA dès qu’on aura augmenté la surface d’accueil de notre boutique.
" Chaussures Panafrica "
E.T : Vous venez de lancer la promotion d'une marque de chaussures " Panafrica ? "
Z.H : Panafrica est une marque que j’ai découverte il y a 2 ou 3 ans. Les semelles et les lacets sont fabriqués ailleurs. Cette marque fait tourner l’économie africaine et c’était ma façon d’y contribuer et de faire ladécouvrir aux autres. Au pangu shopping, il y a beaucoup de gens ce matin et ils connaissent déjà la marque internationale. En France hexagonale, on en trouve pas mal aux grandes enseignes parisiennes. Ils écrivent dans leur communication : « Panafrica est une marque responsable, notre ambition, c’est de fabriquer des baskets différemment, dans le respect de ceux qui les produisent. Soucieux de notre impact social, économique et environnemental, grâce à vos achats, Panafrica soutient des projets à l’éducation et à la formation professionnelle en Afrique. »
UVAGA, by Zily*
E.T : On lit souvent dans votre communication « Uvaga by Zily ». Quelles sont les personnes qui ont édifié cette entreprise ?
Z.H : Je travaille avec ma sœur depuis le début de l’aventure UVAGA. Nous avons cette passion de la mode et souhaitons la partager avec notre clientèle. Nous nous disons tous les jours : « Nous sommes l’ exemple de nos enfants, c’est super important, nous avons des enfants, nous sommes le miroir de nos enfants ».Aujourd’hui, nous avons un concept store et inchallah, demain, nos enfants, les enfants de Mayotte se diront : « Nous avons connu un super concept store UVAGA et aujourd’hui, c’est à mon tour d’avoir une boutique mon propre concept store dans un immense centre commercial ». Malheureusement aujourd’hui ça n’existe pas encore à Mayotte mais ça viendra, et j’y crois, j’y crois beaucoup ! Je crois en Mayotte.